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Analyse : Ô Canada… Chine mon amour !

Le discours du budget du 19 avril 2021, premier présenté par une personne titulaire du ministère des Finances du Canada née – et encore – femme marquera certes l’histoire; aussi pour avoir été espacé de quelque 500 jours, nous étions donc en 2019, du précédent. Saine démocratie et pandémie rimant ainsi avec des conséquences contradictoires…

Le discours-dialogue du 13 avril 2021, deuxième passage de l’ambassadeur S.E. Peiwu Cong comme représentant officiel de la République populaire de Chine au Canada à la prestigieuse tribune du Conseil des relations internationales de Montréal, alors que le précédent, organisé à la suite de sa prise de fonction à Ottawa en 2019, avait été uniquement un discours de 40 minutes devant les membres du CORIM, marquera lui aussi l’histoire. Ici, celle laborieuse de l’histoire des relations officielles Canada-Chine depuis l’amorce de l’affaire de la demande d’extradition aux USA de Madame Meng Wanzhou, dirigeante de l’entreprise Huawei. Élevée au niveau de crise politique, car rapidement téléscopée par l’affaire dites des « deux Michael », Michael Kovrig et Michael Spavor, ceux-ci, en cellule de prison en Chine et tout récemment en processus de jugement, également.

La ministre Chrystia Freeland discourait sachant assurément que son pays vient de se mériter la place d’honneur, le tout premier rang, du 6e classement annuel des « meilleurs pays »* du US News & World Report de la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie. Ce, en y détrônant pour 2021 la Suisse, parmi 78 pays étudiés (nombre considérable, mais moins tout de même que la moitié des 193 pays membres reconnus aux Nations Unies). Un honneur, ici, qui ravivera certainement de bons souvenirs à Jean Chrétien et ravira bien d’autres canadiens, mais aucunement les vis-à-vis à l’autre bout du monde, à la barre du gouvernement à Beijing particulièrement. Car on n’y a pas là une commune vision de ce que sont les « meilleurs pays ».

L‘ambassadeur Cong n’avait probablement pas en main, ni en tête, les résultats dudit vaste sondage* aux résultats publiés le 13 avril 2021, soit le jour même de son « dialogue » organisé avec le CORIM**. Et avec une petite semaine de recul, notre compréhension de ce qui fut finalement un duel Cong-Johnson reste la même, c’est-à-dire le constat d’un triste dialogue de sourd, le souvenir d’un mélange de facile langue de bois et de difficile choc de culture.

C’était pourtant après avoir bien souligné que ce fut à la demande de l’Ambassade de Chine que le CORIM décida de donner à nouveau sa tribune à l’ambassadeur Cong, non sans bien faire comprendre que cette fois il ne s’agirait pas d’un simple discours unidirectionnel, mais bel et bien aussi d’un dialogue, encore en minutes bien comptées, mais déclinées en cinq pour le discours d’ouverture avec ensuite, pour l’essentiel, un questions-réponses, que Pierre Marc Johnson, actuellement président en exercice du conseil du CORIM agissant comme animateur de l’événement, croyait bien pouvoir mener plus à sa guise ce midi-visioconférence sur la thématique « Relations Chine-Canada : quelle voie suivre ? ».

CHOC DE CULTURE, CHOC DE SYSTÈME

Idéalisant peut-être au début la grande interview – les deux premières questions sur le thème de l’économie auguraient bien – il aura dû, au final, se résigner à un inconfortable dialogue de sourd; « exchange of views » ont été les mots de l’hôte pour officiellement remercier son invité à 12h52.

Avec le regard d’Occident – et j’en suis de naissance, sans devoir m’en excuser, pas plus que M. Johnson aussi – oui, qu’il était pénible de voir un homme d’expérience comme lui, ex-premier ministre du Québec et avocat brillant négociateur, se faire rouler dans la farine et se buter à des répliques savamment prêtes, pour chaque question soumise à S.E. Peiwu Cong, lui un parfait homme du régime à Beijing. Un ambassadeur qui en est à sa première assignation en titre par son gouvernement, bien que l’on doit lui reconnaître une expérience avérée pour son territoire d’assignation, puisqu’il a déjà été en poste à Ottawa préalablement et fut directeur de la direction Amérique du Nord et Océanie de son ministère à Beijing.

Monsieur Johnson faisait face à un diplomate parfaitement rompu à sa tâche et digne de la commande de son gouvernement.

Il fallait entendre l’ambassadeur habilement remplir un bon huit minutes en mot d’ouverture, rappelant un Parti communiste chinois fier de fêter, en 2021, son centenaire et qui n’est pas arrivé dans l’histoire de cette Chine millénaire pour rien. Les mots de Peiwu Cong tenant à rappeler des temps difficiles : les guerres de l’opium, les occupations imposées européennes du XIXe siècle, la longue guerre contre le Japon des années 1930 jusqu’à la fin de la seconde Grande Guerre mondiale en 1945 puis la prise du pouvoir par le PCC, en 1949, avec le Grand timonier Mao à sa tête.

Le PCC, fêtant son centenaire 1921-2021 cette année, n’a-t-il pas « réussi les deux miracles de la stabilité politique et de la croissance économique »? Le mot « miracle » prononcé par un ambassadeur de la République populaire de Chine en 2021 n’a évidemment pas le même sens, ni la même profondeur, que ce que les oreilles d’une Canadienne ou d’un Canadien, d’un océan à l’autre… à l’autre, a en tête.

S’il reste un fait incontestable que la stabilité et la croissance qualifient de toute évidence la gouvernance de la Chine ces trois dernières décennies, la vraie réponse que toute l’humanité veut avoir c’est à quels coûts? Même si tout risque de « misconception » et « misjudgment » doit rester à l’esprit.

Chine-Canada, pays continental l’un comme l’autre, tout en étant aussi géopolitiquement lié à l’Océan mondial. L’ambassadeur Peiwu Cong a, ici aussi, tenu un langage imagé fort, soulignant que : « Vivant tous à l’ère de la globalisation, on ne peut pas retourner l’eau de l’Océan dans un lac isolé. »

Et c’est alors qu’il était lancé sur la partie économique du questions-réponses qu’il aura eu cette bonne nouvelle, exposant que son pays offre de plus en plus d’opportunités: « Not only Starbucks, but they also can take Tim Hortons… It’s a good news ».

DEUX FACES D’UNE MÊME MÉDAILLE?

Quand il y a quelque 1,4 milliard de bouches à nourrir, rien n’est simple. Mais la main tendue pour dialoguer du CORIM, en trois questions successives sur les affaires de règle de droit et d’interprétation en ces complexes matières (droit à un avocat pour les deux Michael, droits des hongkongais, droits et libertés des Ouïghours) montra les limites de l’exercice.

Quand tu invites plusieurs de tes amis du coin à venir te dire bonjour (ici des collègues ambassadeurs d’Arménie, d’Indonésie, de la Malaisie et d’Azerbaïdjan, ayant été invités à visiter le Xinjiang il y a une dizaine de jours à peine, a-t-il expliqué, sont ceux que l’ambassadeur a choisi spécifiquement de nommer dans sa réponse, en plus d’inviter tous les touristes du monde à venir visiter cette région autonome du nord-ouest de la Chine), il ne faut habituellement pas s’attendre à ce qu’ils crachent dans la soupe.

Non, la zoom-diplomatie ne livre pas la marchandise. Elle semble, à l’expérience, même pire que celle du dialogue téléphonique, côté rendement. Le « dialogue » tenté par le CORIM le 13 avril 2021 fut malheureusement un moyen de dialogue totalement froid, distant, presque irréel et irritant. Bref, inadéquat, trop potentiellement contre-productif, voire dangereux. Zoom-diplomatie, politique de la main tendue et gestuelle de la franche poignée de main ne riment pas du tout.

Si, depuis que la Chine est membre de l’Organisation mondiale du commerce (elle y a adhéré en 2001), l’Occident espère qu’elle s’ajustera et jouera selon toutes les règles du jeu, reste que nous sommes devant deux conceptions du monde, deux civilisations de culture devant continuer à apprendre le « vivre ensemble ».

Prochain des plus grands rendez-vous pour la Chine et le Canada, tout comme pour les USA et toute l’humanité et les gouvernements du monde: Glasgow, importante ville portuaire d’Écosse, qui sera l’hôtesse, du 1er au 12 novembre 2021, de la COP-26 ayant défi de faire appliquer l’Accord de Paris sur le climat, voire mieux si possible.

Et ici, n’oubliez pas d’écouter sur BBC-Sounds (autour des 18-20e minutes) le bout de reportage du collègue journaliste Alok Jha sur l’enjeu mondial de l’eau qui prend soin de rappeler ce que la Chine planifie avec les grands fleuves coulant sur son territoire pour sauver son monde. Qui a dit qu’il était facile de nourrir 1,4 milliard d’humains ?

Pour le sondage US News & World Report, sachez enfin que 68% des répondants y affirmèrent qu’un pays dirigé par une femme tend à être mieux géré. (De la très belle musique aux oreilles de la ministre canadienne Freeland!) Mais, qu’ils furent aussi 39% à croire que les gouvernements ont créé la pandémie actuelle de la COVID-19 « dans le but de contrôler leurs citoyens ». Preuve, s’il en faut encore, qu’il n’est pas aisé de gouverner le monde en cette décennie des années 2020.

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* Vaste sondage aux résultats publiés le 13 avril 2021 ayant impliqué 17 000 répondants recrutés parmi les dirigeants d’entreprises, les personnes de classe moyenne à élevée ayant un diplôme postsecondaire et des citoyens dits représentatifs de leur pays, ayant dû accorder une notre globale envers la qualité de vie et l’atteinte des buts à caractère social.

** Hydro Québec, SNC-Lavalin, Bombardier, Power Corporation du Canada, Canadien National et Mansfield étaient les partenaires de cette activité du CORIM.

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Canada inc : pas un long fleuve tranquille

Le Canada inc, coeur de l’économie canadienne, n’est pas un long fleuve tranquille. Aux premières apparences, bien que les cinq entreprises dominantes ne changent pas de rang cette année en comparaison avec 2015 (RBC, TD, Bell, Scotiabank et Bank of Montreal) et donc que des banques (5) et des sociétés en communication (3) dominent outrageusement le sommet du Top 10, comptant aussi TELUSCIBC et Rogers, que complètent en diversifiant enfin la liste Tim Hortons 9e avec McCain Foods 10e, c’est ensuite que les surprises méritent l’attention, et à plusieurs reprises, avant de terminer le Top 20, dans toutes les informations que l’on trouve avec le récent BrandDirectory que Brand Finance vient de faire paraître.

Remarquons ainsi que :

  • Tim Hortons passe de la 18e à la 9e place malgré une perte de 30% de la valeur de sa marque (3,968 millions $US contre 6,358 en 2015)
  • Desjardins   de la 22e à la 13e
  • CNRL           de la 23e à la 14e
  • Circle K        de la 26e à la 15e
  • Valeant        de la 24e à la 16e

Les pétrolières Enbridge (17e) et Suncor Energy (18e) y subsistent, en perdant sans surprise leur 9e et 14e place, alors que les Brookfield 11e et CN 12e bougent à peine et que deux gros noms du secteur financier ferment ce Top 20 en progression sur l’année précédente : Manulife Financial passant de la 19e à la 11e place et Sun Life Financial de la 21e à la 20e.

L’image des plus importantes entreprises canadiennes a donc changé de nom pour 5 de ses 20 premiers joueurs, en l’espace d’une seule année.

5 exclues au Top 20 du Canada inc.

  • National Bank of Canada :   20e à 22e
  • Bombardier :                           16e à 23e
  • Loblaws :                                  17e à 24e
  • Shaw :                                        12e à 27e
  • Canadian Tire :                       19e à 29e

Notons aussi l’important recule de Magna, qui passe de la 28e à la 38e place de ce classement.

5 meilleures croissances du Canada inc.

Au-delà du mouvement au sein du Top 20, il y a aussi des entreprises qui se démarquent avec un bond de plus de 20 rangs en seulement une seule année; ce dans des secteurs très différents.

Dans la liste des 100 entreprises prisent en compte par Brand Finance, parmi les cinq plus grandes croissances relatives de la valeur de leur marque en 2016 par rapport à 2015, trois ont d’ailleurs leur siège social au Québec dans la région de Montréal :

  • Air Canada ayant gagné 22 rangs en passant de la 56e place à la 34e
  • Metro ayant aussi gagné 22 rangs en passant de la 58e place à la 36e
  • Couche-Tard ayant gagné 16 rangs en passant de la 63e place à la 47e
  • Imperial Oil/Esso gagnant 21 rangs de la 53e place à la 32e
  • D+H gagnant 25 rangs de la 91e place à la 66e

Non, si vous pensez économie canadienne, ce n’est pas l’histoire d’un long fleuve tranquille.

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Source : brandirectory.com/canada-100-2016

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