Le capitalisme sauvage risque d'avoir
raison de la région de Lévis
|
Qui aurait dit, ou pensé,
que le rayonnement international de la capitale du Québec et sa région dépendait
en bonne partie de Lévis? Présentement, en effet, deux dossiers qui
retiennent l'attention du monde des affaires et de la population en général
risquent d'avoir des répercussions sur l'avenir international de la région
et ils concernent deux entreprises de Lévis. Bien sûr je parle des deux
grandes institutions que sont le Mouvement
coopératif Desjardins et le chantier Industries
Davie, du secteur Lauzon. Tout le monde aura compris qu'il s'agit de
la montréalisation insidieuse du Mouvement Desjardins et du projet d'un
consortium de se porter acquéreur du chantier Davie. L'évolution des
deux dossiers ne permet pas, pour l'instant du moins, un optimisme débordant
quant aux chances de la région de la capitale de se développer grâce,
en partie, à ces deux piliers de l'économie lévisienne. LE MOUVEMENT DESJARDINS Une vaste étude réalisée
par KPMG pour la Chambre
de commerce de la rive sud, la Ville
de Lévis, le CLD de la MRC Desjardins, la Société
de promotion économique du Québec métropolitain et le CRCD Chaudière-Appalaches a attaché le grelot récemment. Elle
fait voir, entre autres, que des 3228 employés de la Confédération des Caisses Desjardins, 660 seulement sont localisés
à Lévis contre 2568 à Montréal. Ça signifie que 80 % des emplois sont
à Montréal. Idem au niveau des cadres. Sur les 23 fonctions de la Confédération
comptant au total 155 cadres de direction, 55 sont à Lévis (35%) et 100
à Montréal (65%). Plus: parmi les cadres oeuvrant au sein des 13
fonctions qualifiées de stratégiques pour le développement de la Confédération,
16% sont à Lévis et 84% à l'extérieur de notre région. Autrement dit,
comme la presse l'a déjà écrit, le cœur est à Lévis, mais la tête
est à Montréal. La tendance à la montréalisation
est bien réelle et risque de s'accentuer. Je veux bien croire qu'il y a
des avantages certains pour des entreprises à s'installer dans la métropole.
Mais, grand dieu, quand les dirigeants de nos grandes institutions
comprendront-ils qu'ils ont aussi un rôle social à jouer dans leur
milieu et que de se sauver à Montréal et laisser tomber une région
complète, même de façon hypocrite comme le fait la Confédération
Desjardins en gardant des coquilles à Lévis, relève du plus pur
capitalisme sauvage tel qu'on le connaissait au début du siècle? Vraiment Alphonse
Desjardins, le fondateur du Mouvement Desjardins, aurait honte de voir
ce que ses successeurs ont fait. Lentement, mais sûrement, on les a vus
devenir de plus en plus durs de négociation avec les gagne-petits et
parfois leur enlever leurs biens de façon sauvage au lieu de négocier
avec eux un arrangement pour ne pas trop les pénaliser. Au fur et à mesure que les
banques revenaient au capitalisme sauvage on a vu la Confédération
Desjardins suivre, même si c'était fait timidement et d'un air gêné. Aujourd'hui, pour être dans
le monde des grands de la finance, elle se croit obligée d'avoir la tête
à Montréal. Pourquoi pas New York ou Hong Kong tant qu'à y être? Pourtant, tout le monde sait
qu'aujourd'hui, avec l'informatique, une entreprise peut opérer de façon
aussi efficace dans un lieu ou un autre. Et même si cela peut avoir un
prix, la Confédération Desjardins se doit d'être respectueuse du milieu
qui l'a vu naître et fait croître, la région de Québec et Lévis en
particulier. Elle aidera ainsi au rayonnement international de Québec
dans le domaine de la finance. La campagne pour la
succession du président Claude Béland
est une bonne occasion pour les dirigeants de l'institution de prendre
fait et cause, avec un engagement ferme, pour la région de Québec. LE CHANTIER DAVIE L'avenir du chantier Davie
peut aussi avoir des conséquences importantes sur le rayonnement
international de la région de la capitale. En effet, ce chantier a développé
une expertise incomparable et sa fermeture aurait des conséquences assez
désastreuses pour la région. En plus de créer plusieurs centaines de chômeurs,
elle signifierait que le silence tomberait sur la bonne réputation des Québécois
à construire et réparer des navires. Il ne reste plus beaucoup de
chantiers maritime dans le Saint-Laurent. Les conséquences néfastes de
la fermeture de Davie se feraient sentir bien plus loin que dans la région
immédiate. Ce n'est pas pour rien que le ministre fédéral de
l'Industrie, John Manley, a
l'intention de faire adopter une loi pour encourager les chantiers
maritimes du Canada. Mais, pour que Davie survive, il faudra bien sûr que le syndicat des employés fasse preuve de souplesse dans les négociations. Mais aussi il faudra que la direction du consortium formé de Groupe Desgagnés, Groupe Océan et Syntek Technologies, négocie lui aussi de façon réaliste. Ce qu'il a proposé récemment n'avait aucun sens: il y a des limites à vouloir obtenir tous les droits et quasi aucune responsabilité envers ses employés. Encore dans ce cas, on sent une mentalité de sauvages capitalistes, comme dirait Chartrand… |