Profil d'entreprise

PROFIL D'ENTREPRISE

Vignoble Bourg-Royal inc.
Une ténacité qui porte ses fruits et vise 60 000 bout./an

par Vincent Doyon et Daniel Allard

Jorj Radu est tenace! Quand ce Roumain d'origine a une idée derrière la tête, ce ne sont pas quelques obstacles qui vont l'arrêter. Sa passion des vins n'a fait que s'accentuer avec les années, et aujourd'hui, c'est le Québec qui profite de toute cette expérience - dont 28 années à amasser des diplômes et des connaissances scientifiques pertinentes - autant que de son entêtement à se dépasser et à offrir les meilleurs produits possibles.

QUANT IL FAUT SAUVER 20 000 VIGNES!
Seul des cinq vignobles de la région de la capitale du Québec à être situé en milieu urbain - au 1910 de la rue des Érables, dans l'arrondissement Charlesbourg, et surveillez la petite boîte à malle - le Vignoble Bourg-Royal était anciennement connu sous le nom de Vignoble Communautaire Bourg-Royal, Quelques années après la faillite de ce dernier, J. Radu saisit une occasion, avec la Cidrerie de la Capitale inc., la compagnie qui lui appartient déjà, de se porter acquéreur des terrains restés vacants depuis (déjà trop longtemps, aux yeux de cet amoureux des vignes) pour repartir en l'état (lamentable, avec un vignoble laissé quatre ans en friche) et leur redonner leur vocation d'antan. Au tournant des années 2000 il sauvait ainsi un patrimoine inestimable; les premières vignes y avaient été plantées en 1980!

Il sauvait un patrimoine inestimable; la première
vigne avait été plantée en 1980!

« Je connaissais déjà cet endroit... Il y avait plusieurs offres d'achat pour ces terrains zonés agricoles [un promoteur immobilier lui a même offert plus d'un million de $], mais seule la mienne visait à redémarrer un vignoble sur place. Les résidents de la rue des Érables étaient tellement contents qu'ils ont même signé et déposé à la Ville une pétition proposant que la rue soit dorénavant appelée "rue du Vignoble'' », souligne fièrement ce co-propriétaire dans la cinquantaine manifestement satisfait de faire duo avec son jeune associé né québécois, Steven Carrier, originaire de la Rive-Sud de Québec.

Commença alors le dur labeur de remettre de l'ordre dans un vignoble laissé à l'abandon. À travers ces tâches, Jorj (il accepte volontiers de se faire aussi appeler Georges) Radu a pu compter sur l'aide de son épouse, Liana Dragoi-Radu, et de Steven Carrier, vice-président et associé à parts égales dans l'entreprise. Actuellement étudiant en administration et gestion de commerce à l'Université Laval, Steven Carrier s'occupe particulièrement des relations publiques, en plus de travailler sur le vignoble le plus souvent possible. Et il ne regrette pas du tout son implication: « M. Radu connaissait mon père et nous étions ensemble lorsque nous avons appris que la Cidrerie de la Capitale était à vendre... Mon père l'a aidé... M. Radu a accepté de faire de moi son partenaire... Plus je travaille au vignoble, plus j'aime ça! En plus, nous avons la chance de posséder une terre propice à la vigne, ainsi qu'à toutes sortes d'arbres fruitiers », expliquait-il, un brin fier, en montrant par la fenêtre les champs de plantation - avec maintenant des pommiers, des poiriers, etc. - déjà bien enneigés en cet après-midi d'un 5 décembre ensoleillé, et qui étaient d'autant plus envoûtants, voire majestueux, qu'ils avaient comme horizon les buildings du centre-ville de Québec.

RENDEZ-VOUS
AVEC « OPÉRATION SCORPION »
LE 17 DÉCEMBRE 2003

Le 17 décembre, le vignoble recevra plusieurs membres de l'Opération Scorpion (avec dit-on le député Mario Dumont, chef de l'Action démocratique du Québec, en tête) qui fêtera alors le 1er anniversaire du début de l'enquête sur la prostitution juvénile à Québec. Sûrement que cette initiative apportera une visibilité accrue à l'entreprise du duo Radu-Carrier!

Les particuliers, de même que les entreprises, ont d'ailleurs le loisir de réserver les lieux pour pouvoir déguster les vins et goûter à la cuisine roumaine, ou tout autre type de repas, à la convenance du client. En effet, le vignoble possède un permis de restauration et a la capacité d'attabler 60 personnes (environ 150 autrement) à l'intérieur, et on ne parle pas des tentes qui peuvent accommoder de bien plus gros groupes au besoin. Il est également possible d'y effectuer une visite guidée ou encore, évidemment, une simple dégustation.

Concernant les repas, M. Radu a sa petite opinion là-dessus : « Naturellement, il n'y a rien comme les mets roumains pour se marier parfaitement avec les vins roumains. Le mélange est parfait! »

L'ESPRIT DE LA ROUMANIE
Parti non négligeable du succès de cette jeune entreprise après trois ans de dur labeur, la communauté roumaine n'hésite d'ailleurs pas à offrir son aide précieuse, particulièrement lors des périodes de la récolte et de la taille des vignes. À ces occasions, plus d'une cinquantaine de membres se rendent au vignoble, sans rien attendre en retour, exprimant d'une année à l'autre une solidarité inspirante et exemplaire (dans la grande région de Québec, la communauté roumaine compte environ 800 personnes, selon l'évaluation de Jorj Radu). Un bel avantage comparatif que ce fier roumain n'a certainement pas l'envie de perdre!

Avant de faire le saut au Canada il y a dix ans, Jorj Radu agissait comme directeur de la production d'une société roumaine de vins blancs et rouges, calvados, alcools et vinaigres et portait le titre de Maître de chai. Avant de devenir propriétaire du Vignoble Bourg-Royal, ce dernier a participé au développement de plusieurs produits pour d'autres vignobles, lesquels ont remporté plusieurs prix prestigieux. Une tradition qui se poursuit maintenant à Charlesbourg!

« En Roumanie, il est possible de faire jusqu'à 20 bouteilles avec une seule plante », explique-t-il. Bien que le climat d'ici se rapproche de celui de là-bas, il est impossible pour l'instant d'en faire autant. M. Radu désire tout de même extirper l'équivalent de 4 bouteilles par vigne, ce qui est largement supérieur à la moyenne locale. « Il faut aimer la vigne, la caresser, lui parler… bref, il faut connaître le domaine », explique celui qui compte 40 ans de métier et qui possédait un vignoble de 1 200 hectares en Roumanie, le 3e plus important de ce vaste pays de l'Europe orientale.

Dès sa première année d'opérations, en l'an 2001, le vignoble de Charlesbourg a produit 28 000 bouteilles. Pour 2003, on parle de 20 000. Les deux associés veulent atteindre une production de 60 000 bouteilles/an d'ici les trois prochaines années et ils estiment que leur vignoble a un potentiel de production pouvant atteindre 80 000 bouteilles. À titre de comparaison, la production québécoise annuelle se situe actuellement entre 200 000 et 250 000 bouteilles.

Le vignoble offre à sa clientèle cinq vins et cinq cidres différents. Afin de les récolter, M. Radu privilégie la méthode roumaine. Par exemple, il choisit la levure qui convient le mieux à chaque type de raisin; elle n'est jamais présélectionnée.

UNE PREMIÈRE MONDIALE: « L'ÂME DE DRACULA »
Le Vignoble Bourg Royal peut se vanter de compter dans ses rangs deux nouveautés mondiales. « L'Âme de Dracula » est en effet le seul vin de glace au monde obtenu à l'aide de canneberges. C'est à force de persévérance et de recherche que M. Radu est parvenu à faire fermenter la canneberge. Le petit fruit n'étant pas du tout reconnu pour son taux de sucre.

« Il n'y a presque pas de sucre dans la canneberge. C'est pourquoi il m'a fallu deux ans pour réussir à la faire fermenter. Le résultat se nomme L'Âme de Dracula puisque c'est le produit qui me rappelle le plus mon pays, la Roumanie. Vlad Dracule, véritable roi sur lequel est basée la légende de Dracula, a régné de 1347 à 1358 sur la Transylvanie, en Roumanie. »

Autre nouveauté mondiale sur place, un cidre léger et pétillant aromatisé aux canneberges, baptisé « Le Charmeur ». Où prend-t-il toutes ces idées? « Dans mon ordinateur privé », répond-t-il, plaçant un doigt sur sa tempe.

DÉJÀ DEUX PRIX EN DEUX ANS!
D'autres produits du vignoble n'ont d'ailleurs pas mis de temps à se faire connaître sur la scène internationale. Le cidre de glace « L'Esprit du Nord » s'est mérité une médaille au concours « Sélection mondiale 2002 ». Et en 2003, la Coupe d'argent de la Coupe des Nations a été décernée à « Larme rosée », un vin rosé aux arômes délicats de raisin frais. Selon M. Radu, le « Chevalier de Bourg Royal », un vin rouge sec, sera le prochain produit à se démarquer, dès 2004, assure-t-il. Il songe également à présenter à certaines compétitions un « champagne », mais il n'en est pas encore certain.

Et où peut-on trouver ses attrayants produits du terroir québécois enrichis d'une inestimable expertise roumaine? Malgré toutes ces récompenses, les produits du vignoble ne sont pas offerts sur les comptoirs de la Société des alcools du Québec. Les deux prix ont pourtant été remis par des dirigeants de la SAQ. M. Radu affirme avoir tout tenté pour faire accepter ses produits par la SAQ. « Soit ils m'ont dit que mes produits étaient trop différents, soit ils m'ont dit qu'ils ne rencontraient pas les critères de sélection. Comment peut-on remettre un prix à un produit pour ensuite affirmer qu'il ne rencontre pas les exigences? », s'interroge-t-il. « C'est absurde! »

« Je ne baisserai pas les bras. J'ai recommencé plusieurs fois à zéro dans ma vie et lorsque je suis venu au Québec, ce fut une fois de plus. J'espère seulement obtenir enfin une certaine reconnaissance de leur part », ajoute l'homme de 58 ans.

Les produits actuellement commercialisés du
Vignoble Bourg-Royal

Cinq vins :

Le Chevalier de Bourg-Royal, vin rouge sec à 11,5% alc./vol.
La Dame Blanche de Bourg Royal, vin blanc sec à 11,5% alc./vol.
L'Âme de Dracula, vin de glace de canneberge à 12,6% alc./vol.
Larme rosée, vin rosé à 11,5% alc./vol.
Le Trait Carré, vin blanc mousseux à 11,8% alc./vol.

Cinq cidres :

Le Chant aux pommes, cidre léger, pétillant, à 7% alc./vol.
L'Esprit du Nord, cidre de glace à 7% alc./vol.
Le Charmeur, cidre léger pétillant aromatisé à la canneberge.\
La Joie, crémant de pommes pétillant, à 3% alc./vol.
La Sérénade, cidre léger tranquille, à 7% alc./vol.

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L'entreprise offre sur place ses cidres, vins et vinaigres, mais aussi des services professionnels et de recherches scientifiques.

Jorj Radu, deuxième sur la photo, en compagnie des représentants de la Société des alcools du Québec (SAQ), lors de la remise de son prix « Sélection mondiale ».