entrevue

Entrevue avec Jacques Joli-Coeur

Maire suppléant et responsable des relations internationales à la Ville de Québec


 

Après les élections du 4 novembre 2001, une fois lui-même réélu, le maire Jean-Paul L’Allier a choisi un grand amoureux de Québec, qui y a toujours vécu et féru de son histoire, comme maire suppléant. Jacques Joli-Coeur est également responsable des relations internationales et des questions de toponymie.

Pendant le présent mandat de quatre ans, il aura un grand rôle à jouer à la Ville de Québec, mais aussi à la Communauté métropolitaine de Québec, où il préside la Commission des relations internationales. Il a accordé cette interview à COMMERCE MONDE le 28 février 2002, après tout juste deux mois dans ses nouvelles fonctions.

Entrevue réalisée par Daniel Allard

(Commerce Monde) Qui est Jacques Joli-Coeur?

(Jacques Joli-Coeur) «C’est un citoyen de la Ville de Québec, de la ville historique, qui est aussi un citoyen du monde. (...) J’ai fait l’essentiel de ma carrière professionnelle comme diplomate auprès du ministère des Relations internationales du gouvernement du Québec, occupant de nombreuses fonctions, dont celle de Chef du protocole du Québec à deux reprises. J’ai aussi eu le privilège d’être sous-ministre adjoint au ministère de la Culture et des Communications pendant près de trois ans, responsable des régions, de la capitale et de la métropole; ce qui m’a donné l’occasion d’acquérir une connaissance très marquée de l’ensemble du Québec.

Je suis historien et juriste de formation (...)

Pourquoi je suis devenu une personne politique? Ayant fait ma vie dans le domaine public, je sais fort bien que ça vaut la peine de s’engager dans la vie publique, parce qu’on peut faire un certain nombre de choses pour la société, des choses qui méritent d’être faites, sur le plan sociétal, du développement culturel et du développement économique.

Et pourquoi à ce moment-ci? Parce que l’État (...) ayant décidé de doter le Québec d’un certain nombre de villes avec une masse critique qui permet un meilleur développement des communautés, j’assumais que ça valait vraiment la peine de s’engager politiquement dans cette aventure nouvelle. De créer ici, dans notre région, deux grandes villes - Lévis et Québec - et une Communauté métropolitaine, et de s’engager sous le leadership d’une personnalité aussi transcendante que Jean-Paul L’Allier, je crois que c’est une belle aventure qui permet de développer une vision de société et des possibles pour l’avenir de notre région.

Une région qui risque de pâtir rapidement d’une décroissance démographique. Il suffit de voir le Japon d’aujourd’hui, puissance économique d’hier, qui ne réussit pas à se relever, parce que déjà le Japon subit la décroissance démographique (...) avec tout ce que cela entraîne...»

(C. M.) Comment ça fonctionne maintenant au niveau des relations internationales dans la nouvelle Ville de Québec. Il y a le maire, il y a vous, il y a le Bureau des relations internationales. Qu’est-ce qu’il faut comprendre de la manière dont ça fonctionne?

(J. J.) «D’abord on doit comprendre qu’aujourd’hui (...) de l’international, tout le monde en fait et fort heureusement. Ce n’est plus une question de privilège d’État. (...) Au niveau des élus, avec le maire L’Allier, je suis celui au niveau politique responsable des relations internationales. Et sur le plan administratif, il y a un Bureau des relations internationales qui fait très bien les choses.

Je n’ai pas le monopole. Ma collègue Linda Cloutier [en janvier], elle était à Porto Alegre. Sur d’autres points, je traite aussi avec mon collègue Claude Larose. Moi, je suis un peu chef d’orchestre.

(...) Dans une ville de 500 000 habitants, le maire n’a plus la même disponibilité, j’occupe donc une fonction qui n’existait pas avant. (...) Je dois me rendre, dans quelques jours, à Bamako pour une rencontre de l’Association internationale des maires de capitales et métropoles francophones, où monsieur L’Allier ne peut pas aller et où je devrai être. Alors, au jour le jour [pour l’international] j’en ferai plus que monsieur L’Allier. Au plan de l’orientation, nous sommes vraiment au diapason.»

(C. M.) Les gens qui s’intéressent à l’international dans la région doivent-ils se dire: c’est plus monsieur Joli-Coeur que je dois rencontrer que le maire ?

(J. J.) «Je dirais que c’est un peu blanc bonnet-bonnet blanc. Je suis évidemment plus disponible sur ces choses.»

(C. M.) Quelles sont vos priorités d’actions actuellement?

(J. J.) «(...) Au niveau intellectuel et conceptuel, c’est très certainement la mise en place du futur commissariat aux relations internationales, un outil que nous voulons régional. (...) L’esprit de ce commissariat à venir, c’est d’en faire une plaque tournante, une chambre d’information de tous les intervenants, où tous les acteurs de la région trouveront dans un organisme des bases de données, de l’information, etc., pour que l’action de l’un enrichisse l’action de l’autre.

(...) Mais ces choses sont pour l’instant en mode gestation. Fin mai, début juin, il y aura l’accouchement.»

(C. M.) Que souhaitez-vous que l’on retienne de vous dans quatre ans?

(J. J.) «D’être reconnu par mes collèges et par la société comme étant un membre activiste d’une équipe, la première équipe de direction d’une ville nouvelle et d’une communauté régionale nouvelle. Je suis membre d’une équipe et j’y apporterai tout. Je ne me cherche surtout pas de monument personnel. (...)»

(C. M.) Jusqu’où peut aller l’action d’une ville comme Québec au niveau des relations internationales ?

(J. J.) «C’est à la fois si peu et tant. Si peu, parce que (...) la première préoccupation des pouvoirs publics d’une ville, c’est au niveau de la sécuration: approvisionnement en eau, la protection des biens, des personnes, les incendies. Et la valeur ajoutée de la gouverne d’une ville par rapport à une autre c’est tout le reste. Ce n’est pas nécessairement lourd sur le plan budgétaire. Mais les façons de faire, d’inculquer des valeurs à la société, sont des points qui différencient une gouverne d’une autre. En matière internationale, une ville a assez peu de moyens. Elle doit s’assurer que la région joue pleinement le rôle de la politique québécoise et de la politique canadienne en matière internationale. (...) C’est d’apporter une valeur ajoutée, en jouant un rôle de chef d’orchestre. Jean-Paul L’Allier a dirigé en ce sens plusieurs missions économiques. C’est ce que peut apporter la ville, c’est sa meilleure contribution. (...)»

(C. M.) Vous occupez aussi le poste de président de la commission des relations internationales à la Communauté métropolitaine de Québec. Parlez-nous de ce qui va se passer dans cette structure?

(J. J.) «(...) Ce n’est pas administratif. C’est une commission de réflexion et d’orientation. Une des raisons d’être sera de mettre en commun nos efforts, moi et mes trois collègues, Pierre Brochu, Clément Coulombe, Denis Giguère, pour travailler en complémentarité.»

(C. M.) Concernant la composition du futur Commissariat général aux relations internationales, est-il acquis que les entreprises du secteur privé, pas les chambres de commerce, mais des entreprises directement, y auront une place?

(J. J.) «La question n’est pas encore répondue et fait l’objet de beaucoup de réflexion. On en entendra beaucoup parler en mai-juin, autour de la date d’accouchement.»

(C. M.) En héritant des jumelages, pactes d’amitié, etc., de 13 villes, la nouvelles Ville de Québec se retrouve avec 41 liens à travers le monde. Quels sont vos objectifs par rapport à la situation? Faut-il faire un ménage?

(J. J.) «D’abord on priorise le préjugé favorable. Ce qui a été fait avant méritait d’être fait. (...) Est-ce que tout doit se poursuivre au niveau de la ville centrale ou bien au niveau des arrondissements? La réponse à cette problématique sera à géométrie variable, je pense. (...)»

(C. M.) Avez-vous déjà une idée de l’ordre de grandeur du nombre de jumelage que la nouvelle Ville de Québec pourrait entretenir avec des ressources adéquates?

(J. J.) «Ce n’est pas statutaire. Jusqu’à quel point nous pouvons devenir des partenaires des politiques du Canada et du Québec, politique étrangère bien sûr, politique de développement et d’aide internationale. Nous sommes dans un réseau, l’Association internationale des maires de capitales et métropoles francophones. Nos amis Français se voient donner des moyens par la République pour faire de la coopération internationale au niveau municipal. Nous pourrions fort bien faire, via l’ACDI, via les politiques fédérales en développement international. Je crois qu’il faut évaluer les choses. (...)»

(C. M.) Le budget pour les relations internationales est-il proportionnellement le même que pour l’ancienne ville?

(J. J.) «Nous fonctionnons avec un budget de transition et l’année 2002, c’est essentiellement la reconduction des mêmes sommes que les villes avaient avant. On peut parler de statu quo actuellement.»

***

Depuis quatre ans, 26 entrevues exclusives ont été publiées dans COMMERCE MONDE:

 
Aubut, Marcel
Beaudoin, Louise (MRI)
Benessahraoui, El Habib (IEPF)
Bouilhac, François (DG au MICST)
Boulanger, Pierre (SPEQM)

Boutros Boutros-Ghali (sec. gén. de la Francophonie)
Cannon, Lawrence (AmériContact)

Charbonneau Jean-Pierre (prés. ass. nat. du Québec)
Charest, Jean (Chef du PLQ)
Cliche, David (gouv. du  Québec)
Coulombe, Serge, (GATIQ)
De Celles, Pierre (ÉNAP)
Dorotea, Luciano (Ville de Québec)
Gaudreault, Ross (Port de Québec)
Hamelin, Louis-Edmond
Lafleur, Andrée (CCIEQ)
Lafleur, Michel (SPEQM)
Lagacé, Line (SPEQM)
L’Allier, Jean-Paul (Ville de Québec)
Lalande, Georges (Candidat mairie)
Marcoux,G. et A. Michaud, (Centre de foire)
Masse, Marcel (Dél. gén. du Qc.à Paris)
Myrvoll, Siri (OVPM)
Petrella, Ricardo
Picard, Bruno (Ambassadeur en Rép. Dom.)
Denis Ricard
(OVPM)

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