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Bilan du MIMAP
L'avenir de l'Afrique s'organise aussi à Québec

par Daniel Allard

Alors même que les chefs du G8 faisaient sommet en Alberta, la Ville de Québec ne faisait pas tellement en reste face aux débats entourant l'avenir de l'Afrique. Des millions et des milliards de $ se brassaient au G8; des idées et des solutions se brassaient entre la centaine de participants réunis du 25 au 28 juin 2002 à l'Université Laval pour la rencontre annuelle du bilan du MIMAP, essentiellement des spécialistes des questions reliées à la pauvreté et à l'Afrique.

Le programme MIMAP - Impacts microsociaux des politiques macroéconomiques et d'ajustement - constitue un réseau international de recherches et d'interventions sur la pauvreté et les politiques économiques. Lancé en 1990 par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), le programme MIMAP aide les régions du monde en développement à réduire la pauvreté par le truchement de meilleures évaluations et interventions. L'approfondissement des connaissances sur le coût humain des politiques et des chocs macroéconomiques et à l'amélioration des politiques et des programmes ayant pour objectifs l'équité et l'atténuation de la pauvreté sont au coeur de la démarche. Les membres de l'équipe MIMAP estimant qu'une plus grande précision dans l'identification des personnes et des ménages les plus pauvres constitue le fondement de l'efficacité des stratégies de lutte contre la pauvreté.

BIEN DÉFINIR LA PAUVRETÉ

Dans toute lutte, il importe de bien connaître l'ennemi: l'évaluation que ces spécialistes font de la pauvreté en Afrique peut jeter un nouvel éclairage sur l'importance de l'aide des pays industrialisés et sur ce dont on a vraiment besoin pour atténuer la pauvreté sur ce continent.

Les évaluations traditionnelles de la pauvreté se basent avant tout sur les niveaux de revenu et le pouvoir d'achat des individus. Les responsables du MIMAP, de leur côté, refusent de réduire la définition de la pauvreté à la seule notion de revenu et de dépenses. Ils prennent d'abord en considération des facteurs comme l'accès à l'eau potable, la qualité des matériaux des toits des logements, le nombre de chambres inoccupées, le temps du trajet jusqu'au dispensaire, la portion du revenu destinée à la nourriture, l'accès à l'électricité et à l'éducation. Pour eux, la définition de la pauvreté varie donc d'une région à l'autre, car ce sont les communautés qui en déterminent les caractéristiques.

Le taux de pauvreté en Afrique
est passé
de 58% à 54%

Entre 1994 et 2001, le taux de pauvreté en Afrique est d'ailleurs passé de 58% à 54%, selon des sondages menés récemment auprès des ménages. En effet, la majorité des indicateurs indiquent des progrès. Pourtant, 65% des Africains se considèrent pauvres et estiment que la pauvreté a augmenté. En chiffres plus concrets, plus de 40% des 659 millions d'Africains subsahariens subsistent avec moins de 1$US par jour. L'Afrique est d'ailleurs le seul continent de la planète où la pauvreté est perçue comme étant en hausse.

Au-delà des perceptions, 30 des 41 pays les plus endettés du monde se trouvent en Afrique et les gouvernements de ces pays consacrent un quart de leur budget au remboursement de leur dette envers des institutions étrangères. Et lorsque l'on regarde vers l'avenir, les défis demeurent tout aussi colossaux. Selon les prévisions, d'ici 2050, la population d'Afrique va tout de même plus que doubler, malgré les 5 500 décès (13 000 d'ici 2010) quotidiens causés par le sida.

D'autres chiffres entendus lors des conférences de la rencontre bilan du MIMAP révèlent cependant des odeurs d'espoir: plus de 15 pays en Afrique ont actuellement des taux de croissance économique annuelle de plus de 5%. Pas un pays développé n'a de tels taux.

Plus de 15 pays d'Afrique
ont des taux de croissance économique
de plus de 5%...
alors que pas un pays développé
n'a de tels taux

À Québec, d'éminents spécialistes de l'économie internationale et des questions reliées à la pauvreté (dont John Cockburn, Bernard Decaluwé, Randy Spence, Rohinton Medhora, Louis-Marie Asselin, Jean-Yves Duclos, Luc Savard, Anyck Dauphin) se joignaient à des chercheurs africains (dont Touhami Abdelkhalek du Maroc, Abdoulaye Diagne du Sénégal, Njuguna S. Ndung‚u du Kenya, Claude Wetta du Burkina Faso) pour parler de ce que les pays d'Afrique ont reçu jusqu'à maintenant et de ce dont ils ont besoin désormais.

Principal conférencier invité, Michael Spence, de l'Université Stanford, lauréat du Prix Nobel d'économie l'an dernier pour ses travaux sur l'analyse des marchés et l'économie de l'information, n'a pas manqué pour sa part de souligner, dans sa conférence intitulée « The Internet and the global economy in the next decade », la chance que représente Internet pour le développement des pays les plus pauvres de la planète. Ce, même si on compte actuellement plus d'internautes à New York que sur le continent africain tout entier.

On compte
plus d'internautes à New York
que sur le continent africain
tout entier

L'initiative du MIMAP est importante, car avec ses partenaires elle a créé un vaste réseau associant chercheurs des régions en développement, responsables des organisations citoyennes, responsables politiques et experts du monde entier, dans le but de soulager la pauvreté. Ce réseau comprend plus de 40 équipes de recherche distinctes travaillant à des projets dans plus de 20 pays d'Asie et d'Afrique de l'Ouest.

2,5 M$ DU CRDI VONT À L'ÉLABORATION DE POLITIQUES BASÉES SUR LA RECHERCHE EN AFRIQUE

Dans l'esprit du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (Nepad) et du Plan d'action du G8 pour l'Afrique, le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) annonçait par ailleurs, le 2 juillet 2002, qu'il affectera une somme de 2,5 millions $ afin de renforcer l'élaboration de politiques publiques fondées sur des recherches menées en Afrique.

Grâce à ce fonds spécial, le CRDI souhaite élargir le dialogue entre les chercheurs, d'une part, et les responsables politiques, de l'autre. « Notre but est d'accroître la pertinence des recherches et l'utilisation des résultats de la recherche par les décideurs à tous niveaux de responsabilité et de permettre ainsi aux chercheurs, aux institutions et aux représentants de la société civile africaine d'influencer les décisions sur des questions clés du développement », a déclaré Gordon Smith, président du Conseil des gouverneurs du CRDI.

15 millions $ pour la création d'un
centre pour la connectivité en Afrique

Le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), une société d'État canadienne, accueille favorablement l'engagement qu'a pris le gouvernement du Canada d'améliorer la connectivité en Afrique et se réjouit du rôle qui lui sera confié en vue de la réalisation de cet objectif.

Comme l'a annoncé le premier ministre Jean Chrétien à Kananaskis, le Canada affectera une somme de 15 millions $, sur trois ans, à la création d'un centre pour la connectivité en Afrique dans le but d'aider à combler le fossé numérique. Ce centre tablera sur l'expérience acquise par le Canada lors de projets ayant porté sur la connectivité en Afrique et adaptera l'expertise et les modèles canadiens en fonction des besoins des pays africains, surtout dans les domaines de l'éducation, de la santé et du développement communautaire. Le centre bénéficiera de l'appui du CRDI. La planification et la mise en oeuvre de cette initiative d'envergure se feront de concert avec la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique.

Ce nouveau centre sera « jumelé » à l'initiative de programme ACACIA du CRDI, qui depuis plusieurs années aide les communautés de l'Afrique subsaharienne à avoir accès aux technologies de l'information et de la communication (TIC).

Fort de l'expérience que les chercheurs et les responsables politiques ont acquise au cours des cinq dernières années dans l'exécution du Programme tanzanien d'interventions essentielles en santé (PIEST), le CRDI appuiera également la création en Afrique de l'Est d'une institution de recherche et de politiques vouée à la santé.

« Cette nouvelle institution donnera aux décideurs de la région, tant à l'échelle nationale que locale, l'accès aux résultats de la recherche établissant les besoins en santé des populations et les meilleures solutions pour répondre à ces besoins », a ajouté Maureen O'Neil, présidente du CRDI. L'idée sous-jacente au PIEST est d'améliorer la santé humaine non pas par des investissements massifs additionnels mais par des dépenses plus efficaces et dirigées opportunément vers les secteurs d'intervention où les besoins sont plus urgents.

Le Conseil des gouverneurs du CRDI a approuvé à l'unanimité cette initiative spéciale. Le CRDI consacre près de la moitié de son programme d'aide à la recherche en Afrique, ce qui représente en 2002 un investissement de près de 60 millions $ dans les projets mis en oeuvre.

LE CRDI ET L'UNF S'ALLIENT POUR AMÉLIORER LA SANTÉ DES POPULATIONS PAUVRES ET CELLE DE LEUR ENVIRONNEMENT

Le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) s'associe à la Fondation des Nations Unies afin d'injecter 750 000 $US dans la recherche sur les enjeux reliant la santé des populations et les écosystèmes dans les pays en développement. « Ce nouveau partenariat avec la Fondation des Nations Unies, une première pour le CRDI, donnera la chance à plusieurs régions pauvres du globe de renforcer, grâce à des activités concrètes, leurs capacités de faire de la recherche dans ce domaine relativement nouveau », a expliqué Jean Lebel, chef de l'équipe Écosystèmes et santé humaine au CRDI.

Les fonds permettront aux pays du Sud de relever de nombreux défis dans le domaine de la santé et de l'environnement. Ils formeront des noyaux d'experts locaux capables de trouver des solutions adaptées à leur contexte afin que les résultats se traduisent en politiques pour le bénéfice des populations et de leur environnement. Les régions visées comprennent l'Afrique de l'Ouest et du Nord, le Moyen-Orient, l'Amérique centrale et les Caraïbes. Les experts formés pourront également partager leurs expériences grâce au réseau qu'ils constitueront.

« Voilà la raison d'être de la Fondation des Nations Unies : créer des partenariats entre le secteur public et le secteur privé afin d'appuyer des programmes de santé globale novateurs comme celui-ci », a déclaré Timothy E. Wirth, président de la Fondation des Nations Unies.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la piètre qualité de l'environnement dans les pays du Sud est directement responsable de près du quart des maladies qu'on pourrait prévenir facilement, dont les infections respiratoires, le paludisme et la diarrhée. Les enfants, l'un des groupes les plus vulnérables aux conditions environnementales dégradées, sont les plus affectés : en effet, 66% des enfants sont victimes de maladies causées par un environnement insalubre.

«Les activités de recherche qui seront développées grâce à ces fonds pourront bénéficier de l'appui technique de l'Organisation mondiale de la santé et du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et feront l'objet de présentations lors du Forum international sur les écosystèmes et la santé humaine qui se déroulera à Montréal en 2003 », a précisé Jean Lebel.

L'écosanté permet aujourd'hui de réunir les approches biomédicales et environnementales. Elle considère la santé humaine de manière plus globale en tenant compte des interactions entre l'être humain et son environnement. « On reconnaît maintenant que l'être humain et son environnement sont indissociables, explique Jean Lebel. L'un et l'autre s'influencent et leur santé peut en souffrir. »

La Fondation des Nations Unies a été établie en 1998 afin d'administrer un fonds d'un milliard $US, don sans précédent de l'homme d'affaires et philanthrope R. E. Turner pour soutenir des causes humanitaires.

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