Éditorial À l'heure du «mondial» ! 2008-07-09 Par Daniel Allard Être « international » n'a définitivement plus la cote. Dorénavant il faut être « mondial ». La dernière en liste nous vient tout droit des riches cités du Moyen-Orient, alors que Dubaï proclame que son futur aéroport sera « mondial », et non pas simplement international. La planète est rendue là ! Que faut-il en comprendre ? Est-ce le fait qu'il sera le plus gros de la planète ? Pour un aéroport, l'argument aurait des chances de tenir la route, car incidemment il permettra à n'en pas douter de relier les quatre coins de la planète. Mais est-ce à dire, en appliquant la même logique, que le plus haut gratte-ciel sera de calibre mondial... Que la plus peuplée des villes sera mondiale... Que le plus gros barrage hydroélectrique de la planète sera mondial... Qu'il n'y aura de « mondial » que The Biggest... Ce serait ridiculement simpliste. La grosseur Non, la grosseur ne fait pas foi de tout ! La grosseur ne peut pas faire foi de tout ! D'ailleurs, mondial signifie : « Qui concerne le monde entier ». On a donc bien ici un adjectif davantage qualificatif, que quantitatif... Dans le même sens, mon Petit Larousse dit bien du mot mondialiser que c'est : « Le fait de donner à quelque chose un caractère mondial, une extension qui intéresse le monde entier ». Bien heureusement, si grande est notre planète, la démesure n'est pas l'unique critère de ce qui est d'intérêt pour l'humanité qui l'habite. Faire le tour du monde nécessite certainement des arrêts aux gigantesques pyramides égyptiennes, pour le génie des constructeurs, aux chutes d'Iguaçu, pour l'ampleur et l'importance du phénomène naturel sans pareil, ou encore l'ascension tout au sommet de la Tour du CN à Toronto, longtemps toit du monde. Mais tout autant la visite de Gruyère en Suisse, avec son fromage devenu plus universel que son village d'origine, ou le Vatican, le plus petit - tiens, tiens ! - État du monde. Quant au futur aéroport de Dubaï, s'il n'est pas encore certain qu'il intéresse le monde entier, son rayonnement a lui franchi bien des frontières par le jeu de l'auto proclamation. Bravo à ses promoteurs ! Attendons maintenant. Les faits prouveront un jour s'ils avaient raison de se montrer si vite importants. Souhaitons par ailleurs que ce ne soit pas une histoire de mode. Je me rappelle mon agacement, voire ma gêne, du milieu des années 1990, alors qu'à Québec, on se donnait de l'international à qui mieux, mieux. Le Salon de l'automobile était donc soudainement devenu le Salon international de l'automobile, avec pourtant des voitures tout autant qu'avant construites aux quatre coins du monde. Le moindre événement devenait « international ». Festival de danse, de feux d'artifices, etc. La mode passa après quelques années, car il semble bien que ç'en était une, et on visite à nouveau le Salon de l'auto de Québec, sans aucun complexe. Et si ce n'est pas une histoire de mode passagère, que la planète est véritablement rendue à pouvoir se donner des références de calibre mondial, il y a finalement de l'espoir pour l'humanité. Mondial ça veut aussi dire sans frontière. Ça veut aussi dire le dépassement des souverainetés bêtement nationales de nos États et donc qu'internationales dans leurs rapports réciproques. Québec, Donnez-nous en du mondial. Mondiale comme conscience, préoccupation, loi, justice, richesse; mondial comme gouvernement, média, environnement, patrimoine, défi. Mondial comme... aéroport ? Ça reste à voir. Mais mondiale comme ville, certainement. Québec, une ville mondiale ? Avec maintenant 400 ans d'achèvements bien comptés, Monsieur le maire Régis Labeaume, ne vous gênez pas. Ce qui est bon pour le rayonnement de Dubaï l'est tout autant pour Québec. Déjà ville du patrimoine mondial de l'Unesco, unique capitale politique francophone de l'Amérique du Nord, patrie des opérations Nez rouge, du premier IBR et du Moulin à images, il y a de quoi lancer la machine. Mondialement votre ! Fait à Québec le 9 juillet 2008. |
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