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La sensibilisation à la communication interculturelle,
"qu’ossa donne" en affaires ?

par Michel Leclerc,
président d'Interconsult Québec

 

 

Une rôtisserie bien de chez nous propose depuis quelques semaines une nouvelle pub. Voilà un homme d’affaires reçu somptueusement par ses hôtes asiatiques qui lui proposent un plat de très haute gastronomie : du babouin ou quelque chose du genre. Le babouin n’est pas dans le menu quotidien de ce pauvre homme qui, publicité oblige, se met à rêver au coq de son Québec natal. "Le voyage va être long", dit-il! Et l’expression de son visage, son non-verbal, traduit mieux que tout autre discours son désarroi et surtout son incapacité de s’adapter. Je suis convaincu que ses interlocuteurs asiatiques ont bien compris ; mais ça, le clip publicitaire n’en parle pas.

Son voyage sera en effet très long, car je ne suis pas convaincu que l’homme n’arrivera pas à créer les contacts qu’il espérait. Tout au plus des banalités seront échangées dans un contexte de grande politesse ; on se promettra sans doute de se revoir mais sa visite n’aura pas de lendemains.

Pourtant, comme beaucoup d’autres, cet homme devait se dire avant de partir : si ces gens font des affaires, ils doivent bien les faire comme il les fait. N’ont-ils pas les téléphones et les télécopieurs les plus modernes au monde, ne sont-ils pas des utilisateurs d’Internet sur une grande échelle, leurs hôtels sont comme les nôtres (bien oui, il y a des Hilton partout), leurs voitures sont les mêmes que les nôtres (des Toyota, des Honda, des Mazda!), donc ils sont comme nous. De là à penser que notre modèle est universel et que les autres s’y sont adaptés, il y a un pas qui est souvent vite franchi. Le "Quand on vit à Rome, il faut vivre comme les Romains" est plutôt évacué chez beaucoup de nord-américains.

Ignorer la question interculturelle dans nos rapports avec les autres représente pourtant des coûts qui peuvent atteindre des niveaux élevés ; l’intégrer peut faire toute la différence. L’histoire récente des relations commerciales internationales montre un nombre effarant de cadavres jonchant la route des projets. Déjà, en août 1986, Guptara Prabhu notait dans International management les coûts faramineux du rapatriement d’un technicien qui, établi dans un autre pays, échoue lamentablement parce qu’il est incapable de s’adapter et de communiquer avec ses pairs : plus de 250 000$ US.

Pourtant, une enquête réalisée il y a quelques années par le collège François-Xavier-Garneau (signée de Nathalie Roy) pour le Grand réseau des acteurs et des promoteurs du partenariat économique (G.R.A.P.P.E.) révélait que, parmi les compétences recherchées en commerce international, les relations interculturelles et les langues l’emportaient sur la logistique (transport, douanes, etc) et talonnaient le financement et le marketing. Pourtant dans les décisions concrètes et quotidiennes de ceux qui souhaiteraient étendre leurs activités à l’étranger (commerce ou implantation), quelle part prend la question interculturelle dans les stratégies?

Poser la question, c’est peut-être y répondre. Quelque part, il y en aura toujours pour rêver au coq de référence.