L’arrivée des années 2000 relevait d’abord du mythe. Nous nous demandions tous quel âge nous aurions le moment venu si nous étions, évidemment, venus au monde avant! Au 31 décembre 1999, les nouvelles technologies étaient déjà tellement dans nos vies que la peur du fameux « bug » de l’an 2000 fut parmi les vedettes du célèbre jour. Les systèmes informatiques traverseraient-ils la date fatidique? Ils le firent! L’enthousiasme pouvait demeurer. Par l’implantation des technologies de pointe et progrès des communications, les fameux changements économiques très tranchés vécu au cours des années 1990 avaient même fait annoncer que cette « Nouvelle économie » mettrait jusque fin au cycle des affaires. Que les nouvelles technologies, permettant de mieux contrôler les stocks – avec le just in time –, atténueraient, voire élimineraient, les récessions. Ne savait-on pas que le surinvestissement dans les stocks était l’une des causes premières des fluctuations économiques depuis la Seconde Guerre mondiale…
Effectivement les louanges de ladite nouvelle économie étaient méritées. Elle était réelle : Internet, les innovations des télécommunications et les nouvelles pratiques d’affaires qui en étaient issues aussi. Une véritable accélération de l’innovation et de la productivité fut belle et bien constatée. Mais des gens cupides sont vite venus gâcher la sauce, gonfler le gâteau, pour surtout partir avec.
« Comme la marée descendante révèle les rudes écueils sous la surface de l’eau, le reflux de l’économie a mis a nu les plus choquantes réalités de l’expansion : les problèmes liés à la comptabilité, aux PDG et aux banques, les relations entre marché et politique, la déréglementation… », analyse avec intelligence le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz dans son livre Quand le capitalisme perd la tête, lui si bon témoin des déraillements de l’économie mondiale de 2000 et 2001.
Problèmes d’éthiques comptables qui menèrent Arthur Anderson à la faillite, abus des PDG notamment avec les distributions de stock-options et des banques avec les cadeaux aux initiés et copains – qui provoqueront pour ses dernières des amendes de 1,4 milliard de dollars seulement dans le règlement judiciaire avec l’attorney général de l’État de New York, Eliot Spitzer. Dans les années 1990, la rémunération moyenne des hauts dirigeants des entreprises aux USA s’est accrue de 442% en huit ans, passant de 2 M$ à 10,6 M$. Une flambée d’abus.
www.oag.state.ny.us/press/statements/global/resolution.html.
À la réelle vague de croissance, s’ajouta, par la convoitise, l’immoralité et la corruption, un gonflement de bulle qui, elle, éclata d’autant plus qu’elle avait été artificialisée par les tromperies, mais n’en reste-t-il pas pour autant une promesse qui se réalisait?
Oui, le passage de l’ère industrielle à l’économie de l’information et du savoir laissa présager la fin des cycles économiques de croissance et de récession. Plus de deux siècles de capitalisme en montagne russe trouvaient enfin un aboutissement salvateur, un optimisme vers la disparition de la pauvreté. Bien des analystes très compétents y crurent lors de la fascinante décennie des années 1990 qui n’en finissait pas d’offrir de la croissance à qui mieux mieux. Il était si tentant d’y croire. L’économie de la troisième vague à la Alvin Toffler était belle et bien en marche et la donne changeait fondamentalement.
Le gouffre boursier de mars 2000 vint tout chambouler. Tout remettre en question. Mais en a-t-on tiré les bonnes conclusions… Le 11 septembre de la même année viendra certes brouiller l’analyse. Deux guerres du Golfe plus tard et plus de sagesse dans l’analyse des « start up » et des dot.com, il est possible d’y voir claire.
Un véritable vol du millénaire
L’enquête et le procès sont maintenant terminés et il devient évident que le rêve n’était pas impossible. On nous a volé les fruits de la 3e vague! Un véritable vol du millénaire.
La cupidité des courtiers de Wall Street avec une soif de gains faciles et surtout immoraux, ajoutée à trop de puissants PDG gourmands et malhonnêtes. Des gouvernements faibles devant des responsabilités d’État qui s’imposaient. Il fallait peut-être passer par là! Mais le temps est venu de bien comprendre cette histoire et de remettre les espoirs à la bonne place.
Ni la mondialisation économique, ni des excès de déréglementations ne doivent continuer de porter le blâme. Des fraudeurs et des mauvais exécuteurs ont fait dérailler le train. Le TGV de la nouvelle économie continue bel et bien d’exister.
Ce 1er janvier 2016 le grand quotidien La Presse de Montréal est devenu le premier au monde à mettre fin à son édition papier. Vive LaPresse+ uniquement sur internet. Les avions survolent la planète avec les nouveaux moteurs d’éco-conception 20% plus efficace. Merci à Bombardier.
Ce n’est pas vrai que la mondialisation ne fonctionne pas. Des milliards de dollars circulent mieux, plus vite, vers plus d’opportunités. De la richesse se crée. Du progrès aussi. Il faut organiser tout ça. Que la mondialisation politique suive l’économique. Équilibrer l’État et le marché.
Reprenons vite espoir en cette révolution de la 3e vague, forte du partage du savoir et de l’accès quasi immédiat à l’information partout sur le globe.
Souhaitons-nous cela pour 2016!