Éditorial électoral UN QUÉBEC LIBÉRÉ ? 2007-03-23 Par Daniel Allard Peu de gens seront surpris si le Québec se réveille, au lendemain des élections provinciales du lundi 26 mars 2007, avec un véritable Parlement à trois. Et au-delà de la fin du bipartisme, il faudra voir dans ce phénomène un geste de libération des Québécois face à la fameuse ''question nationale'' qui avait la fâcheuse habitude de prendre en otage la quasi-totalité des enjeux électoraux des trois dernières décennies au Québec. Bonne nouvelle donc, le Québec est en voie de se libérer du quasi monopole que représentait l’enjeu de son avenir au sein ou hors du Canada, depuis que le Parti Québécois exerce une présence significative sur la scène politique québécoise. Après trois élections, voici qu’un jeune parti, l’Action démocratique du Québec, semble en bonne position de ravir suffisamment de votes (quelque chose comme 30%) - et on verra combien de comtés - pour lui aussi devenir significatif et changer la donne en extirpant, du moins en relativisant de beaucoup l’élément ‘’référendaire’’ qui teintait finalement toujours trop le résultat électoral depuis 1976. Si on prenait rapidement un autre exemple que celui du Québec, est-il si difficile de concevoir que les Écossais pourraient par souci de solidarité – et incidemment de fierté et d’efficacité - vouloir poursuivre la construction du Royaume-Uni avec les autres citoyens de ce grand pays, particulièrement parce qu'on fait de plus grandes choses si on peut les faire avec de plus grands moyens et avec plus de gens à la fois ? Car après trois siècles de parlementarisme partagé, si les Écossais et les Anglais en arrivaient à la conclusion qu'il n'est pas à l’avantage de tous de continuer à agir ensemble, où s'en va l’humanité ? Je vous le demande ? Un raisonnement, évidemment, tout aussi valable pour le Québec. Après tout ce qui a été construit depuis 1867, si les Québécois et les autres Canadiens ne voient pas les avantages à continuer d'agir ensemble, où s'en va l'humanité ? Que donner en exemple ? Que Oui, le Québec actuel est donc un bel exemple de nation solidaire, qui tire d’ailleurs très bien son épingle du jeu – il vient encore d’en donner un magistral épisode en obtenant une voix à l’UNESCO – en matière de relations internationales. Le voilà même devenu Nation au sein même du Canada ! À Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général de la Francophonie de passage à Québec en juin 2001, j’avais tenu à poser à cet homme de grande sagesse une grosse question : Alors que la gouvernance mondiale est de plus en plus complexe et lourde, selon vous, combien faut-il de pays souverains dans le monde pour obtenir une gouvernance mondiale efficace, efficiente, permettant d’assurer la survie à la fois de la démocratie, mais aussi de la planète? Car il y a urgence, ne trouvez-vous pas? "...vous n’avez pas avantage « Si on encourage la micro-étatisation, c’est évident que nous allons nous retrouver avec encore plusieurs centaines de nouveaux pays souverains... Je suis d’accord (...) que vous n’avez pas avantage à augmenter le nombre des États souverains », nous exposa-t-il clairement à travers une impressionnante tirade de 20 minutes sur le sujet, au grand désarroi de son attaché de presse qui suait de voir le temps passer. En interview privée, sans pression, M. Boutros-Ghali avait toute liberté de réponse. Les défis de la gouverne mondiale, avec déjà presque 200 pays souverains comme acteurs principaux, commandent que la solidarité et l’efficacité soient au cœur de la fierté nationale de tous les États existants. Personne ne me fera croire qu’il peut être plus facile de gérer 250, 300 pays que la moitié moins ! Au surplus, le Québec change davantage le monde en restant au sein du Canada. Car il y a le poids pour changer - et faire évoluer - un des beaux exemples de fédéralisme dans le monde moderne. Soyons en fier ! Daniel Allard Fait à Québec le 23 mars 2007. |
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