Haute voltige sur la scène internationale pour le Cirque Éos

par Blaise Robinson

 

Né d’une idée de Michel Rousseau, jongleur et acrobate, et des finissants de l’école de Cirque de Québec en 1995, Éos est aujourd’hui à la conquête du monde. Une partie de la troupe se donnait en spectacle à Seattle lors des festivités du passage à l’an 2000, alors qu’au même moment, une plus petite équipe du cirque voyait ses représentations annulées à Paris, et pour cause : la tempête avait jeté par terre le chapiteau.

Avec un carnet de commande plein à craquer, des médailles de concours internationaux pour ses artistes-accrobates et un personnel administratif qui a doublé depuis janvier, le Cirque Éos de Québec, en pleine expansion, a le vent dans les voiles.

Sur le tableau de l’une des salles de réunion, on a installé une vingtaine de photos qui montrent tous les angles d’un grand jardin de la banlieue de Bruxelles. « Pour préparer un spectacle, explique Jocelyne Chouinard, responsable des communications des Productions Éos, il faut bien saisir l’espace que l’on a pour manœuvrer. » Dans le cadre de l’événement Les Nuits du Cirque présenté à la fin juin dans ce jardin d’Enghien, l’équipe d’Éos mettra en scène son spectacle Imaginaire.

Fondé en 1997 puis incorporé en juin 1998, le Cirque Éos est né de l’idée de Michel Rousseau, jongleur et acrobate, aujourd’hui directeur des Productions Éos. Il enseigne toujours à l’École de Cirque de Québec qu’il dirige depuis plusieurs années. Le Cirque Éos est une idée qu’il a développée avec les finissants de l’École de Cirque en 1995. Aujourd’hui encore, la plupart des artistes-acrobates d’Éos sont des anciens de son école. « L’École de Cirque de Québec reste notre pépinière, souligne Jocelyne Chouinard, un lieu de recrutement et d’entraînement pour nos artistes. »

Bien encadrés, ces jeunes artistes et acrobates de la région de Québec ont su se tailler une réputation au niveau international en gagnant de nombreux prix : médaille d’or et prix du public pour deux des jongleurs d’Éos lors de la rencontre annuelle de l’Association Internationale des jongleurs en juin 98 au Nevada, médaille d’argent au Festival International de Belgique en mars 1998, pour ne nommer que celles-là. Dans les coulisses, les artistes sont soutenus par une équipe de professionnels pour la mise en scène, la chorégraphie, la musique et les costumes.

Le spectacle Imaginaire, celui avec lequel Éos roule dans divers événements à travers le monde, des Children Festivals aux États-Unis jusqu’aux Nuits du Cirque en Belgique en passant par une multitude de congrès en Amérique du Nord, regroupe entre 15 et 24 artistes pour une durée de 30 à 45 minutes selon le contexte, le tout encadré par une équipe de production de cinq personnes. « Chaque personnage du spectacle est travaillé de façon particulière, et chaque artiste a une bonne place pour s’exprimer et développer son personnage », précise Jocelyne Chouinard.

Autour du spectacle Imaginaire, Les Productions Éos répondent de plus en plus à des commandes spécifiques et des demandes parfois assez particulières. Ainsi, trois artistes-acrobates d’Éos ont fait l’aller-retour au Japon afin de servir de figurants lors d’un défilé de mode. « C’est une agente de Montréal qui nous avait contacté pour ce contrat, explique Jocelyne Chouinard. Notre équipe est allé au Japon pour présenter en arrière-scène de la parade une routine avec des grands tissus. »

Trois artistes-acrobates d’Éos 
ont fait l’aller-retour au Japon
 afin de servir de figurants
lors d’un défilé de mode

Les productions Éos fait tourner son spectacle dans les milieux corporatifs, c’est-à-dire dans des congrès, comme ce fut le cas à Chicago cet hiver dans le cadre d’un congrès international sur l’alimentation. Au Québec, le cirque se produit essentiellement dans des congrès et lors de divers festivals d’importance. « Mais, comme le fait remarquer Jocelyne Chouinard, le marché québécois reste très limité, il faut donc se tourner vers l’extérieur pour prendre de l’expansion. »

Pas de compétition avec le Cirque du Soleil : le type de marché est trop spécifique. Éos entretient néanmoins de bonnes relations avec le Cirque du Soleil, mais pas de projets conjoints à l’horizon. Le cirque Éos cherche davantage des partenaires de d’autres domaines pour ouvrir ses horizons. La jeune entreprise de Québec a tendance à s’associer à des boîtes comme Expérience International, une entreprise très branchée sur l'Europe, qui fait dans le multimédia. Chez Éos, on y voit la possibilité de s’ouvrir et de développer le marché européen.

Des promoteurs européens ou américains viennent régulièrement jusqu’à Québec pour voir le cirque en spectacle. « Les promoteurs nous disent souvent que nous sommes plus forts au niveau performance et originalité que la majorité des troupes d’Europe. Chez Éos, on cherche à marier le cirque moderne et la performance. En Europe, ils donnent plus dans le théâtral », soutient Jocelyne Chouinard.

Le carnet de commande d’Éos se rempli, et des quatre administrateurs qu’ils étaient en janvier, ils sont maintenant passés à huit. Les Productions Éos, qui reçoivent certaines subventions de divers ministères pour faire de la prospection, se sont vus accorder récemment une subvention de 202 500$ par le Fonds de diversification de l’économie de la Capitale, avec le mandat de créer 45 emplois d’ici mars 2001. Avec des ventes en 1999 de l’ordre de 534 000$, cette nouvelle subvention est un véritable tremplin vers le rayonnement international du Cirque.

Chez Éos, on ne semble pas avoir peur du vertige. Avec cette nouvelle subvention, les prévisions pour l’année 2000 sont de 1 million $ de ventes, dont 80 000 $ de bénéfices, et un nombre incalculable d’heures d’avions pour la troupe. « La demande est là, tellement qu’on arrive pas à y répondre complètement », avoue Jocelyne Chouinard.

Expansion oblige, l’équipe d’Éos prépare déjà un nouveau spectacle. Et puis même si elle vient de s’installer dans des locaux de la rue Salaberry, la jeune entreprise culturelle songe déjà à réunir sous un même toit les Productions Éos et l’École de Cirque, là où les artistes d’Éos s’entraînent.