EXCLUSIF Porte close pour ce marché de 8.5 MM $US L’État de New York a mis le Québec et l’Ontario sur sa «Black List» par
Daniel Allard
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Le
sujet du document qui confirme ce nouveau contexte commercial particulièrement
embarrassant est on ne peut plus clair: «Discriminatory Jurisdiction
List». Daté
du 20 octobre 2000 et émanant de Jeffrey A. Boyce, directeur de la
Division for Small Business du New York State Départment of
Economic Developpement et envoyé à tous les chefs et aux
personnels des agences, autorités publiques et corporations d’intérêts
publics de l’État de New York, le MEMORENDUM en question
a pour objet de faire savoir à chacun que le Québec et l’Ontario ont
été ajoutées à la «liste noire». Prenant
effet immédiatement, dit-il, le document officiel précise que dorénavant
la liste des «juridictions discriminatoires» doit inclure les suivantes:
les États de l’Alaska, d’Hawaï, de la Louisiane, du Montana, de la
Caroline du Sud, de la Virginie de l’Ouest et du Wyoming, ainsi que
les provinces canadiennes de l’Ontario et du Québec. Il
faut savoir que cette liste existait auparavant, mais que les provinces
canadiennes ne pouvaient pas y être incluses. Un long processus
d’amendement à la loi new-yorkaise a changé cette situation, de manière
à pouvoir inclure également des territoires hors des États-Unis.
C’est une initiative du Sénat de l’État de New York, amorcée
officiellement en avril 1999 par le sénateur DeFrancisco, qui a
conduit à rendre possible l’inclusion du Québec à cette fameuse
liste. La
section 165(6)(b) de la Loi sur les finances de l’État de New York
commande au Commissioner du Department of Economic
Development (DED) de préparer et de garder à jour une liste de
toute les «juridictions discriminatoires». Conséquemment, la Section
165(6)(d) de la même loi, ainsi que la Section 2879(5)(d) de la Loi de
l’État de New York sur les autorités publiques, interdisent («...prohibit
any...») à toute agence, autorité publique ou corporation d’intérêt
public de faire affaires («...from awarding a New York State
procurement contract to any bidder...») avec des entreprises dont la
principale place d’affaires est située sur le territoire d’une «juridiction
discriminatoire».
Pour
justifier cette décision, le MEMOREMDUM se borne à dire que: «The
Commissionner... has determined that good cause in shown... to add...
Ontario and Québec to the list...» «good
cause in shown... Dans
le communiqué de presse du 5 septembre 2000 confirmant la signature du
projet de loi par le Gouverneur de l’État, George E. Pataki, ce
dernier justifiait ainsi son approbation: «This bill will provide an
incentive for federal and regional governments of those nations to reform
their procurement laws so that New York firms will be able to compete on a
level playing field.» Le
Gouverneur soulignait, dans le même communiqué, qu’il estimait à plus
de 8,5 milliards $US annuellement les dépenses du gouvernement de l’État
de New York en achats de biens et de services de toutes sortes. C’est
donc à ce marché public d’environ 13 milliards $ canadiens qu’il
vient de fermer la porte pour les entreprises du Québec. RÉACTIONS
À QUÉBEC À
Québec, des gens d’affaires commencent à se soucier de l’impact négatif
de cette mesure sur les relations commerciales Québec-New York et
craignent un éventuel effet d’entraînement des États voisins. En
cette année 2001 qui verra le Québec organiser une opération charme
sans précédent dans l’État de New York, avec «La Saison du Québec
à New York» qui se met en branle dès août prochain, le «timing»
est également on ne peut plus contre-productif. Fin
février, le bureau de Bernard Landry a d’ailleurs été
officiellement saisi de cette affaire, par une lettre d’un cabinet
d’affaires gouvernementales et publiques de Québec. C’est la Délégation
générale du Québec à New York qui a informé ce dernier de
l’adoption récente de la loi par l’État de New York. C’est le ministère
de l’Industrie et du Commerce du Québec qui pilote ce dossier très
délicat depuis plusieurs mois. Le
point de vue de l’État de New York est que son propre marché public
est totalement ouvert, alors que dans le système du Québec, il demeure
possible d’éliminer des fournisseurs étrangers et, effectivement, il
arrive que le Québec le fasse. Pour
l’instant, on peut minimiser l’impact de cette mesure en considérant
que sur une base discrétionnaire, il reste toujours possible pour les
acheteurs publics new-yorkais de retenir des entreprises du Québec,
s’ils confirment qu’il est dans le meilleur intérêt de l’État
d’accepter une offre québécoise. («These sanctions may only waived
if the head of a state agency, public authority or public benefit
corporation determines that it is in the best interest of the State to do
so, and notifies the Commissioner of DED, in writing of that
determination.») Et il y
aurait déjà des cas d’applications de cette porte de sortie à
l’avantage de quelques entreprises en Ontario, qui avaient effectivement
les plus bas prix, qui se seraient matérialisés depuis l’entrée en
vigueur de cette nouvelle réglementation. Comment
chiffrer l’impact économique de ce conflit commercial avec l’État de
New York? Le Québec a-t-il plus avantage à garder son option de refuser
des offres d’acheteurs étrangers, plutôt que de se mettre au même
niveau que l’État de New York pour récupérer l’accès à ce marché
public majeur, au profit des entreprises québécoises? Landry et Pataki La
question est complexe, très complexe, et d’ailleurs assez sérieuse
pour que le premier ministre du Québec, Bernard Landry, aborde ce
sujet, lors d’une rencontre en tête-à-tête qu’il a eu avec le
gouverneur Pataki, à Montréal, justement dans le contexte d’une
conférence sur le projet de Zone de libre-échange des Amériques
(ZLÉA), tenue juste avant l’ouverture du 3iem Sommet des Amériques,
à Québec, le 20 avril dernier. *
* * Le
MEMORENDUM se termine par la phrase suivante: «Please contact Empire
State Development’s Division for Small Business at 1-518-292-5220 with
any question related to discriminatory jurisdiction requirements.» Si
ça vous intéresse de parler au loup d’une bergerie valant tout de même
plus de 8 milliards $US! |