Analyse de Jean-Paul Gagné
Les entreprises québécoises à l’étranger: «...le Québec a une performance plutôt médiocre»
(Extraits de la conférence de Jean-Paul Gagné, éditeur du journal Les Affaires,  le 15 février 2001, devant la Faculté des Sciences de l’administration de l’Université Laval, à titre d’invité de la Chaire Stephen Jarislowsky en gestion des affaires internationales)

«On m’a demandé de vous parler du dynamisme des entreprises et des entrepreneurs québécois à l’étranger. Le journal Les Affaires n’est pas implanté à l’étranger, mais le Groupe Transcontinental, auquel nous appartenons est présent aux États-Unis et au Mexique. Nous avons aussi quelques petites publications aux États-Unis et il est dans notre vision stratégique de nous attaquer à ce marché après avoir établi davantage notre présence au Canada anglais, où nous possédons une quinzaine de magazines et de journaux.

Un mot en passant sur le journal Les Affaires, qui est, de loin, la principale publication économique et financière au Québec, avec un tirage payé de 94 000 exemplaires, ce qui en fait un produit unique en Amérique du Nord, aucun autre hebdomadaire économique et financier régional n’ayant le tirage des Affaires. L’hebdomadaire économique et financier qui a le plus fort tirage en Amérique du Nord, après Les Affaires, est le Crain’s New York Business avec 65 000 exemplaires. Cela démontre que les Québécois ont un intérêt majeur pour l’économie et la finance et que notre produit répond aux attentes du marché.

Compte tenu que ce journal avait un tirage payé d’environ 25 000 copies quand j’y suis arrivé avec Claude Beauchamp au début des années 1980, c’est dire le chemin parcouru. Aux étudiants présents dans cette salle, je voudrais dire les possibilités de carrière intéressante qu’offre le journalisme en économie et en finance au Québec. Les médias souffrent d’une pénurie de bons candidats, ce qui explique en partie la faiblesse relative de l’information économique et financière au Québec. Or, la demande ne cesse d’augmenter avec le développement de nombreux sites d’information économique et financière dans Internet. La pression s’accroîtra encore quand on lancera le canal spécialisé LCN-Afffaires, qui sera consacré à l’économie et aux questions financières et qui a été récemment autorisé par le CRTC.

Mais revenons au sujet qu’on m’a assigné:

  • je vous ferai part de mes observations sur l’importance des entreprises québécoises à l’étranger;

  • je traiterai de certaines conditions de réussite à l’international;

  • et j’avancerai un certain nombre de mesures que les gouvernements doivent prendre pour améliorer la compétitivité de notre économie.

Bien entendu, qui dit succès à l’étranger, dit exportations. À cet égard, le Québec a une performance plutôt médiocre. De 1995 à 1999, l’augmentation moyenne des exportations québécoises de biens et de services a été de 7,2%, comparativement à 8,2% pour l’ensemble du pays. Le Québec a été dépassé pour la croissance des exportations par l’Ontario et l’Alberta, toutes les deux avec une progression de 9,5%, ainsi que par le Manitoba et par toutes les provinces maritimes.

C’est dans le secteur des marchandises que la croissance des exportations québécoises souffre le plus. En effet, celles-ci n’ont augmenté en moyenne que de 6,8% de 1995 à 1999, alors que la croissance des exportations de marchandises a été de 8% dans l’ensemble du Canada.

«...qui dit succès à l’étranger, dit exportations. À cet égard, le Québec a une performance plutôt médiocre»

Pour l’ensemble de cette période, le Québec a été dépassé pour les exportations de marchandises par l’Ontario et l’Alberta avec des taux de croissance de 9,2% chacune au cours des quatre dernières années, soit une progression de 35% supérieure à celle du Québec. Bien sûr, l’Ontario a fortement profité de la forte croissance des ventes de voitures en Amérique du Nord pendant cette période, ce qui a bénéficié grandement à son économie, qui repose largement sur la fabrication de pièces et de composants de véhicules et l’assemblage de voitures et de fourgonnettes. L’industrie de l’automobile compte pour 33% de toutes les exportations manufacturières du Canada (soit 120 milliards sur 360 milliards) et l’Ontario réalise au moins 90% de ces exportations. De même, l’Alberta a fortement bénéficié de l’augmentation des prix du pétrole et du gaz, qu’elle exporte aux États-Unis. Le Québec ne réalise que 19% des exportations canadiennes de biens, comparativement à 52% pour l’Ontario, une performance reliée directement à l’industrie automobile.

Les entreprises québécoises réussissent mieux dans les services, dont les exportations ont augmenté de 10,2% de 1995 à 1999, comparativement à 9,6% pour l’ensemble du pays. À nouveau, l’Ontario fait mieux que le Québec avec une croissance moyenne de 11,7%, mais la championne est l’Alberta avec une augmentation de 13,2% de ses exportations de services. Contrairement à ce qu’on peut penser au premier abord, l’Alberta, qu’on connaît davantage pour ses ressources naturelles, exporte autant de services que le Québec toute proportion gardée. Encore une fois, c’est l’Ontario qui domine l’exportation de services avec une part de 50% de toutes les ventes de services canadiens à l’étranger, comparativement à une part de 38% de la population canadienne et à une part de 42% du PIB canadien. Le Québec a une part de seulement 19% des exportations canadiennes de services, comparativement à une part de 24% de la population canadienne et une part de 22% du PIB canadien.

ANALYSE DÉTAILLÉE DES FORCES ET DES FAIBLESSES DES ENTREPRISES DU QUÉBEC À L’ÉTRANGER

Malgré une performance insatisfaisante au niveau des données globales, le Québec figure très bien dans certains secteurs et pas seulement dans ceux qui sont associés aux ressources naturelles. Par exemple, il est très intéressant de constater que le Québec réalise près de 50% des exportations canadiennes de produits de haute technologie. Il s’agit principalement des secteurs de l’aéronautique, du matériel électronique et de communications et des produits pharmaceutiques.

La croissance annuelle moyenne des exportations de produits de haute technologie a été de 12% depuis 10 ans. Cette croissance s’est même accélérée en 1999 avec une progression de 15%. Ainsi, depuis 1990, la croissance annuelle moyenne des exportations a été de 10% dans les technologies de l’information et les télécommunications, de 15% dans l’aérospatiale et de 17% dans le bio-pharmaceutique. Les exportations dans ces secteurs sont tellement fortes que celles-ci représentent de 80 à 90% de la valeur de la production de ces industries. Plus de 80% de ces exportations viennent de la région de Montréal.

Le Québec est très fort dans l’aéronautique, où il est responsable de 66% des exportations canadiennes de ce secteur et de 80% des exportations canadiennes d’avions. L’exportation d’avions est l’affaire de Bombardier. Le Québec exporte aussi des moteurs d’avions avec Pratt & Whitney et des services d’entretien et de réparation de moteurs d’avions avec Rolls-Royce (fabrique aussi des turbines à gaz des fins énergétiques), des hélicoptères avec Bell Hélicoptères et des trains d’atterrissage avec Héroux et Messier-Dowty.

Un autre secteur fort est celui du matériel électrique et électronique et des équipements de communication, où le Québec réalise 31% des exportations canadiennes, grâce à des géants comme Nortel, Ericsson, IBM, General Electric, Alstom, Harris, Mitel, CAE (simulateurs de vols), mais aussi grâce à des sociétés de moindre envergure, mais très dynamiques, comme C-Mac (circuits imprimés), Matrox (cartes graphiques), SR Telecom dans le sans fil, Exfo dans les appareils de mesure de la fibre optique, ITF dans les multiplexeurs, Positron, Eicon, MPB (lasers), Memotec et des centaines d’autres.

Dans le secteur de la santé, le Québec fournit à l’étranger 30% des exportations canadiennes de produits pharmaceutiques et 27% des instruments de mesure de médecine et d’optique. À part Biochem Pharma, les exportations québécoises de produits pharmaceutiques sont surtout faites par des sociétés étrangères. Biochem, le fleuron de la biotechnologie canadienne, a décidé de participer à la consolidation de son industrie en se vendant à la société britannique Shire Pharmaceuticals, plutôt que de se lancer elle-même dans les acquisitions. Cette décision est très mal reçue dans l’industrie.

Un beau succès à l’international d’une petite entreprise québécoise du secteur de la santé est Electromed de Saint-Eustache, qui exporte des systèmes d’imagerie cardio-vasculaire aux États-Unis et en Europe. Le Québec est également très présent dans l’exportation de services de recherche clinique avec MDS, ClinTrials BioRecherches et Quintiles Canada, qui ne sont toutefois pas des entreprises à capital québécois.

Toutefois, le Québec est très sous-représenté dans les secteurs de moyenne haute technologie comme les véhicules, la machinerie, la chimie, etc., où il ne fait que 7% des exportations canadiennes.

Par contre, le Québec s’affirme de façon marquée dans le secteur de moyenne faible technologie, où il obtient 30% des exportations canadiennes. Ainsi, le Québec réalise plus de 50% des exportations du Canada dans les métaux non-ferreux avec des joueurs comme Alcan, Alcoa, Noranda, Norsk Hydro, Péchiney et d’autres, qui sont très majoritairement des sociétés à capitaux canadiens ou étrangers. Nous avons aussi une très bonne performance dans les industries du plastique et du caoutchouc, où nous réalisons près de 30% des exportations canadiennes avec des sociétés comme que Waterville TG et Thona, qui fabriquent des produits de caoutchouc pour l’industrie de l’automobile en Estrie, ainsi que Camoplast, le Groupe Royal et IPL, qui fabriquent des produits de plastique pour l’industrie automobile, la construction et de nombreuses autres industries.

De plus, le Québec est également très fortement sur-représentée à l’exportation dans les textiles et les vêtements avec 55% des exportations canadiennes de ce secteur. Nous réussissons dans ce secteur très concurrentiel parce que nous produisons de plus en plus de produits de qualité et parce que nous les fabriquons avec les dernières technologies, ce qui est le cas de plusieurs manufacturiers de vêtements pour hommes et de lingerie et de produits spécialisés divers, comme des vêtements pour les sports d’hiver, des costumes de bain (Christina et Shan), plusieurs produits de tricots et même des T-shirts avec Gildan, qui possède aussi plusieurs usines à l’étranger. La mode québécoise, qui a décliné pendant des décennies, connaît un regain de vie, grâce à la créativité de plusieurs designers québécois et québécoises et au dynamisme d’intervenants du secteur, tel le Collège LaSalle, qui exploite plusieurs écoles de mode en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique et en Amérique du Sud.

Le secteur en tête des exportations du Québec est celui du matériel de transport, dont fait partie l’aéronautique et où le Québec est néanmoins sous-représenté globalement à cause de la concentration de l’industrie automobile en Ontario. Avec moins de 5% des exportations canadiennes de produits automobiles, le Québec est fortement sous-développé dans cette industrie, où il ne compte qu’une usine d’assemblage d’automobiles (GM à Boisbriand), une usine d’assemblage de camions (Paccar, également à Boisbriand) et quelques usines de pièces et de composants pour véhicules, qui appartiennent généralement à des sociétés étrangères, tels le fabricant de culasses Montupet de Rivière-Beaudette, Waterville TG et Thona. À part Spectra Premium, qui fabrique des réservoirs d’essence de radiateurs de remplacement, Mégatech, qui fait des composants électroniques pour les tableaux de bord et Camoplast et IPL, qui font des composants de plastique, il y a peu de fabricants à capital québécois d’une certaine envergure et qui exportent dans cette industrie.

Toujours dans le matériel de transport, nous exportons aussi des wagons passagers, des motoneiges et des motomarines avec Bombardier, des autocars et des véhicules récréatifs motorisés avec Prévost de Saint-Claire et les Industries Dupont, de Québec, de même que des wagons de chemin de fer et des locomotives refaites à neuf avec Alstom dans le centre sud de Montréal.

À part Bombardier, l’importante présence du Québec dans le matériel de transport est surtout imputable aux filiales d’entreprises étrangères. Le fer de lance de l’entrepreneurship québécois dans ce secteur est incontestablement Bombardier, qui est le troisième plus important fabricant mondial d’avions après Boeing et Airbus, ce qui est une réussite remarquable, compte tenu de sa présence relativement récente dans ce secteur. Bombardier a des usines dans 12 pays, emploie 56 000 personnes et ses revenus proviennent à 90% de l’étranger. De plus, si l’offre d’achat d’Adtranz Rail Systems d’Allemagne, le plus important fabricant européen de matériel de transport en commun sur rail avec 22 000 employés et des usines dans 19 pays, est approuvée, Bombardier deviendra incontestablement le plus important manufacturier dans ce domaine au monde...

L’industrie du bois est dominée à l’exportation par le papier et le bois d’oeuvre, des produits qui sont expédiés principalement aux États-Unis, mais aussi en Europe et même en Asie. Le secteur du meuble s’illustre de belle façon avec un grand nombre d’entreprises qui exportent surtout aux États-Unis, telle Shermag, mais aussi dans plusieurs autres pays, notamment en Europe, en Amérique du Sud, au Moyen-Orient et même en Asie, comme le font les Industries de la Rive-Sud, Dorel, Amisco, le Groupe Lacasse, Elran, Jaymar, Dutailier, Roy et Breton, Bestar et plusieurs autres. Sauf quelques exceptions comme Dutailier et Dorel, peu d’entreprises québécoises de meubles fabriquent à l’étranger. Certaines, comme Shermag et les Industries de la Rive-Sud, qui s’étaient aventurées aux États-Unis ont rebroussé chemin, ayant compris que la faiblesse du dollar canadien était leur plus important avantage concurrentiel et qu’il n’était pas facile de fabriquer aux États-Unis, notamment à cause des problèmes de main-d’oeuvre. Malgré la fermeture récente d’une usine en Arkansas, Dorel reste toutefois très présente à l’étranger avec des usines dans neuf pays. Le Québec réalise 22% des exportations canadiennes dans les produits du bois, une proportion qui a doublé depuis 1990 grâce à l’accord de canado-américain de libre-échange et à la baisse de la devise canadienne.

Dans les pâtes et papiers, Cascades, la compagnie des frères Lemaire, est probablement la papetière canadienne la plus présente à l’étranger avec des usines aux États-Unis, en France, en Suède et en Allemagne. Les Produits forestiers Alliance ont aussi une usine en Alabama et Domtar retourne aux États-Unis, après y avoir vendu ses usines de matériaux de construction, avec l’achat l’an dernier d’un important distributeur de papiers fins. Elle projette aussi l’achat d’un fabricant de papiers fins qui doublerait sa taille.

L’entrepreneurship québécois à l’étranger s’illustre aussi dans l’acier, avec Canam Manac qui exploite une dizaine d’usines de fabrication de poutrelles aux États-Unis, au Mexique et en France ainsi que des centres de conception par ordinateurs de structures d’acier de bâtiments en Roumanie et en Inde, de même qu’avec le Groupe ADF, qui exporte des structures d’acier aux États-Unis et qui a réalisé des projets dans une dizaine de pays.

Le Québec exporte également des équipements d’articles de sport, tels des patins (Sports Maska et Bauer-Nike), des batons et de l’équipement de hockey (Sport Maska et Sherwood Drolet), des bicyclettes (Procycle), de l’équipement pour les cyclistes (Louis Garneau), des lunettes et des visières (Industries Leader) et des jouets et des jeux, secteur où on réalise la moitié des exportations canadiennes. À l’exception de la fabrication de patins, cette industrie appartient surtout à du capital québécois.

Parmi les grandes entreprises industrielles contrôlées au Québec et qui sont très actives à l’international, Quebecor est, avec Bombardier, l’une de celle qui se démarque le plus. Quebecor est maintenant le plus important imprimeur au monde et aux États-Unis et un des plus importants acteur européen dans ce domaine. Elle est aussi présente en Amérique du Sud. Son grand rival canadien, Transcontinental, exporte des services d’imprimerie aux États-Unis, où elle exploite également des ateliers d’impression. Transcontinental possède aussi deux usines au Mexique et deux usines de pressage de disques compact aux États-Unis. Le Québec figure très bien dans le secteur de l’imprimerie, de l’emballage et de l’édition avec 30% des exportations canadiennes.

Une autre grande entreprise montréalaise s’illustre brillamment aux États-Unis. Il s’agit du Canadien National qui est devenu, sous la direction de Paul Tellier, la société ferroviaire nord-américaine à avoir les coûts d’exploitation les plus faibles en proportion de ses revenus. Le réseau du CN descend maintenant jusqu’à Monterrey au Mexique en passant par la vallée du Mississipi grâce à l’acquisition de l’Illinois Central et d’ententes passées avec le Kansas City Southern. Si l’offre d’achat récente du Wisconsin Central est acceptée, le CN pourra, grâce aux ententes récentes et à venir avec Burlington Santa Fe, étendre ses tentacules dans l’ouest des États-Unis et disposer d’une des plus importantes toiles de voies ferrées en Amérique du Nord.

Pour compléter ce tour d’horizon, il est intéressant de constater que le Québec réalise 53% des exportations canadiennes de marchandises en France, que sa part des exportations canadiennes atteint 37% en Allemagne, 36% en Irlande, 35% aux Pays-Bas, 30% en Espagne, 28% au Royaume-Uni et qu’il obtient même des pourcentages aussi élevés et même plus dans plusieurs pays de moindre importance comme la Finlande, l’Arabie saoudite, l’Afrique du Sud et la Colombie. Le Québec ne réalise que 18% des exportations canadiennes de marchandises aux États-Unis, qui sont dominées par le secteur de l’automobile. Toutefois, dans les secteurs autres que l’automobile, le Québec réalise environ 26% des exportations canadiennes aux États-Unis, ce qui est supérieur à sa part de 22% du PIB canadien.

Par contre, le Québec est faible dans l’exportation de produits alimentaires. Il exporte surtout de la poudre de lait, du beurre, de fromages, de produits de charcuterie (notamment par le Groupe Brochu-Lafleur), de la viande de porc (Olymel et d’autres), des boissons et certaines originalités, comme les levures Lallemand partout à travers le monde, le sirop d’érable (surtout aux États-Unis) et le lait de longue conservation de Lactel. L’entreprise québécoise qui s’impose le plus à l’étranger est le Groupe Saputo, qui exploite plusieurs usines de fromage aux États-Unis. De leur côté, les Industries Lassonde exploite une usine de jus d’agrumes en Chine.

Le Québec exporte assez peu de machinerie, mais réalise des percées intéressantes avec certains secteurs, dont l’équipement forestier avec Denharco, Forano et les Industries Tanguay, l’équipement pour scieries avec Comact, l’équipement pour l’industrie des pâtes et papiers avec le Groupe Laperrière-Verreault, les valves industrielles avec Velan, de Saint-Laurent, qui est un leader mondial et qui exploite plusieurs usines à l’étranger, l’équipement de récolte et d’emballage de tourbe avec les Tourbières Premier de Rivière-du-Loup et les systèmes de sécurité avec Unican de Montréal, qui en train d’être vendus à des intérêts suisses. Nous avons aussi un certain nombre de fabricants d’outillage spécialisé qui exportent, mais leur volume d’affaires à l’étranger est modeste.

Parmi les originalités, mentionnons l’exportation de baignoires jusqu’en Asie par Maax de Sainte-Marie, d’orgues en bois pour les églises par Casavant, de Saint-Hyacinthe, de produits de menuiserie d’architecture par Ebénisterie Beaubois de Saint-Georges, de guitares acoustiques par Lasido, de Baie d’Urfé, et de chariots d’épicerie par Cari-All, qui a aussi plusieurs usines à l’étranger.

Dans le domaine des services, c’est le secteur du génie conseil qui réussit le mieux à l’exportation avec plusieurs firmes qui font autant ou même plus de revenus à l’étranger qu’au Canada. C’est le cas de  SNC-Lavalin, Dessau-Soprin, Tecsult, Roche, Cima+, du Groupe SM, d’Agra (Monenco) et du Groupe RSW pour ne nommer que ces firmes. Plusieurs d’entre elles exportent aujourd’hui l’expertise qu’elles ont acquise sur les grands chantiers d’aménagement hydroélectrique sur les rivières de la Côte-Nord et à la Baie James. SNC-Lavalin est aussi un leader mondial de l’ingénierie d’usines d’aluminium, ayant à son actif plusieurs alumineries dans plusieurs pays, dont le Canada, l’Australie, l’Afrique du Sud, le Mozambique et le Bahreïn.

Le secteur de l’informatique est un autre domaine où le Québec exporte son expertise, mais le résultat est y moins spectaculaire que dans le génie conseil. CGI est surtout présente aux États-Unis, alors que LGS, devenue une division d’IBM, l’est surtout en Europe. DMR, qui appartient maintenant à Fujitsu, a des activités aux États-Unis, en Europe et en Australie.

Le Québec compte également plusieurs fabricants de logiciels, qui exportent leurs produits à l’étranger, mais ceux-ci se retrouvent dans des créneaux relativement étroits. Comme DMR et LGS, les deux joyaux des logiciels d’animation en trois dimensions, Softimage et Discreet Logic, appartiennent maintenant à des intérêts américains. UbiSoft, qui fabrique des jeux en trois dimensions, est une propriété française.

Un des succès les plus spectaculaires à l’étranger est le Cirque du Soleil, qui a la capacité de se produire sur plusieurs scènes sur plusieurs continents.

Dans le commerce du détail, une grande réussite est l’implantation du Groupe Jean Coutu aux États-Unis, où plusieurs entreprises canadiennes, dont Canadian Tire, ont déjà échoué. Le Groupe Jean Coutu y réalise maintenant la moitié de son chiffre d’affaires avec un réseau de 242 pharmacies corporatives et d’autres acquisitions sont en vue. Une autre compagnie de détail, Tristan & America, a ouvert quelques magasins dans l’est des États-Unis, dont l’un au Rockefeller Center, à Manhattan. C’est une aventure risquée, qui se poursuit grâce à la détermination à toute épreuve de son propriétaire, Gilles Fortin. Une autre marque d’audace dans ce secteur est l’implantation par Suzy Shier d’un réseau de magasins de lingerie La Senza en Arabie Saoudite et au Koweit, au coeur du monde musulman.

Dans le secteur financier, le groupe le plus présent à l’étranger est Power Corporation qui détient d’importants intérêts en Europe à travers sa participation dans Pargesa, laquelle est actionnaire de nombreuses entreprises dans plusieurs secteurs, dont les communications, l’électricité, les produits pétroliers, la gestion des déchets et, depuis peu, dans l’édition avec Bertelsmann. Malgré sa taille impressionnante, le Mouvement Desjardins est très peu présent à l’étranger, sa participation se limitant à la coopération dans des pays en développement. Avant son achat par Desjardins, le Groupe La Laurentienne avait fait des acquisitions aux États-Unis et en Angleterre, mais ces filiales furent revendues par Desjardins en raison des difficultés rencontrées.

CONDITIONS DE RÉUSSITE À L’ÉTRANGER

La présence relativement faible des entrepreneurs québécois à l’international s’explique surtout par des raisons culturelles. Plusieurs entrepreneurs québécois francophones sont plutôt craintifs quand il s’agit de prospecter et d’attaquer les marchés étrangers. De façon générale, ils ne sont pas assez internationalisés. Pourtant, cela est aussi possible dans la vieille économie que dans le nouvelle. Ainsi, quand Marcel Dutil a fondé les Aciers Canam, il s’est tout de suite tourné vers le marché américain. «Je suis allé à Boston avant d’aller à Montréal», m’a-t-il déjà raconté. Pour lui, il était donc normal de considérer tout autant le potentiel de marché de la Nouvelle-Angleterre pour ses poutrelles d’acier que celui de la région de Montréal. Marcel Dutil vient d’une famille d’industriels ouverts sur l’étranger, ce qui n’est pas le privilège de beaucoup d’entrepreneurs québécois.

En général, les entrepreneurs de la nouvelle économie sont davantage bilingues et plus ouverts sur le monde, ce qui les amène à lancer leur entreprise sur la scène mondiale. Exfo en est un bon exemple. Bien entendu, aucune entreprise de la nouvelle économie ne peut espérer survivre sans considérer la planète comme son marché.

Voilà pourquoi, il est capital que les universités se dotent de programme comme «Cap sur le monde» pour préparer les étudiants à l’international, notamment par des échanges d’étudiants avec des institutions d’autres pays, et qu’elles obligent les étudiants à maîtriser au moins une deuxième langue. Le système d’enseignement français est supérieur au nôtre à cet égard puisque les jeunes étudiants sont encouragés à faire l’apprentissage non pas d’une, mais de deux langues étrangères.

Si on se propose d’aller à l’étranger, il va de soi que le marché doit être étudié à fond, que les hypothèses en termes de coûts d’implantation, de gestion et de revenus doivent être les plus conservatrices possibles. Il y a toujours plus d’imprévus à l’étranger que dans son pays d’origine. Gilles Fortin, propriétaire de Tristan Amérique, me racontait que l’installation de son magasin de New York lui avait coûté plus du double d’une implantation semblable à Montréal.

Avant son entrée en Nouvelle-Angleterre, Jean Coutu avait vu à ce que son fils Michel étudie et travaille dans cette région. Il était également important pour Jean Coutu que l’entrée dans le marché américain commence dans une région proche du Québec afin de faciliter les communications et les déplacements de personnel entre le siège social de Longueuil et  celui de la filiale américaine, qui a été établi au Rhode Island. De même, Jean Coutu y a transposé ses propres systèmes d’information de gestion, ce qui lui permet de suivre à distance l’évolution des revenus et des dépenses ainsi que la gestion des approvisionnements et des stocks.

De son côté, quand Transcontinental a décidé de regarder le marché mexicain, il a demandé à une firme de consultation réputée de dresser l’inventaire de tous les imprimeurs mexicains avec leurs caractéristiques respectives. La compagnie ciblée et choisie a été celle qui présentait les meilleures chances de succès. Elle était le principal imprimeur de circulaires de la région de Mexico, qui était précisément le marché visé par Transcontinental, et elle était en voie de passer à la deuxième génération, dont les principaux représentants étaient de jeunes diplômés en administration et en génie d’universités américaines, ce qui devait permettre d’atténuer le choc culturel. Néanmoins, Transcontinental a envoyé un gestionnaire expérimenté pour prendre la direction des activités mexicaines afin de ne pas perdre le contrôle sur la nouvelle filiale et transmettre certains éléments de la culture de l’acquéreur. C’est également ce que fait Cascades, dont les filiales à l’étranger sont dirigées par des Québécois connaissant bien la culture de l’entreprise.

Par ailleurs, sur un plan plus commercial et technologique, un grand nombre d’entreprises québécoises de taille moyenne qui vendent à de gros distributeurs, détaillants ou fabricants étrangers devront s’adapter rapidement au phénomène du commerce électronique si elles veulent se développer et survivre. Contrairement à l’échange électronique de données, qui est essentiellement un lien entre deux ordinateurs, le commerce électronique exige une intégration des systèmes de gestion du fournisseur et de ceux des entreprises clientes. Il ne s’agit plus ici de créer un petit système de plus pour approvisionner tel ou tel gros client comme on le faisait avec l’EDI, mais au contraire de mettre en place une infrastructure intégrée de gestion de l’information et des systèmes de gestion et de communication capables de servir efficacement plusieurs clients à la fois. Pour les PME, ce nouveau mode de transaction pourra nécessiter des investissements importants.

Selon une étude récente de ScienceTech Communications, seulement 3 000 entreprises québécoises, soit 6% des entreprises de 10 employés et plus, font du commerce électronique. Plusieurs exportateurs québécois de moyenne importance négligent de franchir l’étape du commerce électronique en espérant que ce phénomène ne les atteigne que dans plusieurs années et en se disant qu’ils traverseront la rivière lorsqu’ils y seront arrivés. Ils jouent avec le feu, car les Wal-Mart, les Sears, les GE et les autres grands donneurs de commandes mettent présentement en place les infrastructures technologiques qui leur permettront de s’approvisionner électroniquement. Ils n’attendront pas les fournisseurs retardataires s’ils peuvent se passer d’eux.

Le commerce électronique n’est pas une mode. Il s’agit plutôt d’un nouveau mode de distribution, qui, pour certaines entreprises, procure un avantage concurrentiel important. Même si cette façon de faire connaît des ratés, principalement dans le commerce de détail, il est certain que les affaires électroniques s’imposeront dans de nombreuses industries grâce aux développements technologiques qui le rendent possible et à la mondialisation de l’économie.

Les entrepreneurs et les gestionnaires doivent également reconnaître que la mondialisation de l’économie est un phénomène irréversible à cause des bénéfices qu’elle procure et qui sont bien supérieurs à ses inconvénients. Ces bénéfices sont des coûts de production plus faibles grâce à une meilleure utilisation des avantages concurrentiels des différents pays, donc des prix plus bas pour les consommateurs et les entreprises qui achètent de l’équipement et des intrants. C’est aussi moins d’inflation, une meilleur protection du pouvoir d’achat, une croissance économique plus régulière et des taux d’intérêt plus faibles et plus stables.

De plus, la mondialisation permet de  créer des emplois et de la richesse dans les pays en développement, qui, de cette façon, accroissent leur revenu et deviennent ainsi de meilleurs clients pour les pays développés.

Certes, la mondialisation rencontre une vive opposition comme on l’a vu à maintes reprises depuis la rencontre de l’OMC à Seattle à l’automne 1999 et comme on le verra sans doute bientôt au Sommet des Amériques à Québec. Le mouvement anti-mondialisation est alimenté par des groupes d’intérêt puissants, tels des organisations agricoles protectionnistes, particulièrement en Europe, de gros syndicats américains, des groupes écologistes et certains activistes, comme l’avocat des consommateurs Ralph Nader, qui fut candidat à la présidence des États-Unis, et Jeremy Rifkin, auteur de La fin du travail.

Ceux-ci attaquent le phénomène de la mondialisation pour les raisons les plus diverses : protéger leurs marchés et leurs emplois, combattre le développement de l’économie de marché, l’influence des multinationales et les fusions de grandes sociétés, défendre la couche d’ozone, combattre le travail des enfants, etc. Curieusement, on s’attaque violemment au développement  et à l’utilisation des biotechnologies dans le secteur agroalimentaire, mais on bénit leur développement et leur progrès dans le secteur de la santé. L’industrie a du travail à faire pour se faire mieux comprendre.

Naturellement, la mondialisation de l’économie a aussi ses effets pervers : une concurrence plus meurtrière pour les économies non compétitives, pour les entreprises non performantes et pour les travailleurs sans formation. Bien entendu, plusieurs pays en développement ont une trop grande tolérance face à l’exploitation des travailleurs et face à la pollution, à cause de l’absence de normes appropriées pour assurer le respect des droits de la personne et la protection de l’environnement. Ces problèmes sont souvent reliés à l’absence de traditions démocratiques dans ces pays et à la corruption de leurs dirigeants.

Tout compte fait, je reste convaincu que la mobilité du capital, la diffusion de l’information et la disponibilité des technologies que la mondialisation rend possible partout à travers le monde contribuent à accroître le bien-être des populations et favorisent les changements politiques. La révolution politique et économique qui se produit en Europe de l’Est en est une manifestation évidente.

Bien sûr, la mondialisation augmente la concurrence et nous oblige, comme société, à être plus compétitif, ce qui est un défi colossal. Malheureusement, on ne semble pas prendre au sérieux au Canada l’importance de cette concurrence accrue. La forte croissance de nos exportations aux États-Unis, qui atteignent maintenant 80% de nos exportations totales, résulte bien davantage de la perte de 35% de la valeur du dollar canadien depuis 25 ans que des efforts qui ont été fait pour améliorer notre compétitivité.

Évidemment, aucun exportateur ne se plaindra de la faiblesse du huard. Réalisons toutefois que la faible valeur de notre monnaie nous fait payer plus cher les produits importés (les automobiles, les ordinateurs, les logiciels, les produits électroniques, les vêtements, les chaussures et les fruits et légumes l’hiver) ainsi que les voyages à l’étranger. Il en va de même pour les équipements et la machinerie que nos entreprises achètent en grande quantité à l’étranger.

La valeur d’une monnaie, c’est le pouvoir d’achat d’un pays. Or, un pays qui perd son pouvoir d’achat s’appauvrit. Nous devenons ainsi moins cher pour les autres, ce qui favorise l’achat des entreprises canadiennes par des sociétés étrangères. Selon John McCallum, jusqu’à récemment économiste en chef de la Banque Royale et récemment élu député libéral fédéral dans un comté du nord de Toronto, le revenu moyen des Canadiens est passé de 74% de celui des Américains en 1989 à 61% en 1999. Il pourrait tomber à 50% en 2010.

«...alors que, de 1995 à 1999, la productivité par travailleur
a augmenté en moyenne de 2,5% par année aux États-Unis,
la nôtre ne s’est accrue que de 1,3%»

Les causes du manque de compétitivité de l’économie canadienne sont multiples. Tout d’abord, notre fardeau fiscal est beaucoup plus élevé que celui des États-Unis; ensuite, notre productivité croît beaucoup plus lentement que celle des États-Unis; alors que, de 1995 à 1999, la productivité par travailleur a augmenté en moyenne de 2,5% par année aux États-Unis, la nôtre ne s’est accrue que de 1,3%. Dans le secteur manufacturier, la production par heure travaillée des entreprises canadiennes, qui était de 90% de celle des entreprises américaines en 1977, était descendue à 72% en 1998. De plus, le taux moyen de croissance des investissements en machinerie et en équipements des entreprises canadiennes a été, depuis 1993, de 2,5 points de pourcentage inférieur à celui des entreprises américaines. Par contre, la croissance de notre productivité s’accélère depuis l’an passé, ce qui permet d’espérer un certain rattrapage.

En outre, malgré les encouragements fiscaux des gouvernements canadiens pour stimuler la recherche appliquée et l’innovation dans les entreprises canadiennes, celles-ci investissent beaucoup moins en ce domaine que les sociétés américaines.

Autre facteur, l’économie canadienne est beaucoup plus réglementée que l’économie américaine.

Tout cela explique pourquoi nous nous appauvrissons par rapport aux États-Unis. Alors qu’après la seconde guerre mondiale, le Canada et les États-Unis avaient des niveaux de vie semblables, plusieurs provinces canadiennes viennent maintenant loin derrière plusieurs états américains pour le revenu familial disponible médian exprimé en parité de pouvoir d’achat. Alors que l’Ontario arrive au 17e rang et que l’Alberta se classe au 25e rang, on retrouve les cinq provinces les plus à l’est entre les 51e et 60e rang de ce palmarès de 61 états américains et provinces canadiennes. Le Québec vient au 57e rang, devant la Saskatchewan, le Montana, Terre-Neuve et l’Arkansas.

DÉFIS POUR LES ENTREPRISES

Puisque nous ne pouvons pas stopper la mondialisation et qu’il serait suicidaire de l’ignorer, c’est l’évidence même que nos entreprises doivent devenir plus compétitives. Elles doivent donc investir davantage dans les nouvelles technologies et en recherche et développement, moderniser davantage leurs équipements de production et encourager l’innovation.

Elles doivent aussi s’ouvrir davantage à l’international. Leurs dirigeants doivent savoir ce qui se passe dans leur industrie partout à travers le monde, notamment en faisant de la veille technologique et concurrentielle, en visitant des salons et en participant à des conférences et à des missions à l’étranger. Grâce aux millions de pages d’information qu’il renferme, Internet est un outil de premier ordre pour observer ce qui se passe dans le marché et même chez les concurrents. Le concurrent d’aujourd’hui n’est plus dans la ville voisine, mais à l’autre bout du monde.

En réduisant les impôts des particuliers et des entreprises de 100 milliards de dollars en cinq ans, le dernier budget fédéral a posé un geste approprié pour décourager la fuite des cerveaux aux États-Unis, mettre plus d’argent dans les poches des citoyens, diminuer les coûts des entreprises et rendre l’économie canadienne plus concurrentielle. Cette mesure est d’autant plus appropriée que le nouveau président américain projette de réduire le fardeau fiscal des Américains de 1,6 trillion de dollars US (soit 2 400 milliards de dollars canadiens), ce qui risque d’annuler l’effet de la réduction des impôts fédéraux sur la compétitivité de notre fardeau fiscal par rapport à celui des États-Unis. Le Canada a déjà le plus haut fardeau fiscal des particuliers parmi le G7. Ses impôts sur les profits sont également parmi les plus élevés.

De leur côté, nos gouvernements doivent déréglementer l’économie, notamment dans le secteur du travail, où on encourage davantage la syndicalisation qu’aux États-Unis et en Ontario et où on décourage la sous-traitance.

Il faudra aussi réduire la taille de l’État, notamment en privatisant et en impartissant des activités gouvernementales. L’État compte pour 46% de l’économie canadienne, comparativement à 34% aux États-Unis. Or, plusieurs études ont démontré que plus un État est gros, plus sa croissance économique est faible. La taille de l’État est en baisse en Angleterre, en Irlande et en Nouvelle-Zélande, pays qui ont tous amélioré leur croissance économique et leur niveau de vie de façon importante depuis.

«La Ville d’Indianapolis
a économisé un milliard $ en 7 ans
à la suite de la privatisation
de 80 activités»

La Ville d’Indianapolis a économisé un milliard de dollars en sept ans à la suite de la privatisation de 80 activités. Même les fonctionnaires municipaux ont créé leurs propres entreprises pour soumissionner sur des appels de propositions de la Ville. Pour montrer les avantages de la privatisation, Indianapolis a réinjecté ce milliard dans de nouveaux services pour les citoyens. Imiter Indianapolis à l’échelle de la province permettrait de créer des milliers d’entreprises qui seraient autrement plus efficaces que les gouvernements et les grosses municipalités que Québec vient de créer et dont les taxes augmenteront.

Il faudra aussi investir davantage en éducation à tous les niveaux, mais surtout dans les universités, car la connaissance est à la base de la croissance économique et de la prospérité. Nos universités ont un revenu par étudiant qui représente le tiers du revenu des grandes universités de recherche américaines. Or, ce qui distingue le plus les états aujourd’hui, ce ne sont plus les ressources naturelles, le capital ou les technologies, mais le capital humain.

L’ensemble de ces mesures créerait un climat qui permettrait de faire exploser l’entrepreneurship et l’emploi. Il ne faut en effet jamais sous-estimer le pouvoir de création de richesse d’un entrepreneur, comme l’ont prouvé Henry Ford, Bill Gates et, plus près de nous, J. Armand Bombardier et Alphonse Desjardins pour ne nommer que ceux-là. Nous ne pouvons nous permettre d’en échapper un seul, à cause de ce qu’il pourrait représenter pour la prospérité de la collectivité.

Voilà pourquoi, nos entreprises, ceux qui les créent et ceux qui les dirigent sont, à mon avis, si importants pour notre économie et notre progrès. Non seulement méritent-ils le support de la population, mais leur contribution à l’emploi, à la prospérité devrait convaincre les gouvernements de les libérer des entraves qui gênent leur créativité et leurs actions sur le marché national et à l’étranger.

À titre de membres actuels et futurs de la communauté des affaires, vous avez ou vous aurez le pouvoir d’influencer la démarche de votre organisation, de saisir toutes les occasions légitimes pour la faire progresser, de créer de la valeur, des emplois et de la richesse et de participer au progrès social.

Ce sont là des défis importants, qui requièrent, pour être réalisés pleinement, de la vision, du savoir faire et une capacité d’action, mais aussi des valeurs, parmi desquelles figurent au premier plan la créativité, l’intégrité, le courage, le respect des personnes et l’engagement dans la communauté.»