La fusion des organismes à vocation économique est plus urgente que celle des municipalités

par Benoit Routhier

 

Si le but qu'elle vise est vraiment un meilleur développement économique régional, la ministre des Affaires municipales du Québec, Mme Louise Harel, procède à l'envers du bon sens dans le dossier de la réforme municipale. Elle doit d'abord et avant tout voir à fusionner, si elle tient à ce verbe, les multiples organismes censément voués au développement et à la promotion économique de la grande région métropolitaine. Je dis " censément " car, dans les faits, ces organismes de tout acabit sont présentement souvent plus des prétextes à maintenir des emplois subventionnés qu'à assurer la croissance économique de notre partie de la planète.

Il serait très intéressant, et probablement décourageant, de voir quel part du budget de ces organismes qui pullulent va à la simple administration. S'il ne reste qu'un 30 % des subventions qu'ils reçoivent des municipalités surtout et des gouvernements ensuite pour faire la promotion de la région et du développement, il ne faut pas se surprendre que les résultats soient maigres!

À quoi servira la réduction du nombre de municipalités si les montants d'argent (ce serait autour de 50 M $ par an) dédiés à la promotion et au développement économiques continuent d'être saupoudrés sur une cinquantaine d'organismes dont le travail se dédouble et qui oeuvrent chacun dans ses bureaux sans réelle concertation?

Le gouvernement aurait tout intérêt à faire comme les politiciens de la région, du moins une majorité, le suggèrent, à savoir concentrer les sommes réservées à la promotion du développement régional aux mains de la Société de promotion économique du Québec métropolitain (SPÉQM) et élargir son mandat à la faveur d'une table d'orientation économique. Cette table réunirait des représentants des différentes sphères d'activité. Présentement les gens d'affaires qui ont besoin de s'adresser à des organismes de développement économique ne savent pas à quel saint se vouer, où s'adresser. En créant les centres locaux de développement (CLD), le ministre Guy Chevrette voulait faire le ménage dans ces trop nombreux organismes. Il ne l'a pas fait. Résultat: un organisme de plus!

Par ailleurs, qu'il y ait deux, trois ou quatre villes au lieu d'une quarantaine sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec (CUQ), en quoi cela aiderait-il la ville-centre, Québec? Prenons l'hypothèse de trois villes, comme le suggère le rapport Bédard. Québec serait alors coincée entre deux villes plus grosses, plus populeuses, plus puissantes. La concurrence n'en sera que plus forte, à l'avantage de la banlieue naturellement.

Par ailleurs, le remplacement de la CUQ et de parties des MRC de la Rive-Sud par une communauté métropolitaine qui engloberait plus d'une quarantaine de municipalités des deux côtés du Saint-Laurent sera bienvenue. Cela aidera grandement à l'équité fiscale de la région si on lui donne des responsabilités relatives aux événements d'envergure régionale qui se tiennent souvent dans la ville-centre. Alors Québec ne sera plus seule à supporter les dépenses occasionnées par des événements tels le Festival d'été, le Carnaval, etc. D'autres municipalités profiteraient de la situation aussi quand des événements à résonnance régionale auraient lieu chez elles, comme la Saint-Jean à Val-Bélair.

À vouloir à tout prix faire des fusions pour le simple plaisir de diminuer le nombre de municipalités ne donnera pas grand chose. À part le fait que le travail des fonctionnaires du gouvernement en serait réduit et simplifié, ça ne changera pas la situation du côté du développement économique. Ce qu'il faut c'est mettre de l'argent dans ce domaine, mais qu'il soit surtout utilisé à bon escient, c'est-à-dire qu'il soit avant tout, en très grande majorité, consacré réellement à la promotion de la région. Pour cela il faut faire le ménage dans les trop nombreux organismes qui sont censés s'en occuper.

Et si elle tient mordicus à fusionner les municipalités, la ministre Harel doit envisager la formation d'une seule ville pour la région métropolitaine de Québec. De cette façon elle pourra engendrer des économies, pour autant que le gouvernement prenne les moyens de réduire le nombre d'employés. Une seule ville signifierait la disparition de la CUQ et de parties de deux MRC de la Rive-Sud. Imaginez les économies réalisables! Mais le gouvernement ne s'attaquera pas à si gros morceau, c'est certain.
Alors qu'il commence donc par le commencement: la fusion des organismes voués à la promotion du développement économique. Toute la région ne s'en portera que mieux. Ne vous entêtez pas à vouloir gagner à tout prix contre les maires de la banlieue, Mme Harel. Là n'est pas la priorité ni le bien de la communauté régionale.