La rentrée de Sam Hamad
Le Président de la CCIQM pour 2000-2001 affirme son audace

Nous reproduisons ici intégralement l’allocution prononcée par le nouveau président de la Chambre de commerce et d’industrie du Québec métropolitain (CCIQM), Sam Hamad, le 19 septembre 2000, au Château Frontenac.

Monsieur le Président,
Distingués invités,
Chers membres,

Bonjour à toutes et à tous,

Merci d’être là si nombreux pour ce premier rendez-vous officiel de la nouvelle saison.

Comme vous le savez, j’ai pris mes fonctions de président de la Chambre de commerce et d’industrie du Québec métropolitain en fin mai dernier et c’est pour moi un grand honneur. En même temps, j’ai pleinement conscience des responsabilités qui m’incombent. Ceux qui me connaissent savent ma détermination et vous pouvez être convaincus de ma ténacité à défendre les intérêts de la communauté d’affaires de la grande région de Québec sur tous les dossiers qui l’interpellent.

Mon coup de départ cet été a été de vous consulter ainsi que les membres de notre conseil. En effet, lors du sondage Léger et Léger qui a été réalisé à la fin d’août, vous nous avez fait part de vos préoccupations et vous nous avez dit que le rôle de la Chambre devait aller au-delà du simple travail auprès des membres, qu’il devait être plus large et s’étendre à toutes les sphères du développement économique régional. Le message était clair et il n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Alors, si nous le faisions déjà, j’ai bien l’intention d’intensifier nos interventions car je ne crains pas de faire du bruit ni de remuer et l’audace marquera ma présidence.

Comme dit le proverbe:
«seul le poisson mort nage dans le sens du courant!»

Pôle central
NOTRE VISION DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION DE QUÉBEC : «L’ÉTOFFE D’UNE CHAMPIONNE»
 
 
Aujourd’hui, j’ai l’intention de vous présenter ma vision, qui est celle de la Chambre sur comment la région de Québec doit être et sous quelle forme nous devons la bâtir économiquement. 
 
Cette vision est centrée sur deux éléments fondamentaux : 1) un développement économique durable;2) les gens d’affaires.  
À partir de ceux-ci, quatre pôles viennent alimenter cette vision. 
 
Le premier pôle c’est notre région, sa fierté, sa crédibilité, sa prospérité et surtout la place qu’elle doit prendre….  
 
Mais avant d’aller plus loin, je vous invite à regarder ces quelques images. (présentation d’une Vidéo) 

Est-ce vraiment l’image que nous voulons projeter de la région de Québec?  
Quelle est l’image de notre région? Plus précisément, saisissons l’occasion que nous offre le Sommet des Amériques pour nous demander quel visage d’elle-même Québec offrira au monde entier à ce moment? 
 
 
1er pôle 
LE DÉFI: «QUÉBEC, BELLE ET FIERE AU CŒUR DES AMÉRIQUES»

 
 
C’est à Québec, en avril prochain, que 34 chefs d’État et plus de 10 000 participants, se réuniront pour le Sommet des Amériques. Le nouveau président des États-Unis effectuera à cette occasion sa première rencontre multilatérale officielle à l’extérieur de son pays. Pendant les semaines précédentes, et au cours des 20, 21 et 22 avril 2001, notre région sera au cœur de l’actualité internationale. Elle jouira d’une couverture médiatique sans précédent. Je vois déjà les grands réseaux de télévision américains diffuser des images du Château Frontenac et de la Terrasse Dufferin dominant le fleuve, j’imagine aussi les multiples reportages faisant l’éloge de l’accueil, de la qualité de l’hébergement, de la gastronomie, ainsi que du dynamisme des gens de Québec. Savez-vous combien coûte un 30 secondes sur les grands réseaux américains?  

Bien sûr, il y aura d’importantes mesures de sécurité, certes il y aura des contraintes au plan de la circulation, et il est certain que nous verrons des manifestants faire valoir leurs idées. Mais nous, gens d’affaires de Québec, pouvons-nous rester insensibles à l’idée de ces milliers de visiteurs qui logent dans nos hôtels, s’attablent dans nos restaurants et dépensent dans nos commerces? Comment ne pas croire qu’au sein des délégations officielles, il n’y aura pas des prospecteurs qui chercheront à mieux connaître le milieu socio-économique et à établir des contacts d’affaires pour investir ou échanger avec nos entreprises plus tard? 
 
Mais vous, chers membres, vous avez indiqué lors du sondage, que vous vous attendiez à ce que le Sommet entraîne des retombées significatives pour la région.  Et vous avez raison! Savez-vous à combien le Conference Board a estimé les retombées économiques du Sommet de la francophonie tenu à Moncton en septembre 1999? À 78 millions de $ pour 4 000 participants. Imaginez ce qu’entraînera la présence de plus de 10 000 personnes lors du Sommet de Québec! 
 
Savez-vous à combien se chiffrent nos exportations vers cinq de ces pays, soit, les États-Unis, ainsi que le Mexique, le Brésil, le Chili et l’Argentine? À 350 milliards de$. C’est notre marché, nos clients qui nous rendent visite! Saurons-nous leur ouvrir notre porte et leur réserver un bon accueil? Je suis convaincu que nos amis de Maax et d’Exfo, par exemple, qui transigent quotidiennement avec différents pays du continent américain, seraient d’accord et en auraient long à dire sur le potentiel économique que ces pays renferment. 
 
Croyez-moi, en tant que président de la Chambre, je serai le premier à promouvoir le Sommet et à travailler à son succès dans notre intérêt à tous. Mais je ne peux évidemment le faire seul… Nous avons besoin de chacun d’entre vous pour atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé, soit celui de profiter au maximum des retombées de cet événement. Je peux vous dire que, déjà, plusieurs acteurs se sont réunis autour de la Chambre pour mettre en valeur tous nos atouts et notre savoir-faire. 
 
 
Avec la Communauté urbaine de Québec, la Ville de Québec, l’Office du tourisme, l’Université Laval, la SPEQM, le CRCDQ, les Chambres de commerces et autres décideurs, des initiatives seront prises dans les prochaines semaines. 
 
 
Un proverbe que j’affectionne particulièrement nous rappelle que :  
«Lorsqu’une tempête de vent s’en vient, on ne bâtit pas un abri, mais plutôt un moulin à vent.»
 
Ce Sommet, qui se présente comme une belle opportunité et en même temps comme un test à notre région. Elle devra démontrer sa cohésion, sa solidarité, sa capacité à travailler ensemble pour maximiser les retombées et faire de la région un centre de classe mondiale. Moi, j’en fais le défi de la Chambre de commerce.  
La région a donc, en quelque sorte, rendez-vous avec elle-même en avril prochain. Revenons au schéma global du départ. 
 
2ème pôle 
UN ENTREPRENEURSHIP ORIGINAL ET DYNAMIQUE 

 
Le deuxième pôle c’est un entrepreneurship original et dynamique.  
Vous me permettrez ici de faire un petit rappel sur les bouleversements qu’a connus notre région au cours des cinq dernières années. Tous ici nous nous souvenons de l’effet important des coupures qui ont été faites dans les services publics et l’appareil gouvernemental au début des années 90.  
Où en sommes-nous aujourd’hui? À maints égards, nous pouvons être fiers des progrès accomplis. Nous avons pris le virage technologique et créé des entreprises autour de la nouvelle économie. Des entreprises, encore inexistantes il y a dix ans, sont maintenant parmi les leaders dans leur domaine. Mais il y a encore beaucoup à faire et je voudrais simplement insister sur trois pistes d’action, à savoir: 
 
 
1) Partenariat public-privé: 
 
Le premier c’est le partenariat public-privé.  
Certains disent que pour tirer vers l’avant le développement économique de notre région, il faudrait une locomotive, soit une grande entreprise qui par sa taille, le volume de ses affaires, aurait un effet de levier dans le milieu. Mais cette grande entreprise, nous l’avons! Et quelle est-elle? Les gouvernements et leur fonction publique!  
Pourquoi ne pas nous servir de cette grande entreprise, pour accroître le partenariat public-privé? Je suis convaincu que l’adéquation des compétences que l’on retrouve dans les gouvernements et dans le secteur privé permettrait de développer des produits et des services de qualité.  
La fonction publique à Québec c’est 40 000 personnes, c’est une expertise de classe mondiale dans plusieurs champs d’expertises, la santé, l’éducation, les ressources naturelles, les mines, la forêt, la gestion municipale, la justice, l’environnement, la gestion de l’eau et sûrement j’en oublie… 
 
 
Le partenariat public-privé, j’en fais mon cheval de batailles. Dans ma vision, c’est la base d’un développement économique endogène et durable pour la Capitale. Cependant, il ne faut pas mêler la privatisation et le partenariat public-privé. L’expérience de l’INO, pour ne nommer que celle-là, et la capacité que nous avons eue au cours des dernières années à créer des emplois et à développer le secteur de l’économie du savoir. Le partenariat avec l’Université Laval est l’exemple parfait de ce que le partenariat public-privé peut donner comme résultats. D’ailleurs, il m’apparaît inacceptable de tolérer que l’université n’ait pas sa juste part pour son financement. J’ai d’ailleurs fait part au ministre de l’Éducation de mes préoccupations et de notre appui à l’Université sur l’importante question de son financement. Soyons vigilants, c’est de notre développement qu’il s’agit! 
 
 
2) Accroître le potentiel du secteur manufacturier: 
 
Deuxième piste, c’est accroître le potentiel du secteur manufacturier.  
Les efforts de diversification ont surtout profité à la haute technologie, au tourisme et à la culture. Des données récentes nous indiquent que, au contraire, le secteur manufacturier reste sous-développé dans notre région par rapport à l’ensemble du Québec. Par exemple, en 1998, le poids du secteur manufacturier dans la région était de 9,8% par rapport à 18,4% pour l’ensemble du Québec. Entre 1995 et 1998, seulement 6 entreprises et 357 emplois ont émergé du secteur manufacturier. Vous conviendrez avec moi que c’est nettement insuffisant. Bien que la région mise beaucoup sur l’économie du savoir et le développement des nouvelles technologies, nous devons nous attaquer, dans les plus brefs délais, au développement du secteur manufacturier. Une présence plus marquée de ce secteur permettrait de créer plusieurs emplois et d’avoir un équilibre économique plus satisfaisant. 
 
 
3) Augmenter les investissements: 
 
La dernière piste d’action, c’est d’augmenter les investissements dans notre région. Pour illustrer cette affirmation, nous n’avons qu’à regarder la contribution d’Investissement Québec. Bien que le bilan général soit impressionnant, une analyse plus pointue nous révèle que la partie dévolue à notre région ne représente que 7,2% des projets, 1,93% des investissements et 2,7% des emplois. Cette proportion est appelée à croître au cours des prochains mois, lorsque les résultats du travail réalisé par le CDTI, du CNNTQ, de la Cité de l’optique et du CNE Rive-Sud seront connus. Cependant, vous serez d’accord avec moi pour affirmer qu’il y a encore beaucoup de place à l’amélioration. 
 
Le développement économique mobilise un esprit d’entrepreneurship mais aussi de la main d’œuvre qui, par ses caractéristiques, réponde aux besoins du marché. Voici maintenant le troisième pôle : la main-d’œuvre. 
 
 
3ème pôle 
LA MAIN-D’OEUVRE : DES COMPÉTENCES PROFESSIONNELLES À LA PORTÉE DE NOS ENTREPRISES 

 
D’abord, voici les derniers indicateurs globaux du marché du travail : 

  • Le Québec a vu son nombre d’emplois augmenter de 58 400 d’août 1999 à août 2000, alors que la région accuse un déficit de 2 100 emplois pour la même période.
  • Pendant que le taux de chômage passait de 9,8% à 8,5% pour l’ensemble du Québec, il passait de 9 à 9,3% dans notre région d’août 1999 à août 2000.
  • En même temps, la région connaît une pénurie d’emplois dans certaines spécialités. 

Nous voyons bien que notre région navigue à contre-courant du reste du Québec au niveau de l’emploi. Je ne crois pas qu’il faille dramatiser, mais ces chiffres nous obligent à nous asseoir et à trouver des solutions pour corriger le tir. Dans un contexte de croissance économique comme celui que nous vivons présentement, il m’apparaît anormal que la région la plus scolarisée du Québec traîne en queue de peloton. 
 
À cet effet, les nombreuses consultations que j’ai faites avec Emploi Québec, l’Université Laval, le ministère de Relations avec les citoyens et l’Immigration et les employeurs m’ont permis d’identifier certaines pistes d’action : 
 
 
1) Favoriser le multilinguisme : 
 
Lors de notre dernier Forum économique, les participants ont exprimé leurs préoccupations quant au manque de ressources bilingues dans la région de Québec. Les intervenants des secteurs touristique, manufacturier, de la haute technologie et des services reconnaissent que le manque de ressources polyglottes freine le développement économique. Nous avons entendu le message et j’ai le plaisir de vous annoncer qu’une nouvelle Table du Grappe a été créée afin de promouvoir le multilinguisme. Des initiatives seront prises dans les semaines à venir. C’est à suivre! 
 
Compter en son sein des ressources multilingues, certaines entreprises de Québec en font déjà un élément de leur stratégie. Etes-vous déjà allé dans les bureaux d’Exfo par exemple? C’est comme aux Nations-Unies ! Cela m’amène à une autre voie d’action : l’immigration. 
 
 
2) Pour une politique d’immigration pro-active : 
 
Au plan de la main-d’œuvre, nous savons tous que certains secteurs sont en pénurie. À cet égard, la Chambre a officiellement pris position relativement aux orientations ministérielles visant à accorder davantage d’importance au critère de la langue française dans la sélection des immigrants. Au nom de la Chambre, j’ai déposé, la semaine dernière, un mémoire qui recommande que l’on considère d’abord nos besoins en termes de compétences professionnelles et qu’ensuite on aille chercher les bonnes personnes dans leur pays, même si, éventuellement, ce n’est pas un pays francophone. J’ajouterai simplement que la Chambre continue d’être active pour sensibiliser les gens d’affaires à l’accueil des nouveaux immigrants, notamment avec son programme «Des jumeaux en affaires» que plusieurs d’entre vous connaissent sans doute déjà. 
 
La bataille pour l’emploi n’est jamais gagnée. Elle se livre à tous les instants et elle continuera à nous mobiliser. Ainsi, je suis heureux de vous annoncer que la 3e édition de la Foire de l’Emploi se tiendra au printemps, et que la Chambre continuera de favoriser les rapprochements entre le monde de l’éducation et des entreprises. 
 
Vous le voyez, qu’il s’agisse d’entrepreneurship ou d’emploi, des avenues sont à explorer. Osons être original! Démarquons-nous! Revenons maintenant au schéma initial. 

4 ème pôle
UN MODÈLE D’ORGANISATION RÉGIONALE ARTICULÉ ET PERFORMANT

Comment la région doit-elle se structurer pour atteindre ses objectifs?  
Là encore, considérons 2 axes d’intervention :1-Trouver un modèle optimum d’organisation régionale sur le plan des organismes de développement économique 

Je pense que pour assurer le développement soutenu de notre économie, nous devons procéder rapidement à la mise en œuvre d’un modèle intégré d’organisation régionale. À ce propos, 68% d’entre vous ont signifié – dans un récent sondage - que les décideurs économiques ne se concertent pas assez. À ce sujet, je vous rappelle que votre Chambre a été désignée pour veiller à la réalisation d’une étude qui permettra d’émettre des recommandations pour consolider la structure économique et développer les pôles de compétence régionale. 
 
 
Objectifs de l’étude 

  • Améliorer l’efficience de l’organisation régionale sur le plan des organismes de développement économique dans le sens de la stratégie de diversification économique; 
  • Comparer le mode d’organisation du développement écono-mique de la région avec des régions comparables dans le monde; 
  • Proposer un modèle optimum d’organisation régionale ainsi qu’une stratégie d’implantation et le cas échéant, proposer des modifications à la stratégie de diversification économique. 


2-Le regroupement des municipalités 
 
Vous le savez, un autre dossier important est actuellement débattu, celui de la réorganisation municipale. Les membres de la Chambre ont signifié leur approbation de regrouper les municipalités. Cependant, j’insiste pour rappeler aux décideurs que le succès de cette réforme repose sur des conditions préalables et que notre appui est conditionnel à ce qu’elles soient remplies. Le nouveau mode d’organisation que nous privilégions est celui qui: 

  • Favorisera le développement économique régional concerté;.
  • N’entraînera pas d’augmentation de taxes;
  • Sera accompagné d’une adaptation des lois du travail, notamment de modifications à l’article 45 du Code du travail. 

Peu importe la forme qui sera retenue par le gouvernement du Québec, la où les nouvelles structures devront être attrayantes pour l’investisseur, favoriser la cohésion régionale et un environnement propice au développement de nos entreprises, sans quoi c’est haut et fort que la Chambre fera entendre sa voix. 

CONCLUSION  
 
Chers amis, voici notre vision. Une vision audacieuse mais structurée, large mais pratique, enfin elle est et sera notre guide pour les prochaines années. Les actions du président de la Chambre ne sont jamais plus pertinentes et efficaces que lorsqu’elles prennent source dans la volonté d’agir et le dynamisme de ses membres. C’est dans cet esprit que j’aborderai chacun des dossiers.  
Oui, nous avons du pain sur la planche: stimuler les investissements, favoriser un partenariat public-privé plus large, développer le secteur manufacturier, miser sur les compétences professionnelles de la main d’œuvre, établir un modèle d’organisation régionale efficient… Mais le potentiel des entreprises, des institutions et des divers organismes de la région est inestimable. C’est à nous, gens de Québec, de nous donner les moyens pour l’exploiter à son maximum! 
 
C’est pourquoi je vous invite tous, gens d’affaires, partenaires publics, décideurs de différents milieux, à travailler main dans la main pour réussir ensemble le développement économique de notre région. Et je vous rappelle que je vous ai lancé un défi : celui de la mobilisation tout azimut pour le Sommet des Amériques! 
 
Comme nos représentants aux Jeux Olympiques de Sydney, la région doit dès maintenant viser le podium, rien de moins. Prouvons-nous que la Capitale a l’étoffe d’une championne!  
Car, en terminant, il ne faut jamais oublier que «L’aigle qui vole haut, voit plus loin!»