Détection des bagages dangereux L'industrie du transport attend vivement l'innovation d'Optosecurity 2005-06-14 Par Daniel Allard Il n'existe actuellement aucun moyen automatique pour appuyer la tâche des douaniers dans la détection des objets interdis. C’est encore manuellement ou visuellement qu’ils doivent deviner la présence dans un bagage d’une pièce de revolver, de matériaux explosifs ou encore d’une section de missile portatif, avec dans leur dos la file de voyageurs qui s’impatientent, espérant traverser au plus vite l’étape de l’appareil à rayons X, avant de trouver le relatif confort de leur siège d’avion. Cette préoccupante situation, en cette ère « post-11 septembre 2001 », pourrait prochainement trouver une solution technologique grâce à Optosecurity. Ce spin-off de l’INO, financement initial en poche, attire maintenant les projecteurs sur son siège social établi au Parc technologique du Québec métropolitain.
À travers des études de génie, d'abord à l'Université Laval et ensuite avec l’INRS et à Paris pour une maîtrise, il a commencé à cumuler 8 années d'expérience chez Bell Canada, avant de passer chez Télésystème International pour trois ans et ensuite une année comme administrateur avec une compagnie de Montréal dans le domaine de la sécurité. « En 2001, j'ai eu l'occasion de déménager aux Pays-Bas avec pour défi d’y ouvrir un bureau d'une compagnie américaine d'infrastructures télécom », explique-t-il. Face à la fermeture de ce dernier à la fin de 2002, il accepte l'offre de revenir à Québec à l'emploi du fonds public en capital de risque Innovatech Québec Chaudière-Appalaches. Mais il n'y restera qu'une année... Parce qu’un avocat de chez Ogilvy Renaud l’invitera à aller rencontrer des gens de l'INO, à la recherche d'entrepreneurs pour commercialiser des technologies maisons. Un rendez-vous qui aura lieu en décembre 2003 et qui donnera à sa vie un niveau tournant à 180 degrés : « J'ai donné ma démission à Innovatech le même mois et immédiatement travaillé sur un plan d'affaires », se souvient-il. Rapidement, une licence de transfert technologique avec des royautés, à payer jusqu'à un maximum au-delà duquel le transfert de propriété devient total, a été négocié avec l’INO, trop heureuse d’ajouter un autre spin-off à son fleuron. « Mais l'INO a aussi demandé de rester actionnaire minoritaire d'Optosecurity ; une bonne affaire finalement, car c’est le genre de chose qui rassure les investisseurs institutionnels », précise Éric Bergeron. Fondée en décembre 2003, la compagnie fut incorporée en mars 2004 avec ses trois autres associés initiaux. « Depuis, j'ai dû les racheter tous. Ils n'ont pas voulu poursuivent. » Travaillant d'abord sur la base de ses propres économies, il mettra seize mois pour amasser les 2,5 M$ de financement finalement bouclé officiellement le 6 juin 2005. « J'ai d'abord convaincu la BDC de mettre un million $ et ensuite diverses fortunes privées ont permis d'amasser un autre 975 000$. Innovatech a complété pour 500 000$... J'insiste ici pour lever mon chapeau au groupe de capital-risque de Montréal de la BDC pour leur appui inébranlable. Je ne serais pas là sans eux », assure-t-il. La Banque de développement du Canada (BDC) est une institution financière totalement propriété du Gouvernement du Canada, qui joue un rôle de premier plan en offrant des services de financement, de consultation et d’investissement au petites entreprises canadiennes, avec une attention particulière dans le secteur des technologies et l’exportation. The Optosecurity Opticallypowered screening product Mais quelle était donc cette fameuse technologie, que trois des quatre fondateurs ont décidée d’abandonner ? Un corrélateur optique ! « C'est un ordinateur qui fonctionne avec des rayons de lumière plutôt qu'avec des logiciels. C'est la lumière qui fait des calculs plutôt que des programmes informatiques », résume Éric Bergeron. Une technologie initialement développée pour le domaine militaire (Automatic Target Recognition), qui ensuite a donné quelques espoirs dans le domaine industriel pour détecter des défauts à haute vitesse. « Mais c'était trop gros et trop cher pour ça », explique celui qui tente maintenant de donner une vie commerciale à cette invention dans le domaine de la sécurité des transports. La bonne étoile d’Éric Bergeron c’est d’avoir été capable d’identifier un marché : la sécurité, et plus précisément la détection d'armes et d'explosifs dans les bagages par les appareils à rayons X. « Dans le militaire, le cycle d'affaires est trop long. En biométrie faciale, un autre champ d’affaires possible, il y a déjà trop de concurrents. » Il choisit d’oublier ça aussi. C'est donc dans les intimidants appareils à rayons X, que l'on traverse invariablement dans tous les aéroports du monde, qu’il viendra insérer une nouvelle pièce, une petite boîte magique, qui détectera automatiquement la présence d'engins dangereux. « Il y a 100 000 machines à rayons X dans les aéroports seulement à travers le monde. Il faut ajouter les ports, les ambassades… Seulement cinq compagnies fabriquent de telles machines dans le monde. J'ai écrit aux présidents des cinq et ils m'ont tous répondus avec empressement… On nous a aussi confirmé qu'il n'existe actuellement rien pour accomplir ce que nous allons offrir. »
Pour réussir, il devra absolument convaincre le gouvernement de lui permettre d'accéder à cette précieuse source de données. « Une démarche qui suit son cours », confirme-t-il avec assurance. La technologie est au point en laboratoire. Il faut maintenant faire une preuve de concept pré commerciale. Et c'est essentiellement à cela que serviront les 2,5 millions $ assemblés récemment lors de la première phase de financement. Une fois cette étape accomplie, il retournera devant les investisseurs pour doubler la mise et trouver 5 millions $ supplémentaires avec mission d’amener le produit à sa version commerciale. Une seconde phase qu'il veut boucler en 2006. Les clients privilégiés seront d'abord les aéroports. Il y a 429 aéroports commerciaux aux États-Unis et une trentaine au Canada. Mais il garde surtout en mémoire le fait que la compagnie Smiths Detection, établie au Royaume-Uni, a 20 000 machines à rayons X de déployées à travers le monde. Avec un plan d’affaires qui vise à vendre 200 machines pour satisfaire ces investisseurs, Éric Bergeron n'est pas du tout nerveux. Il prévoit réaliser ses premières ventes au milieu de 2006. Et on ne parle pas ici en centaines de $. Le client devra débourser plusieurs dizaines de milliers de $ pour équiper chacune de ses machines à rayons X avec l’innovation d’Optosecurity. Ultérieurement, toute l’industrie du transport cargo sera également dans la mire de la jeune compagnie, puisque son système de détection se prête aussi à merveille à l’amélioration des inspections pour les camions et containers de toutes sortes.
« J’espère bien que nous serons vingt employés d'ici la fin de 2006, et pourquoi pas en demeurant à l’INO. Nous sommes très bien ici, dans un bâtiment sécurisé, à proximité des chercheurs de l’INO avec qui nous poursuivons d’ailleurs des démarches de R&D… Dans douze moins, nous aurons un pilote installé quelque part dans un aéroport. Nous avons signé un accord de déploiement et de tests expérimentaux avec une importante agence gouvernementale nord-américaine à cette fin ». Lorsque le chiffre d’affaires d’Optosecurity naviguera dans les 100 M$ et plus, le destin de la compagnie qu’il prend plaisir à développer est aussi très clair dans sa tête. Elle sera éventuellement vendue à un gros nom du domaine de la sécurité. Après avoir longtemps travaillé pour les autres, Éric Bergeron travaille cette fois pour lui. Puisque sa stratégie de sortie est déjà planifiée, que compte-t-il faire après ? « Partir une autre compagnie. Et cette fois avec plus de capital initial en poche», répond le principal intéressé sans aucune hésitation, hautement confiant de sortir de l’aventure avec en main plusieurs millions de $ à sa disposition. C’est ça avoir l’âme d’un entrepreneur !
L'entreprise faisant l'objet de ce profil a été choisie avec l'implication de l'équipe de professionnels qui administre le Parc technologique du Québec métropolitain, dans le cadre d'une collaboration spéciale. |
|
|