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SOMMAIRE

Libye : c’est le temps d’y aller
La Chaire d’études maghrébines Rabah Bitat fierté
« scandaleuse » de l’Université Laval

 
par Daniel Allard

Si vous êtes en mesure de dire pourquoi l’Institut québécois des hautes études internationales (IQHÉI) était le partenaire stratégique de l’événement Cap sur la Libye, tenu à l’initiative de l’Association Culturelle et Économique Québec Maghreb, dans le pavillon fraîchement rénové d’un autre institut de la même université, celui des nutraceutiques et des aliments fonctionnels, c’est fort probablement parce que vous y étiez ! « L’Université Laval est la seule des Amériques à avoir une chaire maghrébine », a expliqué, à la surprise générale de l’auditoire, Louis Bélanger, le directeur de l’IQHÉI.

Ce rapportant au contexte des nombreux constats troublants face au monde musulman effectués en occident depuis le choc du 11 septembre 2002, le professeur Bélanger a poursuivi avec des mots sans équivoque: « C’est une scandaleuse situation !» Établie par l’Université Laval en septembre 2001, et logée au sein de l’IQHÉI, la Chaire d’études maghrébines Rabah Bitat (CEMRB) est la première du genre, à l’échelle des Amériques, à consacrer spécifiquement ses activités en enseignement supérieur, en recherche ainsi qu’en publication et en animation, à la région du Maghreb. La CEMRB a sa propre instance de direction, elle est rattachée administrativement à l’IQHEI et bénéficie déjà du soutien du gouvernement de l’Algérie, qui a investi 250 000 $US dans un fonds entièrement capitalisé. « On a été ébahi d’avoir l’aide du gouvernement de l’Algérie pour favoriser la création de cette chaire(…) Cela exige de nous de l’excellence, d’ainsi recevoir de l’aide d’un pays du Sud », a-t-il aussi affirmé.

Cette fierté méritée pour l’Université Laval risque cependant de ne plus tenir la route bien longtemps. Les élites du pays de l’Oncle Sam savent qu’ils ne peuvent plus se priver de doper leurs universités d’instruments de connaissance encore plus efficaces pour comprendre en profondeur ce qui fait tant bouillonner le monde musulman ces dernières années.

« D’ici 2013, les États-Unis veulent le libre-échange avec le Maghreb et le Moyen-Orient en entier(…) L’Accord de libre-échange Maroc-USA a été signé le 15 juin 2004, après seulement un an de négociation, et il libéralise immédiatement 95% du commerce entre les deux pays(…) L’Algérie négocie actuellement son adhésion à l’OMC, un autre signe de grand changement », a d’ailleurs expliqué un Louis Bélanger qui avait tout pour captiver la quarantaine de personnes qui avait fait le choix de consacrer leur fin de journée du 17 juin 2004 à une activité qui, utilisant la formule du 16h00 à 21h00, offrait avec justesse un contenu très substantiel.

LE TEMPS D’Y ALLER

« Je pense que Tripoli devrait ressembler à Dubaï d’ici quelques mois. C’est le temps d’y aller. » Ce témoignage de Raynald Ostiguy, un homme de la haute direction de la division TransÉnergie d’Hydro-Québec qui va en Libye plusieurs fois par an depuis 1986, avait beaucoup de crédibilité.

« Maintenant, on peut avoir le visa à Ottawa. Avant, il fallait passer par Rome », a-t-il aussi raconté. Un problème qu’a repris le chef de la diplomatie libyenne en poste à Ottawa, qui était aussi parmi les conférenciers invités, en relançant l’auditoire pour s’adresser indirectement aux autorités canadiennes de la façon suivant : « Nous souhaitons, nous aussi, réduire les délais. Faites 1 jour, nous ferons en 1/2 ! Faites 3 jours, nous ferons 2 ! Faites 14 jours, nous ferons 10 ! » 

Les liaisons aériennes sont un autre élément qui fait peiner les gens d’affaires. Il faut aimer l’avion, mais la situation s’améliore progressivement. Monsieur Ali Aujoli, « chargé d'affaires » de l’Ambassade de Libye à Ottawa avec des fonctions d’ambassadeur sans en avoir officiellement le titre car la Libye doit diplomatiquement s’aligner sur le même niveau de représentation que le Canada a décidé de s’accorder à Tripoli, un diplomate par ailleurs qui s’apprêtait à quitter Ottawa pour prendre des fonctions similaires à Washington, a aussi lancé ce bon conseil : « En Méditerranée, la politique passe en premier. Le reste suit, après ! Il faut des politiciens dans vos missions commerciales », a-t-il averti. Une phrase qui semblait toute faite pour les oreilles du ministre responsable de la capitale du Québec, Sam Hamad (qui n’était cependant pas sur place), lui-même natif de la Syrie, arabophone, tout désigné pour éventuellement mener un tel type de mission avec des gens d’affaires de la région de Québec, et dont l’intention de le faire a d’ailleurs été manifestée à quelques reprises depuis son entrée en fonction au printemps 2003.

« Il faut des politiciens
dans vos missions commerciales »

Dans ce pays de 5,5 millions d’habitants où 50% de la population active est constitué de travailleurs étrangers, où on n’exporte pour l’instant que du pétrole et du gaz, où on ne produit que pour le marché intérieur, on importe de tout : « Les secteurs prioritaires sont la construction, l’éducation et les télécommunications », a cependant mentionné le diplomate.

« Le Canada a été le seule pays des Amériques qui était représenté à la foire de Tripoli de 2003 », a expliqué Guy R. Smith, le président de la jeune Chambre de commerce et d'industrie Canada-Libye, fondée en août 2001 (le Canada a ouvert une ambassade à Tripoli en 2002.) Après les SNC-Lavalin, reconnue pour être la première compagnie canadienne à faire des affaires en Libye, Petro Canada et Postes Canada International, d’autres se mettent sur la piste.

LA LIBYE CONSTRUIT UN DES PLUS GROS AQUEDUCS DE L’HISTOIRE HUMAINE AVEC L’AIDE D’HYDRO-QUÉBEC

Ce pays surtout connu pour ses déserts et son pétrole a su compter sur l’expertise de la société d’État Hydro-Québec pour aller de l’avant avec ce qui est déjà considéré comme l’un des plus gros projets d’aqueduc de l’histoire de l’humanité : la «Greatest Made Man River» (ou projet GMR, dit en français la Grande Rivière artificielle). La Libye est actuellement à bâtir le plus imposant réseau aqueduc construit de mains humaines depuis longtemps, un investissement qui atteint les 25 milliards $US, pour exploiter des eaux puisées très profondément au cœur du désert qui devront parcourir des milliers de kilomètres avant de trouver des clients dans les grandes villes du pays, plus au nord. C’est l’expertise québécoise, avec Hydro-Québec, qui a permis de solutionner des problèmes majeurs de conception et de régulation du courant nécessaire pour contrôler les immenses pompes servant à transporter massivement l’eau sur plus de 4 000 kilomètres de conduits, dont au moins 2 200 kilomètres sont déjà construits.

Mais Hydro-Québec brassait des affaires avec les Libyens bien avant ce projet. « L’AGECOL, notre principal client, nous rapporte d’une année à l’autre un chiffre d’affaires variant entre 10 et 25 millions $ », a précisé Raynald Ostiguy.

*****

Les gens d’affaires canadiens qui souhaitent s’intéresser à ce pays émergeant d’Afrique du Nord consulteront avantageusement la liste des gens que l’équipe de Slim Saïdani, président de l’Association Culturelle et Économique Québec Maghreb, avait invités à prendre la parole lors de cet événement sous l’agréable animation du président de Richard Thibault Communications inc. :

  • Ali Aujoli, chargé d'affaire, Ambassade de Libye à Ottawa ;
  • Louis Bélanger, directeur, Institut québécois des hautes études
  • Internationales ;
  • Guy R. Smith, avocat, Perley-Robertson, Hill & McDougall SRL et Président, Chambre de commerce et d'industrie Canada-Libye ;
  • Geoffrey Jones, délégué commercial (Algérie, Libye, Maroc), Direction du Maghreb et de la Péninsule arabique (GMG), Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada ;
  • Raynald Ostiguy, directeur principal Commercialisation, TransÉnergie Services, Hydro-Québec International ;
  • Abdelgader Ehwedi, attaché culturel, ambassade de Libye à Ottawa ;
  • Sufyan Maghur, président de Virtual Dimensions Inc., membre fondateur et Vice-Président Exécutif de la Chambre de commerce et d’industie Canada-Libye.

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slim.saidani@groupe-nexus.qc.ca

Fait à Québec le 15 août 2004.