La
Cité de l’optique grandit Gentec enfante Gentec-EO par Daniel Allard |
François
Giroux a un frère
plus jeune que lui, Michel; et l’entreprise pour laquelle il est le président,
Gentec, a maintenant elle aussi, en quelque sorte, un petit frère:
Gentec Électro-Optique inc. C’est
d’ailleurs Michel Giroux qui prend cette fois les commandes, en
tant que président et chef de la direction de la jeune entreprise spécialisée
dans la fabrication d’instruments de mesure de la puissance et de l’énergie
des faisceaux laser. Un vaste marché qui touche ici les lasers
industriels, médicaux, scientifiques et de télécommunication. Le
lancement officiel de ce nouveau membre de la Cité de l’optique de
Québec avait lieu le 27 mars dernier. Chose certaine, la croissance
de cette fameuse «Cité» fait déplacer des ministres. Pas moins de
trois ministres ont tenu à être présents lors de cette événement: le
ministre de l'Industrie et du Commerce Gilles Baril, le ministre de
la Justice et aussi responsable de la région de Québec Paul Bégin
et le Secrétaire d’État Sciences, Recherche et Développement du
gouvernement fédéral Gilbert Normand. Il est vrai que le montage
financier de la nouvelle entreprise fait largement usage des mécanismes
publics disponibles. Un
investissement de 2,3 millions $ d’Innovatech-Québec, du Fonds
de solidarité FTQ et du Fonds régional de solidarité FTQ Québec
a aidé à la mise sur pied de Gentec-EO dès sa naissance. De
plus, Investissement Québec, le Programme de financement des
petites entreprises du Canada (FPEC), ainsi que le Fonds de
diversification de l’économie de la Capitale et Développement
économique Canada (DEC) sont parmi les partenaires ayant permis
d’amasser le financement d’un autre million $ supplémentaire, qui
porte à 3,3M$ la valeur totale de l’initiative des deux frères Giroux. Dans
le cas de DEC, il s’agit d’une contribution remboursable de 200 000$
appuyant la réalisation d’une stratégie de commercialisation
internationale, pour aider l’entreprise à mieux se positionner sur les
marchés en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Ensemble, les deux
fonds de la FTQ ont versé 1,3M$, alors que l’apport consolidé des
trois organismes publics financés par le gouvernement du Québec totalise
1 542 000$. Gentec Électro-Optique a été constituée le 24 novembre
2000, en entité autonome, grâce à l’acquisition de 100% des actifs de
la division électro-optique - opérante depuis 1972 - de Gentec inc. Une
décision stratégique qui visait à favoriser son développement et son
financement. Surtout son financement, peuvent aujourd’hui se réjouir
les deux frères Giroux, qui tout compte fait n’avaient plus que 258
000$ à ajouter, soit un peu moins de 8% de l’argent, pour financer leur
projet de 3,3M$. La
naissance de Gentec-EO en tant qu’entreprise autonome est donc un très
bel exemple d’un montage financier diversifié, maximisant l’usage des
outils disponibles pour les entrepreneurs actifs au Québec, surtout dans
la haute technologie. Et ça marche! Créée
en novembre dernier avec 12 employés au départ, Gentec-EO en compte
actuellement 18 quatre mois plus tard, dont sept chercheurs, et planifie
atteindre 30 employés d’ici la fin de 2001. Et du côté du chiffre
d’affaires, la croissance s’annonce aussi rapide, puisqu’on pense
que l’actuel 1,9 million $, prévu pour cette année, passera à 8M$ en
2004. Un optimisme que Michel Giroux se permet d’afficher grâce à la
technologie de pointe unique au Canada développée par son entreprise et
la solidité financière de ses partenaires. UN
GROS MERCI AU CENTRE DE RECHERCHE POUR LA DÉFENSE VALCARTIER La
technologie de pointe dont il est ici question est en partie l’oeuvre
d’un autre partenaire important du réseau d’affaires de Gentec. Élément
très stratégique pour l’avenir, Gentec-EO se lance en aillant par
ailleurs conclu une entente de licence mondiale exclusive avec le Centre
de recherche pour la défense Valcartier (CRDV), pour un transfert
technologique en micro-fabrication de thermopiles en couches minces.
L’entente permet à Gentec-EO d’établir une capacité interne dans la
production industrielle des thermopiles en couches minces pour les lignes
wattmètres et joulemètres, deux instruments de mesures pour les sources
lasers. La thermopile en question est plus versatile, avec une plage
dynamique et une bande spectrale plus étendues. Gentec-EO reçoit le
design et les procédés relié à la fabrication, ainsi que le brevet des
méthodes de production. Officiellement,
c’est R et D pour la défense Canada, une agence du ministère de
la Défense nationale dont le chef de la direction est John
Leggat, qui effectue le transfert de la technologie mise au point au
CRDV, où travaillent 330 personnes, dont 220 chercheurs et techniciens,
à partir d’un budget annuel de 50M$ pour 2000-2001. Questionné
à savoir pourquoi il n’a pas installé son entreprise carrément sur le
territoire du Parc technologique du Québec métropolitain (PTQM),
coeur de la «Cité de l’optique de Québec» pourtant juste de
l’autre côté de l’autoroute Henri IV, Michel Giroux
n’a pas caché qu’il aurait bien voulu s’installer au PTQM:
«Mais lorsque nous avons regardé cette option, l’été dernier, c’était
50% plus cher que de louer ici, alors le choix s’est imposé de lui-même».
Il s’est donc installé, en février dernier, au 445 rue
Saint-Jean-Baptiste, bureau 160, voisin du PTQM et juste à l’ouest de
l’autoroute Henri IV qui ne l’empêche même pas de se rendre très
facilement au parc technologique, puisqu’un viaduc passe en dessous, à
300m de son bureau! DÉJÀ 4ième AU MONDE
Largement
exportés, les produits de Gentec-EO se vendent dans plus de 25 pays, chez
des clients comme Boeing, Intel, Lawrence Livermore
National Laboratory, NEC, Pratt & Whitney, Siemens,
Thomson et Toshiba. Même si les marchés qui sont visés
sont en forte croissance, le nombre d’entreprises qui se concurrencent
pour le conquérir sont étrangement très peu nombreuses. La
concurrence, Michel Giroux la connaît donc très bien. Et ce n’est pas EXFO.
«Nous sommes en concurrence avec EXFO seulement pour le recrutement de la
main-d’oeuvre spécialisée», répond-t-il mi-blagueur, mi-sérieux.
Les entreprises qui visent sa propre clientèle, ce sont essentiellement
trois sociétés des États-Unis (Coherent, Molectron, de
Portland en Oregon et Scientech, au Colorado) et, surtout, OPHIR,
les #1, selon-lui, qui sont à Jérusalem, en Israël. Où
situe-t-il Gentec-EO dans ce petit peloton? «L’entreprise israélienne
est en première position sans conteste. Nous, nous sommes actuellement au
4ièm rang, devant Scientech, qui est une petite entreprise...
mais nous serons bientôt 3ièm», prédit-il sans hésitation. Une
affirmation que ne contredira probablement pas Pierre-A. Bélanger,
un professeur de physique du Centre d’optique, photonique et laser
de l’Université Laval, rencontré sur place, qui a raconté une
anecdote qui avait tout pour plaire à l’équipe des frères Giroux: «Les
appareils de Gentec sont la référence dans notre milieu. Lorsque des
chercheurs s’obstinent sur des résultats de mesure, si nous disons que
ce sont des appareils de Gentec qui ont été utilisés, ça clos toujours
le débat, sur le champ. Ce sont des appareils toujours fiables et
constants», de conclure ce professeur. La
réputation déjà très affirmée de Gentec sera-t-elle le fondement de
la recette du succès que Michel Giroux tentera maintenant de concrétiser,
à la barre de sa propre entreprise? «Effectivement, nous avons choisi le
nom de Gentec-EO parce que le nom de Gentec signifie déjà quelque chose
de respecté sur le marché... Nous ne sommes pas des actionnaires de
Gentec, ni moi, ni mon frère, vous savez. Gentec appartient pour 2/3 à Placement
Marcel Lacroix et pour 1/3 à Odette Noiseux Giroux, notre mère»,
répond Michel Giroux. Pour Gentec-EO, c’est différent, les deux frères
Giroux sont à la fois les patrons et les propriétaires. «Et il n’y a
aucun lien entre les deux entreprises, même pas pour la commercialisation»,
assure-t-il. Parions
tout de même que, qu’importe les liens réels entre Gentec dans l’électronique
et Gentec-E0 dans l’électro-optique, le groupe-réseau Gentec de la
famille Giroux ne surprendra personne s’il enfante encore de nouveaux
succès d’affaires! |