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EXPORTATEURS : POURQUOI NE PAS PROFITER
D’UN FINANCEMENT DE VOS EXPORTATIONS?

Par Me Jean Pelletier, avocat
Flynn, Rivard
Email : jpelletier@flynn.qc.ca

Flynn Rivard

Il est utopique de penser que l’acheteur vous paiera avant l’expédition de vos marchandises. Il est par ailleurs très imprudent de votre part dans la majorité des cas d’expédier vos marchandises sans avoir obtenu une solide garantie de paiement.

 

Prudence

En matière de vente internationale de marchandises et de services, il y a plusieurs aléas que ni l’exportateur, ni l’importateur ne peuvent tout à fait maîtriser : la distance séparant les parties, la méconnaissance réciproque des interlocuteurs, les risques du transport des marchandises, les risques politiques et la réglementation financière et commerciale dans les pays respectifs des cocontractants, la fiabilité et la solvabilité des intermédiaires financiers, etc. Nous sommes en présence de deux parties : l’une veut payer le service rendu par l’autre, mais dans des circonstances telles que son paiement n’interviendra pas avant que l’autre ait rendu ce service; à l’opposé, l’autre partie veut bien rendre ce service, mais pas avant d’être assurée qu’elle sera payée dès que le service sera rendu. Voilà le cercle vicieux du commerce international.

Nous constatons malheureusement dans bien des cas que des exportateurs subissent des pertes financières importantes résultant du fait qu’ils n’obtiennent pas la garantie de paiement requise et adéquate des marchandises qu’ils vendent à l’étranger. L’absence d’une telle garantie résulte souvent du fait que le client a créé un climat de confiance ou démontrer une solvabilité laissant l’exportateur peut perplexe sur les possibilités d’être payé pour les marchandises vendues, et ce malgré le fait qu’il puisse s’agir d’une première transaction entre les deux parties.

Nous sommes d’avis que l’exportateur doit toujours être prudent lorsqu’il transige avec un client avec lequel il n’a pas établi un historique de crédit par des transactions antérieures. Même dans ce cas, il est recommandé que l’exportateur détienne toujours une garantie de paiement en raison des nombreuses difficultés et des coûts que représente toute tentative de recouvrement d’une créance à l’étranger. L’obtention d’une garantie de paiement doit être la règle, celle-ci étant d’ailleurs d’usage et commune dans toutes les transactions de vente à distance, ne serait-ce qu’à l’intérieur même du Canada lors d’une vente interprovinciale.

 

Avantages du crédit documentaire

Pour l’exportateur, le crédit documentaire est avant tout un instrument de garantie de paiement et un moyen de financement en ce qu’une banque se substitue à l’importateur et prend l’engagement de payer l’exportateur lorsque celui-ci aura présenté les documents requis aux termes du crédit.

Pour l’importateur, le crédit documentaire est aussi un instrument de sécurité et de financement. À ces avantages, il faudra ajouter l’utilisation par l’importateur de la notoriété de sa banque.

Finalement, le crédit documentaire procure des intérêts à la banque, en même temps qu’elle constitue pour elle une garantie de crédit.

 

Les crédits documentaires

L’on définit le crédit documentaire comme étant tout arrangement quelle qu’en soit la dénomination ou description, en vertu duquel une banque, agissant à la demande et sur l’instruction d’un client, est tenu d’effectuer un paiement à un tiers.

Les crédits documentaires sont non seulement des mécanismes de paiement et des instruments de crédit, mais ils jouent également le rôle de garantie. En effet, ils permettent d’une part, un compromis efficace entre l’exportateur et l’acheteur à distance, assurant à l’un qu’il sera payé après l’expédition de la marchandise, et à l’autre, qu’aucun paiement ne sera fait avant que la marchandise ne soit expédiée.

Les crédits documentaires se distinguent par l’application de deux principes, soit celui de l’autonomie et celui de la stricte conformité des documents. On dit de la lettre de crédit qu’elle est doublement autonome. Elle l’est d’abord parce que le paiement des sommes prévues à la lettre par l’émetteur doit se faire indépendamment de la relation entre le donneur d’ordre et le bénéficiaire. Elle l’est ensuite parce que le paiement n’est pas non plus sujet à la relation établie entre l’émetteur et le donneur d’ordre. D’autre part, le principe de la stricte conformité veut que l’émetteur ne paiera les sommes spécifiées que si le bénéficiaire remplit rigoureusement les conditions de paiement, en l’occurrence, la présentation et délivrance des documents spécifiés.

 

La lettre de crédit traditionnelle

Il est de l’essence même de la lettre de crédit qu’elle soit indépendante ou autonome de la transaction commerciale sous-jacente. Elle établit une relation contractuelle entre la banque émettrice et l’exportateur qui est indépendante de la relation qui existe entre la banque et le client donneur d’ordres, et de celle qui existe entre le client donneur d’ordres et l’exportateur.

 

Lettre de crédit " stanby "

Il ne faut pas confondre la lettre de crédit traditionnelle avec ce que l’on appelle la lettre de crédit " stanby ". La première joue en même temps le rôle de mécanisme de paiement et le rôle de sûreté, alors que celui de la lettre de crédit " stanby " se limite à celui de garantie lorsqu’un autre mécanisme de paiement est prévu. Il s’agit d’une garantie extrêmement efficace, puisqu’elle entre en opération dès que l’acheteur est en défaut de paiement.

La lettre de crédit " stanby " favorise davantage l’exportateur en ce que la documentation requise pour en obtenir l’exécution ne consiste généralement qu’en une simple déclaration de l’exportateur que l’acheteur est en défaut de paiement. Par conséquent, l’acheteur aura toujours intérêt à procurer à l’exportateur une lettre de crédit traditionnelle qui lui assure que ce dernier livrera la marchandise et respectera ses engagements.

 

Le paiement idéal

Idéalement, tout paiement devrait être garanti par une lettre de crédit irrévocable, inconditionnelle, confirmée, payable au Canada, émise par une banque réputée et soumise aux règles et usances uniformes relatives aux crédits documentaires de la Chambre de commerce Internationale. La banque de l’exportateur doit non pas simplement notifier la lettre de crédit à l’exportateur, mais clairement la confirmer, c’est-à-dire qu’elle doit assumer la responsabilité du paiement à l’exportateur pour le compte de la banque de l’acheteur émettrice de la lettre de crédit.

Bien que la confirmation de la lettre de crédit ne soit pas sans frais pour l’exportateur, il s’avérera que ceux-ci sont minimes par rapport aux frais que devra encourir l’exportateur dans une autre juridiction pour le recouvrement de sa créance auprès de la banque émettrice ou de son client. La banque émettrice aura toujours tendance à protéger les intérêts de son client et, dans le doute, elle refusera de payer, comme elle est en droit de le faire lorsque les documents transmis par l’exportateur pour obtenir paiement sont considérés comme ne présentant pas l’apparence de conformité avec les conditions de crédit.

 

Le cautionnement institutionnel

Le cautionnement institutionnel dans les contrats de vente internationaux n’a pas atteint la stature de son rôle dans les contrats de construction. Cependant, l’intervention des états dans la promotion des exportations assure le développement de ce type de cautionnement, lequel constitue une garantie de paiement.

 

Financement par l’État

De nombreux pays ont instauré des agences ou sociétés paragouvernementales qui ont pour mission de soutenir et protéger les exportateurs. Le rôle joué au Canada par la S.E.E. est assez représentatif. La SEE offre un éventail de services de nature à favoriser les activités des exportateurs canadiens, en finançant les exportateurs eux-mêmes ou leurs clients, ou en offrant des garanties et assurances à ceux qui financent ces transactions. On notera des services de financement et d’assurance étendus. Les services de financement couvrent normalement les besoins de financement à moyen et long terme et s’effectuent par le biais de prêts, lignes de crédit, conventions d’achat (escompte), de billets à ordre et forfaitage.

Les prêts sont consentis directement aux acheteurs, alors que les lignes de crédit sont offertes par le biais des institutions gouvernementales ou bancaires des pays de l’acheteur. La S.E.E. offre également un service de garantie par lequel l’emprunt d’un acheteur étranger est garanti à l’institution prêteuse, et finance le crédit-bail lorsque le bailleur est une entreprise canadienne. Le financement est offert directement au bailleur, pour lui permettre d’acheter le bien visé.

La S.E.E. offre, entre autres, à titre de caution de l’exportateur, des garanties diverses telles les garanties de bonne fin, de restitution d’acomptes ou des garanties de soumissions. Par exception à la règle générale, la S.E.E. offre également des garanties pour les lignes de crédit à court terme offertes par les institutions de crédit étrangères pour financer la vente à crédit à court terme des produits canadiens. Ces services sont bien entendus soumis à des conditions de fonds et des procédures d’étude et d’acceptation.

Les financements de la S.E.E., directs ou indirects, couvrent jusqu’à 85% de la valeur contractuelle de l’opération d’exportation. Cependant, le contenu canadien du contrat doit normalement atteindre 60%. Les services de la S.E.E. sont offerts moyennant une commission et autres frais. Il est important d’établir le contact avec la S.E.E. le plus tôt possible, ce qui permettra d’orienter la transaction en fonction de ses critères.

 

Conclusion

Les sûretés que peut détenir l’exportateur sur les marchandises vendues ou sur les autres biens de l’acheteur ne lui permettent pas de financer ses activités d’exportation, puisque celles-ci ne constituent nullement une garantie de paiement généralement acceptable par son banquier. En effet, une telle sûreté doit être prise dans la juridiction où la marchandise vendue ou les biens de l’acheteur sont situés et selon les lois applicables dans cette juridiction. De façon générale, si l’on tient compte des difficultés entourant l’établissement et la réalisation d’une sûreté à l’étranger, il est évident que les garanties d’une banque ou d’un organisme gouvernemental, comme celles dont nous avons discuté, présentent un avantage qui leur assurera la part de lion des sûretés à l’échelle internationale.