Économie
et Francophonie |
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Le Sommet
de la Francophonie de Moncton n'a pas oublié la conférence ministérielle
spéciale sur les questions économiques de Monaco, mais il n'est pas allé
plus loin. En se réunissant
pour la première fois dans le monde de la Francophonie, dans la
Principauté de Monaco, les 14 et 15 avril dernier, dans le cadre de la
Première conférence des
ministres francophones de l'Économie et des Finances, le ministre québécois
Bernard Landry et ses pairs
voulaient en quelque sorte donner ses lettres de noblesse à la
Francophonie économique et des affaires. Ils quittèrent sûrement Monaco
avec confiance, se disant que le Sommet
de Moncton allait prendre le relais et poursuivre la construction d'un
véritable "avantage francophone" sur le plan économique et
commercial. Une impression qui ne devait pas être étrangère avec leur décision
de ne pas institutionaliser leur rencontre de ministre et de ne pas prévoir
de seconde conférence! Les résultats
de Monaco furent vastes et complexes (Voir la Déclaration dans le #11 de
COMMERCE MONDE). Sans parler de Zone
de libre-échange de la Francophone, les ministres ont mis la table et
harmonisé leur discours sur des objectifs économiques importants. Un
plan d'action autour de la notion de développement
d'un espace de coopération économique francophone y a été
articulé. Trois initiatives particulières, pour lesquelles ils ont décidé
de faire des études de faisabilité, avaient aussi émergé de leurs
travaux:
Le Sommet de Moncton a-t-il oublié les travaux de Monaco? Non! Dans leur Déclaration finale (voir encadré ci-bas), les chefs d'État et de gouvernement sont explicites sur le sujet: "...nous nous félicitons de ses résultats. Nous appelons à la mise en œuvre de ses recommandations ainsi qu'à l'intensification de notre concertation". Et le paragraphe 4.2 du Plan d'action (voir aussi l'encadré ci-bas) reprend textuellement les trois priorités de la Conférence de Monaco.
Les décisions des
chefs d'État et de gouvernement ont-elles, sur le plan commercial,
contribué à construire un "avantage francophone"?
Le concept "avantage francophone" mérite d'abord quelques
explications! Un seul exemple permettra de saisir l'immense potentiel
commercial dont recèle la Francophonie: une étude américaine a déjà
fait la démonstration qu'il en coûte 15% de plus à une entreprise des
États-Unis, anglophone, qui veut vendre au Québec, comparativement à
son compétiteur francophone, simplement du fait que celui-ci n'a pas
besoin de se soucier des problématiques de traduction! Autrement dit,
dans un territoire francophone comme le Québec, qui possède des lois
imposant l'étiquetage et la publicité en langue française, les
entreprises francophones bénéficient d'un "avantage
francophone" de 15%! Combien de gouvernements, parmi les quelque 52
territoires de la Francophonie, font respecter ce genre de réglementation?
Des considérations de la sorte contribuent à construire, à l'avantage
des gens d'affaires francophones, un véritable "avantage
francophone". Michel Grégoire, conseiller à la Direction générale de la francophonie du Ministère des Relations internationales, avait accompagné le ministre Bernard Landry à Monaco. Il voit l'avantage francophone sous un autre angle: "Sur le plan strictement commercial, n'oublions jamais que la proximité géographique fait énormément défaut pour la grande majorité des pays de la francophonie entre eux. Là où la Francophonie peut jouer un rôle important, c'est en développant un espace de COOPÉRATION économique. Et à ce titre, ce que la Francophonie peut faire de mieux sur le plan commercial, c'est d'appuyer les pays du Sud à être plus aptes à faire du commerce, avec qui que ce soit", explique-t-il. Les conclusions de la conférence de Monaco vont d'ailleurs essentiellement dans cette direction. DE BATHURST À MONCTON! Comment les gens
d'affaires présents lors du 7e Forum francophone des affaires (FFA) tenu
à Bathurst, en juin dernier, peuvent-ils faire un constat de Moncton?
"Mon rêve, c'est créer une Union Francophone (UF), à l'instar de
l'Union Europénne (UE), et que ce soit autre chose qu'une unité
statistique", avait dit l'un d'eux à Bathurst. "Je rêve que le
FFA devienne l'Agence de développement économique de la
Francophonie", y avait dit un autre. "Je rêve de rapprocher le
FFA du Sommet de la Francophonie lui-même, pour que nous arrêtions de
nous cacher", y avait encore dit un troisième homme d'affaires. Pour
un autre, il fallait faire de la Francophonie un "projet
valable"! "Pourquoi pas un PASSEPORT FRANCOPHONE", osait un
cinquième, pour éviter les problèmes de visa comme ceux encore vécus
par des gens du Cameroun, qui ont vu la route vers Bathurst finir en refus
mal compris. "La
Francophonie sera lorsque la francophonie économique vivra!",
clament souvent d'érudits observateurs du monde de la Francophonie
officielle. Les plus heureux de Bathurst seront assurément, sur la base
des discours, les jeunes. "Il faut décloisonner nos systèmes d'éducation
pour permettre aux jeunes d'aujourd'hui de savoir
devenir", avait rêvé un participant du FFA. Il semble que
ses paroles aient raisonné fort à Moncton, comme ce souhait d'une jeune
qui avait rêvé de se servir de la Francophonie pour atteindre le développement
durable! Pour le reste, les gens d'affaires francophones peuvent encore
espérer que l'appel de travailler de concert entre États francophones
pour "Réussir Seattle", en décembre prochain - dans le cadre
du nouveau round de l'Organisation mondiale du commerce qui promet de discuter fort de
diversité culturelle et d'agriculture - soit un appel entendu. Car hormis
ce pas en avant, pour eux, Moncton aura plutôt été un sommet
franco..."off"! |