Archives de catégorie : Économie internationale

L’affaire de 65 billions de $

Il est intéressant de se rappeler que le Phileas Fogg de Jules Verne a pu faire Le Tour du monde en quatre-vingts jours sans difficulté de passeport ou devoir demander des visas de voyage. De fait, avant la 1er Guerre mondiale, peu de pays émettaient des passeports – la Russie et l’Empire ottoman le faisaient – et ils étaient d’ailleurs considérés comme « peu civilisés ». Ce que l’air du temps disait alors, c’était que grâce au train l’avenir apporterait même la disparition du concept de la frontière, cette ligne tracée sur une carte géographique.

Mais la communauté internationale signa à Paris, en 1920, le premier accord sur l’usage des passeports. La 1er GM avait fait craindre l’espionnage et on voulu tenter de contrôler le passage desdits espions et autres indésirables d’un pays à l’autre.

L’humanité avait donc vécu jusque là sans véritables frontières comme limite au déplacement des gens. For de cette tradition, la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 reconnaîtra d’ailleurs le droit de chacun de pouvoir quitter son pays d’origine (malheureusement sans lui garantir le droit d’être accueilli par un autre…)

Toute cette question du droit de migration internationale constitue actuellement le plus gros enjeu de l’avenir des négociations en matière de libéralisation du commerce mondial. Tant que les robots n’auront pas terminé de gruger l’avantage que peut encore constituer la délocalisation pour profiter de plus bas salaires ailleurs, à cause des frontières entre les pays, des millions de gens sont empêchés d’offrir leur force de travail à des endroits qui seraient à leur avantage.

Juste sur le critère économique, les frontières sont conséquemment la plus grande cause de discrimination de toute l’histoire humaine. Pensons qu’en pleine mondialisation, le monde d’aujourd’hui ne se compose pourtant que d’un population dont seulement 3% vit ailleurs que dans le pays de sa naissance.

COMBIEN DE GENS VEULENT MIGRER DANS LE MONDE?

Le droit à l’immigration appliqué mondialement ne voudrait pas dire que des gens changeraient automatiquement de pays. Il y a bien d’autres critères à prendre en considération. Mais il n’est pas difficile de penser que l’ouverture généralisée des frontières provoquerait d’importants mouvements de populations partout dans le monde. Ces années-ci, juste en terme de réfugiés, on parle en dizaines de millions annuellement.

Une important maison de sondage a fait la démarche de tenter d’évaluer combien de personnes dans le monde veulent changer de pays. Gallup a révélé que mondialement 700 millions de personnes « préféreraient » s’installer dans un autre pays en permanence. Bref, autour de 10% de la population de la planète.

Voilà pour cette aspect de la problématique : il y a une demande. Soulignons ici, sans besoin d’autres analyses, que dans son sondage Gallup utilise le mot « préféreraient »; on doit donc considérer que la marge entre cette intention et le fait éventuellement avéré laisserait place à des écarts significatifs.

Oui, il y a beaucoup de gens dans le monde voulant changer de pays pour améliorer leur vie. Mais que cela changerait-il? Savons-nous le mesurer?

Encore une fois, une étude a tenté de documenter le sujet. D’après Lant Pritchett, économiste de l’Université de Harvard, ouvrir les portes au travail à travers le monde boosterait la richesse de 65 000 000 000 000 $, ou 65 billions $.

Et si nous avons écrit au début de cet article que l’immigration constitue actuellement le plus gros enjeu de l’avenir des négociations en matière de libéralisation du commerce mondial, c’est parce qu’une publication du FMI de 2010 (celle des chercheurs Caselli et Feyrer) concluait que l’abandon des dernières restrictions au capital sur l’ensemble planétaire libérerait 65 milliards de $.

Comparativement, 65 milliards, c’est 1 000 fois moins que les 65 billions de Lant Pritchett.

Ouvrir les portes au travail à travers le monde pour augmenter la richesse sur cette planète? Et surtout aider à réduire les écarts et à mieux la distribuer. Vivement.

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Sommet Trump-Poutine : les non-dits d’Helsinki

La poussière est encore à retomber suite à l’historique premier sommet politique entre les présidents des États-Unis et de la Russie, Donald Trump et Vladimir Poutine. Toute la journée de ce Sommet Trump-Poutine, tenu à Helsinki le 16 juillet 2018, l’expectative des résultats alimentait les discussions. Mais dans ce genre de rendez-vous, c’est beaucoup dans les non-dits qu’il faut aussi rechercher les meilleures analyses et les legs possibles. Ce cas-ci ne fait pas exception.

Réglons immédiatement ce qui malheureusement monopolise la majorité des médias : l’accusation d’ingérence russe dans la dernière campagne électorale présidentielle des USA. En réalité, les services de renseignement étatsuniens faisaient un beau cadeau à leur président en dévoilant quelques jours avant son rendez-vous les fruits de leur enquête sur la question. Ils lui donnaient une carte à jouer face à son adversaire. Et le timing excluait toute occultation du sujet; on se devait de confronter la question.

Le président Trump a décidé d’en faire un cadeau à son vis-à-vis. Il lui a fait savoir que sa décision était de vouloir le croire alors qu’il dit et redit « qu’il n’y a pas eu d’ingérence russe ». Message envoyé: fin de l’histoire, passons à autre chose.

Ce que le président Trump a fait, ou tenté de faire, c’est de passer l’éponge. Il a décidé de ne pas crisper la Russie avec cette bien triste affaire. Une polémique qui traîne depuis presque deux ans maintenant. Et c’était diplomatiquement parlant la meilleure décision à prendre. Toutes les autres options contribuaient à empoisonner l’avenir de la relation WashingtonMoscou. Or les deux hommes se rencontraient justement pour tenter de l’assainir.

Et connaissant le personnage, c’est un beau cadeau que M. Trump a fait à M. Poutine. Son style laissait plutôt supposer qu’il s’amuserait à encore instrumentaliser la polémique et à jouer de boutades pour la faire rebondir et perdurer dans le flou. Trump a plutôt tenté de mettre tout son poids pour libérer Poutine d’une grave hypothèque d’image. Il espère maintenant en retirer un retour. Ce n’est certes pas ce qu’il a dit. C’est pourtant ce qu’il faut entendre… et attendre. Même 24 heures plus tard!

Et en très bon politique qu’il est, c’est sans doute ce que Vladimir Poutine attendait, lui. Message reçu! Il en doit une à Trump… ainsi va la diplomatie internationale.

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On l’a vu, ce ne sont pas les sujets internationaux lourds qui manquent pour alimenter la négociation entre les deux hommes d’États. Le contenu de leur rencontre d’Helsinki témoigne à lui seul de l’évidence que ce n’est pas qu’avec le bilan immédiat de cette journée de rencontres qu’il faut savoir juger de l’utilité de l’événement. Ce n’est que la pointe de l’iceberg d’un complexe et long processus.

Et c’est ici que le jeu de lire les non-dits s’impose particulièrement devant le devoir d’analyse.

Enjeux nucléaires civil et militaire en Iran, état de guerre en Syrie, lutte globale au terrorisme, Ukraine incluant la Crimée, IsraëlPalestine… sont tous des sujets dits.

DEUX NON-DITS

Donald Trump fut un homme d’affaires avant de passer à la politique. Et il a toujours le réflexe de vouloir brasser des affaires. Avec la Russie, il savait qu’il avait devant lui un joueur majeur en matière énergétique.

Le premier non-dit de substance de ce sommet concerne ce sujet. Non pas dans son aspect européen de la chose – l’Allemagne fut bien sermonnée à Bruxelles quelques jours avant – mais dans la perspective de Tokyo.

Avec les riches gisements de gaz et de pétrole de Kovytka, au nord-ouest du lac Baïkal en Sibérie, et leur sortie par la baie de Kozmino, sur la côte russe de la mer du Japon (ville de Nakhodka, à l’est de Vladivostok), grâce à la construction de l’oléoduc Sibérie-Pacifique*, Moscou a tenté sans succès de régler son différend frontalier avec le Japon concernant les îles Kouriles. Il ne faut jamais oublier qu’aucun traité de paix n’a encore été conclu entre le Japon et l’URSS – la Russie – suite au conflit mondial de 1939-45. Intraitable, Tokyo demande le retour complet des quatre îles de son extrême nord (c’est par le Traité de Shinoda de 1855 que la frontière passe au-dessus de Eterofu (ou Iturup), Kurashiri, Skikotan et du petit archipel des îlots Habomaïs) occupées opportunément parce que Staline ordonna à l’Armée Rouge, après la capitulation du Japon, de s’y rendre.

Dès la planification du projet de l’oléoduc Sibérie-Pacifique, devant la situation demanderesse du Japon en matière énergétique, Moscou tenta en même temps d’amadouer Tokyo, mais sans succès. Si le Japon a fait exception à sa position globale de négociation, parce qu’il a finalement accepté de participer au financement de l’oléoduc pour pouvoir s’alimenter en énergie**, il refusa autant tout compromis sur la question d’un éventuel traité de paix et demeure tiède à Moscou pour le reste de ses relations.

Tokyo refuse de mêler les deux sujets.

Mais si Moscou n’arrive pas à faire fléchir Tokyo, Washington le peut davantage.

Or, Donald Trump vient de tenter un grand coup avec la carte de la paix en Asie via la Corée du Nord. Il pourrait très bien rêver de jouer le doublé : en plus du souhaité et de plus en plus probable traité de paix Corée du Sud Corée du Nord, encourager le depuis longtemps aussi souhaité traité de paix JaponRussie. Et ainsi dégager complètement l’Asie de l’Est des stigmates de la seconde GGM en matière de frontières internationales.

La Corée du Nord est d’ailleurs le second non-dit de substance que nous souhaitons ici relever.

Dans sa quête de redonner à son pays le lustre de puissance que son passé impérial permettait, le président Poutine regarde stratégiquement vers l’Asie depuis certainement 2004. Et une partie de la politique coréenne de Vladimir Poutine apporte une pièce surprenante à l’équation. Parce que pendant plusieurs années il s’est obstiné à porter un projet (pourtant jugé « désespéré ») parce qu’il donnait un contenu à la prétention russe de jouer le rôle de pont entre Europe et Asie.

Ledit projet ? C’était de relier les deux grands réseaux ferroviaires transsibérien et transcoréen, en passant non pas par la Chine, mais par l’Extrême-Orient russe pour aboutir au port de Pusan, tout au sud de la péninsule coréenne. Tout un programme !

Or, il lui fallait, pour espérer réussir ce grand coup, en plus de la collaboration directe des deux Corée, l’apport financier du Japon (soient les deux facteurs qui consacrèrent alors le jugement « désespéré » de ce projet… et pour cause!)

Mais cette lecture juste du projet, le condamnant à une utopie, jusqu’à tout récemment, d’un appelons-le train TransEuroAsie de la Paix, l’est-elle encore tout autant en juillet 2018 ?

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« (…) le business de la Russie, c’est le business! En contraste radical avec le passé soviétique, la Russie post-impériale figure parmi les pays les moins idéologiques du monde », analysait déjà en 2007 Dimitri Trenin, un des meilleurs connaisseurs occidentaux de la Russie contemporaine aux yeux d’Hélène Carrère d’Encausse.

Dès sa première arrivée au pouvoir – initialement à titre de premier ministre choisi par Boris Eltsine fin 1999 et comme président avec l’élection de mars 2000 – Vladimir Poutine exposa clairement ce que devait être son pays : puissant, parce que respecté et tenu pour un égal par les autres grands États et participant à toutes les décisions internationales; indépendant, parce que libre de ses décisions fondées sur sa tradition et ses valeurs propres.

Littéralement en faillite en 1992-93 puis à genoux devant le FMI, le chemin de la Russie vers la prospérité fut long. Eh que oui, elle dit merci à ses salvatrices richesses en gaz et pétrole. Long chemin donc, tout comme sa reconquête de puissance.

La Russie, humiliée à bout dans l’affaire de la reconnaissance du Kosovo, ira même jusqu’à instrumentaliser une courte guerre avec la minuscule Georgie, du 7 au 12 août 2008, pour se faire comprendre et respecter, particulièrement par l’OTAN. Président tournant de l’Union Européenne, ce fut alors le français Nicolas Sarkozy qui dut s’activer pour négocier le cessez-le-feu et écouter Medvedev lui expliquer le fond des choses, vue de Moscou.

Avant que l’OTAN ne revienne encore la hanter, cette fois via l’Ukraine, ce pays-frère par ailleurs pour lequel Poutine a très mal jouer ses cartes contrairement à la Georgie, la Russie cependant n’a pas attendu les extrêmes (rappelons ici que le contrat de location de 20 ans de sa stratégique base navale de Sevastopol y tombait à échéance avec 2017) et a « récupéré » en 2014 la Crimée. Ce cadeau de Khrouchtchev fait en son contexte en 1954 qui était devenu intolérable avec les années 2010… Occupation, référendum, annexion et même connexion terrestre, car le président Poutine y a fait travailler des milliers d’ouvriers, sans aucune interruption, pendant plus de 800 jours, pour construire un double pont (route-chemin de fer) de presque vingt kilomètres pour mieux relier la Crimée avec toute la Russie. Il l’a inauguré le 15 mai 2018 et c’est devenu le plus long pont en Europe.

Certes, il est très mal vu en société de reprendre un cadeau donné, mais la Russie se sent maintenant puissante et indépendante. Puis on n’efface pas quelque cinq siècles de réflexe impérial comme ça! Parce que toute l’histoire de la grande Russie c’est bien plus que les sept décennies de l’Union soviétique (1917-1991).

La Russie de Poutine assume incidemment des sanctions de l’Occident depuis son coup en Crimée. Les sommets du G8 repassèrent à G7 l’année même; une année 2014 lors de laquelle la Russie devait même être l’hôtesse du sommet (qui se tint finalement à Bruxelles au beau profit de l’UE).

M. Poutine peut maintenant dire merci à Donald Trump juste pour l’avoir mis ainsi au sommet à Helsinki le 16 juillet 2018. Par ailleurs, le geste témoigne pareillement du non-dit que la vision de Trump de la gouvernance mondiale n’est pas unipolaire, ce qui est une bonne nouvelle pour l’humanité.

Un témoignage aussi que si l’actuel président des États-Unis d’Amérique dit haut et fort America first!, il ne dit pas America alone… Et ça, bien qu’il veuille rebrasser les cartes partout sur son parcours depuis son élection.

Finalement, c’est seulement le temps qui dira sur tous les non-dits d’Helsinki.

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* Le premier tronçon de l’oléoduc Sibérie-Pacifique, long de 2 694 km et inauguré en décembre 2009 (relié opérationnellement début 2011 par un branchement de 930 kilomètres aux raffineries de la ville de Daqing, dans le nord-est de la Chine) compte maintenant un second tronçon de plus de 2 000 km entre Skovorodino et la baie de Kozmino sur la côte russe de la mer du Japon, en service depuis fin 2012. En anglais : ESPO pour Eastern Siberia – Pacific Ocean pipeline system.

** Les exportations russes (crude oil) du terminal Kozmino pour 2016 furent de 31,8 millions de tonnes, en hausse de 4.6%. Pour 2016 toujours, ce pétrole fut exporté ainsi : Chine (69.8%), Japon (12.3%), Corée du Sud (7.5%), Malaysia (5%), Singapore (1.9%), Thailand (1.3%), USA (1%), Philippines et Nouvelle Zélande (0.6%).

Lire notre autre article sur le possible, voire probable G8 de 2020.

Lire aussi :

www.bepax.org/files/files/2011-analyse-dernier-heritage-de-la-guerre-froide-le-conflit-irredentiste-sur-l-archipel-des-iles-kouriles.pdf

http://geopolis.francetvinfo.fr/conflit-des-iles-kouriles-la-russie-et-le-japon-trouvent-une-issue-economique

www.lejournalinternational.fr/Iles-Kouriles-a-l-est-aussi-la-Russie-montre-les-crocs

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Un G7 plutôt moyen

C’est finalement le meilleur adjectif pour qualifier le bilan du G7 à présidence canadienne de 2018 : moyen-moyenne.

Moyenne, tout d’abord comme classe moyenne : parce qu’il faut retenir que c’est un des messages de base du premier ministre Justin Trudeau, président du G7 de 2018, soit celui de viser à rehausser la classe moyenne dans l’ensemble des pays du G7.

« (…) Nous devons veiller à ce que la croissance profite au plus grand nombre, de manière à ce que chacun puisse tirer profit du travail accomplit et bénéficier d’une meilleure qualité de vie. Au Canada, nous réalisons des progrès constants vers l’atteinte de cet objectif grâce à des mesures visant à renforcer et faire croître la classe moyenne, ainsi qu’à aider concrètement les gens qui travaillent fort pour en faire partie.
Dans le cadre de notre présidence du G7 en 2018, le Canada propose, au centre du programme de cette année, le défi de réaliser une croissance qui profite à tous », signait Justin Trudeau dans l’introduction d’un document de 23 pages titrant RÉALISER UNE CROISSANCE QUI PROFITE À TOUT LE MONDE.

Le Canada avait donc préparé ce rapport d’une vingtaine de pages, avec nombre de graphiques, pour mettre en évidence ce défi commun, avec des propositions de moyens pour collaborer et pour le relever. « La réussite des principales économies du monde au cours des cinquante dernières années est en grande partie attribuable aux efforts d’une classe moyenne vaste et en plein essor (…) », analyse ensuite le corps du document, qui vise le double défi de l’inégalité et de la croissance.

Or, le tableau des trois dernières décennies à cet égard est celui d’un décrochage, suivi d’un changement de donne… avec une véritable mise au plancher de la classe moyenne.

TABLEAU 1
Élargissement des écarts de revenu des ménages des pays du G7 globalement sur trois décennies (1985-2014)

Comme l’image bien le Tableau 1, si entre 1985 et 1990 l’élargissement des écarts de revenu est presque nul et sans signification, la tendance à l’élargissement devient évidente entre 1990 et 1995, pour passer pendant la décennie 1995-2005 en mode constant. En fait, il faudra la crise financière mondiale de 2007-08 pour stopper le processus de cet élargissement continuel des écarts de revenu au sein de l’ensemble des pays du G7.

La bonne nouvelle, c’est que depuis 2008, donc pour la période 2008-2014, la tendance des écarts entre les ménages à faible revenu, à revenu moyen et à revenu élevé est restée stable.

Au cours des 30 dernières années, il faut tout de même globalement retenir pour l’ensemble des pays du G7, qu’alors que les 10% des gens touchant les salaires les plus élevés ont vu leurs revenus augmenter de 40% en moyenne, les revenus des 40% des gens touchant les salaires les plus bas ont augmenté de moins de la moitié de ce taux : un retard, d’ailleurs, tout à fait dans la même tendance que pour l’ensemble de la classe moyenne, les 40 à 90% des gens touchant un revenu moyen.

Bref, sur 30 ans, les plus riches ont décroché seuls vers le haut, alors que la classe moyenne a eu, elle, tendance à toujours s’éloigner davantage du partage de cette création de richesse. Le G7 a donc vu sa classe moyenne se tasser vers l’appauvrissement relatif.

Mais le constat est aussi que les pays du G7 ne maîtrisent pas collectivement la solution à ce défi : lorsque l’on tient compte de paramètres autres que le revenu, les pays du G7 « peinent » carrément à faire en sorte que la prospérité soit largement partagée.

« Dans l’édition 2018 de l’indice du développement inclusif du Forum économique mondial, qui est une évaluation annuelle du rendement de 103 pays relativement à onze dimensions du progrès économique en plus du PIB, aucune économie du G7 ne figure dans les 10 premiers rangs, malgré notre relative vigueur économique », relève le rapport (p. 8).

Les pays du G7 ne sont donc pas les leaders qui montrent la meilleure direction.

C’est peut être pour cette raison que leur président pour 2018 a osé! Justin Trudeau n’a pas eu peur, dans ledit rapport, d’y inclure cette statistique « renversante » sur les inégalités dans l’ensemble du monde :

« En 2017, 42 personnes possédaient une richesse égale à celle des 3,7 milliards de personnes formant la moitié la plus pauvre de la population mondiale. » (p. 8)

Moyens que propose le rapport canadien :

  • Voir à aider les travailleurs à s’adapter au monde du travail.
  • Réaliser une croissance solide en investissant d’abord dans les gens.
  • Veiller à ce que chacun paie sa juste part en luttant contre les évitements et évasions fiscaux partout.
  • Mieux mesurer la croissance profitable pour tous.

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Moyen, ensuite, pour l’ampleur et le nombre des décisions prises à ce G7 de 2018.

Les journalistes avaient plutôt tendance à trouver le temps plus long que la moyenne au Centre des médias de ce G7, car les points de presse ne s’y bousculaient pas.

Un point de presse pour l’annonce de l’engagement – clairement ici sous le leadership actif de l’institution états-unienne en la matière – d’un groupe d’IFI à viser la constitution d’ici deux ans d’un fonds de 3 G$ dédié à l’entreprenariat féminin dans le monde.

Un point de presse pour l’annonce des 3,8 milliards $ qui seront consacrés à l’éducation des femmes et des jeunes filles dans les situations les plus pénibles à travers le monde.

Et ce n’est ensuite que la conférence de presse de clôture du premier ministre Trudeau qui a confirmé l’adoption d’une position sur les océans (Plan d’action de Charlevoix pour la santé des océans et des mers et des communautés côtières résilientes) avec notamment, en annexe, sa Charte sur les plastiques dans les océans, à portée finalement moyenne, car n’engageant que les dirigeantes et dirigeants du Canada, de la France, de l’Allemagne, de l’Italie, du Royaume-Uni et de l’Union européenne… Les États-Unis et le Japon se sont ici abstenus. M. Trudeau confirmant alors « fièrement » une « Déclaration commune du G7 » alors « avec l’assentiment de tous ».

Mais on sait maintenant que la moyenne au bâton en cette matière fut ensuite « twitement » recalée par le reniement de signature du président Trump, se détachant de ladite « Déclaration commune du G7 de 2018 », dans un fracassant Tweet surprise, envoyé de son avion en plein vol vers Singapour, juste après avoir quitté Charlevoix.

Donald Trump n’a pas aimé la moyenne des mots de Justin Trudeau à son égard pendant la conférence de presse de clôture de ce Sommet du G7. Il en a donc reviré son chapeau de bord.

Bien drôle de moyen, qui n’est certes pas dans la moyenne des G7 en matière de collaboration et de diplomatie entre pays alliés.

Mais l’affaire n’a pas encore fait perdre ses moyens à son hôte et Justin Trudeau a gardé depuis son calme. Il reste satisfait de son sommet. Déjà assuré d’avoir clairement bien défendu et espérant encore pouvoir « (…) renforcer la classe moyenne et favoriser une croissance généralisée (…) », comme il insistait encore dans la conclusion de son document de travail, déjà cité ci-haut !

Au final, un G7 moins que moyen ? Plus que moyen ? Jouons pour plutôt moyen. Ce que le temps, voire l’histoire, confirmera, ou pas !

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Bienvenue au « G8 » de 2020

Rien n’est anodin dans un ballet diplomatique de haut niveau tel qu’un Sommet du G7. Ainsi, la déclaration du président Donald Trump à l’égard de l’absence de la Russie à la table des participants de 2018 avec son souhait de revoir ce pays au sein du Groupe est importante. Dans le contexte actuel, c’est possiblement la manière Trump de faire savoir à ses collègues ce qu’il entend faire pour 2020. Alors bienvenue au « G8 » de 2020, quelque part aux USA.

TRUMP POURRA LE FAIRE

Le contexte, c’est que si pour 2019 c’est la France qui prend les rennes de la présidence du Groupe et qui organisera le prochain Sommet du G7, selon la routine de travaille des membres, viendra ensuite le tour des États-Unis. Et donc en 2020, alors qu’il sera à la dernière année de son actuel mandat présidentiel de quatre ans, Donald Trump pourra très bien prendre l’initiative d’accueillir à titre d’invité le président russe Vladimir Poutine.

« Oui, la marge de manœuvre du président qui organise un Sommet le permettrait », nous a confirmé le professeur John J. Kirton, directeur et fondateur du G7 Research Group de l’Université de Toronto, rencontré au Centre des médias le 8 juin, le jour même de la déclaration surprise du président Trump.

Si le consensus des 7 serait requis pour revoir participer la Russie comme membre du Groupe, et donc revenir du G7 à un G8, l’hôte Trump pourra, seul et devant lui-même, faire de la Russie SON invité et l’imposer à l’entourage des six autres participants. Un peu comme Justin Trudeau a fait à sa manière, en invitant 12 pays pour un sujet unique bien ciblé (la lutte aux déchets plastiques dans les océans), le président Trump aura aussi une marge d’initiative pour donner SA touche à son sommet, en 2020.

Le président Poutine ne pourrait ainsi probablement pas participer à toutes les séances de travail du G7 de 2020, mais il y pèserait certainement de sa seule présence et du fait de l’importance des discussions informelles en marge de la procédure et du déroulement de la réunion. On pourrait donc parler d’un « G8 » entre guillemet! Et reste aussi à voir que seront les thèmes et priorités que le président Trump, président hôte, voudra donner au Sommet de 2020. Ce qui pourrait encore jouer sur la pertinence et les possibilités de faire asseoir plus d’une fois Vladimir Poutine autour de la table.

BIENVENUE À BIARRITZ EN 2019

Quant à 2019, lors de sa conférence de presse, tenue à La Malbaie au sortir du G7 de 2018, le 9 juin, le président Macron de France a été clair sur cette question : « La Russie a été exclue par consensus du Groupe. Il y a eu les Accords de Minsk, suite à l’occupation russe de la Crimée, en Ukraine. Si la Russie respecte les Accords de Minsk, il me fera plaisir de l’accueillir en 2019 ».

En 2019, le Sommet se tiendra à Biarritz, « à la fin de l’été à une date encore à déterminer », a aussi annoncé le président Macron. Et il reste peu probable de voir Vladimir Poutine s’y pointer, pour réintégrer le Groupe des grandes puissances.

Mais pour 2020, les chances sont maintenant très grandes. Soulignons notamment que l’italien Conte avait affirmé, lui aussi sur Twitter, « être favorable » au retour de la Russie dans le groupe.

« Ils ont expulsé la Russie, ils devraient réintégrer la Russie. Parce que nous devrions avoir la Russie à la table de négociations », avait pour sa part dit le président Trump avant de quitter Washington le 8 juin au matin.

La pertinence d’avoir la Russie à cette table de négociations ne peut pas être niée fondamentalement par les autres membres du G7. Et la mise en punition de la Russie ne peut pas être éternelle. Washington et Rome semblent prêts à négocier.

La Russie, expulsée des Sommets en 2014 après avoir annexé la Crimée et avoir vu depuis les leaders du G7 lui imposer des sanctions à ce propos et rappelé, par ailleurs, à l’ordre Vladimir Poutine pour son soutien au régime de Bachar Al-Assad en Syrie, en a cependant beaucoup encore à se faire pardonner.

Très officiellement, les quatre pays européens présents au G7 de Charlevoix de 2018, soit la France, l’Italie, l’Allemagne et le Royaume Uni, sont tombés d’accord à la clôture du vendredi 9 juin pour « refuser » le retour dans le cénacle de la Russie. Emmanuel Macron, Giuseppe ConteAngela Merkel et Theresa May ont convenu que « (…) la position européenne n’est pas un retour de la Russie » tout en rappelant la « vigilance du G7 » face à Moscou et en évoquant « la possibilité d’établir un dialogue »… ce qui semble clairement une concession faite à Rome.

Et un début d’ouverture vers la vision de Donald Trump !

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G « green » 7 : 100 000 arbres plus tard !

Ce n’est certes pas la première des nouvelles qui est a ressortir du dernier Sommet du G7, tenu dans la région canadienne de Charlevoix, au Québec, les 8 et 9 juin 2018, mais le fait d’avoir voulu en faire un événement le plus carbo-neutre possible reste un legs qui mérite mention. Notamment dans la manière !

Déjà, le principal lieu utilisé dans la ville de Québec, le Centre des congrès, à titre de centre des médias, qui attendait les quelque 1 400 journalistes accrédités, est une organisation ayant les plus hauts standards internationaux en environnement. Mais le Canada voulait plus. Bien plus ! Déjà, à son arrivée, au Centre, le journaliste recevait un sac de presse fabriqué avec le recyclage du tissus des oriflammes ayant servi pendant l’année des manifestations du 150e anniversaire de la fondation du Canada, l’an dernier. Il y avait même un beau choix de couleurs ! Mais aucun papier imprimé à l’intérieur : tout le matériel des communiqués de presse et autres documentations de travail a été partagé uniquement sur Internet grâce à un site dédié APP avec mot de passe accordé au journaliste.

Il en fallait évidemment davantage pour organiser un tel méga événement afin de le conclure par un bilan carbo-neutre. Un mécanisme de compensation de l’empreinte environnemental devait être utilisé. Il n’est ici pas original en soi: on décida de planter des arbres. Mais c’est la manière et le volume qui sont intéressants. D’abord, il fallu évaluer la quantité à compenser. Et ce fut fait en amont. De sorte qu’il est déjà possible de confirmer que 100 000 arbres – oui 100 000 ! – auront été plantés pour compenser l’impact environnemental du Sommet du G7 de 2018. Ce, dans les 17 réserves de la biosphère qui existent déjà à travers le territoire du Canada. 100 000 arbres de plus, qui y pousseront pendant des années, des décennies.

En détail, un partenariat entre le Gouvernement du Canada et la Corporation de la Réserve de la biosphère de Charlevoix a été fondé avec un investissement de 325 000 $. L’objectif de planter 100 000 arbres afin de compenser les effets négatifs qu’aura sur l’environnement, principalement en raison des nombreux transports, le Sommet sera donc réalisé par étapes. La première vague de plantation a eu lieu au mois de mai 2018. Tout ce travail est dirigé par la biosphère de Charlevoix et la Réserve faunique de Charlevoix.

Le 22 avril 2015, l’Union des producteurs agricoles (UPA) du Québec et le Jour de la Terre Québec avaient fait équipe pour planter 100 000 arbres à temps pour les célébrations du 375e anniversaire de Montréal, en 2017, donc se donnant 2 ans pour concrétiser l’initiative.

Le G7 de 2018 aura-t-il été finalement carbo-neutre ? « En moyenne, 98 arbres captent et entreposent 1 tonne de gaz carbonique qui se trouve dans l’air chaque année », explique l’organisme Arbres en ligne.

Pendant une période de 80 ans, l’arbre canadien moyen absorbe 200 kg de gaz carbonique – plus de l’ozone, de l’oxyde nitreux, des particules et du dioxyde de souffre.

Chaque jour, un gros arbre fournit assez d’oxygène pour quatre personnes.

On nous a aussi dit que toutes les matières déposées dans les contenants de tri au Centre des congrès allaient ensuite être manuellement triées de nouveau, par des personnes attitrées, afin de maximiser l’opération… parce que « trop de gens se trompent de bac », malgré leur bonne volonté de trier à la source.

La présence en nombre de journalistes semble aussi avoir été inférieure aux prévisions des organisateurs, donc ici c’est un gain vers l’atteinte de la cible d’un sommet carbo-neutre.

Une vérification in situ au Centre des médias cherchait, par ailleurs, à sonder le comportement des acteurs du Sommet pendant son déroulement. Des préposés questionnaient les journalistes sur leur origine-destination et leur mode de transport. Ayant subi leur questionnaire, votre tout dévoué a reçu le maximum au pointage, ayant utilisé son vélo pour se rendre au Centre des médias le jeudi et le vendredi, et la marche le samedi.

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Source de l’image: arboplus.ca/fr/arbre-laval-plantation-arbre-laval-planter-un-arbre.html

Lire aussi :

usbeketrica.com/article/planter-100-000-arbres-en-un-jour-pour-reboiser-les-mangroves
www.arbresenligne.com/information/gaz-a-effet-de-serres

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