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Québec à la croisée des chemin
Par Denis Gervais Commissaire général, Commissariat aux relations internationales de la Ville de Québec
Pendant cinq jours, du 16 au 20 mai 2004, les citoyens de toutes les villes à travers le Québec qui furent fusionnées en 2002 ont la possibilité daller signer des registres pouvant conduire à la tenue dun référendum sur le territoire des anciennes municipalités. Dans un tel cas, les dits référendums seraient tenus le dimanche 20 juin 2004, à travers tout le Québec en entier. Le prochain mois sera donc crucial pour lavenir de la nouvelle Ville de Québec, tel quelle se développe depuis sa naissance le 1er janvier 2002. Depuis un an, léquipe de la rédaction de CommerceMonde.com invite une personne bien choisie à écrire son propre « Billet », sur le sujet de son choix. Devant ces vents « défusionnistes » qui se lèvent, il nous a paru à propos de demander à monsieur Denis Gervais, Commissaire général aux Relations internationales de la Ville de Québec, de signer le présent « Billet ». Au nom de la Ville de Québec, il présente ici en quoi il pense quil est important de voir Québec rester ce quelle est dans le contexte du positionnement des grandes villes à travers le monde.
Lactualité nationale et internationale na jamais été aussi présente et instantanée, surtout depuis quInternet sajoute activement aux sources traditionnelles de la presse écrite et électronique. Les grands événements nous sont maintenant accessibles en « temps réel » actualité se confond avec histoire et lhistoire se vit en direct. Il faut toutefois le reconnaître : ce qui se déploie sous nos yeux nest quune lecture très partielle et asymétrique de la réalité. Pour un événement porteur despoir comme la chute du Mur de Berlin et du Rideau de Fer, à combien de Guerres du Golf, de Bosnie et dIrak avons-nous droit ? De New-York « 09-11 » ? De carnages terroristes ? En fait, l'actualité mondiale (et même locale) qui nous est présentée est rarement réjouissante, encourageante ou porteuse de promesses pour un monde meilleur. Cest ainsi que la construction de lEurope, processus de plus dun demi-siècle, colle mal avec instantanéité et fait rarement la nouvelle. En règle générale, il est difficile de sidentifier au monde qui est traduit sur nos écrans, monde sur lequel nous navons pour ainsi dire aucune prise. La lecture qui nous est proposée est habituellement incomplète et imparfaite, ce qui a souvent pour effet dentraîner la démission et le repli sur soi. Car, dans le confort relatif de notre foyer, que recherchons-nous, sinon le droit et la capacité de vivre dans un milieu harmonieux et propice à notre mieux-être avec en prime la possibilité de dire notre mot de temps en temps ? Or, sil ne semble pas facile de réconcilier nos aspirations avec ce qui se déroule à 10 000 km de notre perron, il est par contre un monde beaucoup plus réel, beaucoup plus palpable et à notre portée qui agit, au quotidien, sur notre environnement immédiat et auquel il nous est plus facile de nous identifier : notre ville. Encore ne faut-il pas, en réaction à notre relative impuissance face aux enjeux mondiaux, tomber dans une lecture réductrice du monde municipal. Ainsi, notre mieux-être au quotidien inclut mais ne doit pas se confondre avec la seule liste des travaux publics et dinfrastructures : enlèvement de la neige et des ordures, chasse aux nids-de-poule, récurage des égouts et émission des permis de construire. Qui peut encore affirmer aujourdhui que le développement de notre environnement municipal se résume à ces seules dimensions ? Elles sont importantes, certes, mais toujours reliées et souvent dépendantes de larges enjeux auxquels est confronté le développement municipal qui exige un dynamisme économique permanent générateur de richesse collective et un environnement culturel, social et communautaire adapté. « Qui peut encore affirmer aujourdhui Sur une base plus prosaïque, qui voterait pour une administration municipale sans vision économique, ignorant limplantation de parcs industriels et technologiques ou le soutien aux acteurs économiques de son territoire ? Pourrait-on faire confiance à une administration sans préoccupation en matière denvironnement ? Qui opterait pour une administration chez qui la dimension sociale est absente et qui néglige les aspects communautaires de son développement ou la réhabilitation de ses quartiers défavorisés ? Peut-on imaginer une Ville qui ne propose pas de programmes et dinfrastructures culturelles et de loisirs ? Ce nest pas daujourdhui que le développement dune ville passe par son dynamisme économique, culturel, social, communautaire, technologique et académique. À cet égard, les enseignements sont inéluctables: 1) le développement dune ville est global et sappuie sur une vision à long terme sinon il ny a pas de développement ; Lobservation de la scène internationale, une fois mises de côté les catastrophes trop médiatisées, nous démontre que personne néchappe au phénomène de la mondialisation. On peut en profiter comme on peut en être victime. La mondialisation a favorisé lémergence de pôles économiques face auxquels la ville de Québec fait figure de naine malgré son demi-million dhabitants. Cest une masse critique minimale pour sinscrire dans la course et prétendre avoir droit au chapitre sur la scène internationale. Faut-il le rappeler, nous sommes la neuvième ville à léchelle du Canada, cest tout dire pour ce qui est du reste du monde. Cest toutefois ces pôles urbains qui sont nos compétiteurs et que Québec affronte pour se faire une place au soleil et assurer son développement. « La mondialisation a favorisé lémergence de pôles économiques Heureusement, Québec bénéficie dinfrastructures et datouts technologiques, académiques, culturels et sociaux importants répartis aux quatre coins des huit arrondissements de son territoire. La Ville a cette chance de détenir à la fois des instances universitaires reconnues, des centres de recherche réputés, dêtre le siège du gouvernement du Québec et de posséder un environnement social et culturel qui font envie. Pourtant, les entreprises ne se précipitent pas pour sinstaller chez nous et nous manquons de main-duvre dans les secteurs stratégiques. Les immigrants choisissent peu notre capitale comme lieu dimplantation au Québec. Cela illustre bien quil ne suffit pas davoir un bon potentiel : encore faut-il quil soit connu et reconnu. La Ville de Québec, forte de ces atouts, a développé des relations avec des partenaires internationaux dynamiques de poids. Elle a confié à Pôle Québec Chaudière-Appalaches la promotion, à linternational, de nos secteurs de pointe, lattrait de capitaux et dinvestisseurs ainsi que lappui aux efforts des milieux économiques dans leur approche des marchés internationaux. Consciente par ailleurs des défis démographiques auxquels la région est confrontée et des besoins en main-duvre stratégique, la Ville a mis en uvre, depuis trois ans, avec le concours du Ministère des Relations avec les citoyens et de lImmigration, un programme de recrutement, daccueil et dintégration dimmigrantes et dimmigrants qui porte déjà ses fruits. Ces initiatives, comme les atouts dont nous disposons, ne peuvent toutefois se matérialiser que dans le cadre dune vision globale et à long terme qui implique activement tous les acteurs sectoriels et territoriaux. Car cette vision doit reposer sur une concertation constante de tous les secteurs et sur une dynamique et une synergie régionales efficaces. Seule une ville forte, présentant une masse critique suffisante, peut assurer cette concertation et la réussir. « Ces initiatives
ne peuvent se matérialiser Les villes et les régions dont léconomie repose sur une seule ressource ont peu despoir de tirer leur épingle du jeu. Les exemples ne manquent pas dans le monde et même au Québec de retournements qui ont valu à des régions et des villes des difficultés importantes. La Ville de Québec a la chance davoir réussi, au fil des ans, le pari de la diversification de son économie. Depuis trois ans, riche dun territoire et dune population qui constituent une masse critique crédible sur la scène internationale la Ville de Québec peut prétendre être une interlocutrice intéressante. Cela reste néanmoins fragile et il faut souhaiter que Québec conserve tous les atouts qui lui permettront de maintenir un dialogue avec le monde pour le profit de ses citoyens et ceux de la région. Fait à Québec le 15 mai 2004 |
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